L’allocation de l’épargne à l’utilisation productive : le système bancaire, la création monétaire, les actions, les obligations et le financement de l’économie

Modifié par Julien Lenoir le 27 septembre 2018

Par Philippe Frouté : Maître de conférence des Universités

Dernière mise à jour: mars 2018

Pour se financer, une entreprise possède principalement trois options :

1. soit elle dispose de suffisamment de capacités d’autofinancement et va donc recourir à ses ressources propres pour financer le renouvèlement de son capital ou l’acquisition de nouveaux capitaux ;

2. soit elle peut lever des fonds auprès d’investisseurs qui vont devenir propriétaires de parts de l’entreprise, c’est le principe notamment de l’émission d’actions ;

3. soit l’entreprise peut s’endetter.

Les deux derniers types de financement introduisent de nouveaux acteurs qui vont participer à la vie de l’entreprise et qui possèdent leurs objectifs. En France, les principaux investisseurs sont les établissements bancaires et financiers, près de 50% de la valeur ajoutée en France est créée par ce secteur. Ce secteur d’activité est particulier et obéit à des logiques productives propres, En outre, il participe à une fonction essentielle à l’activité économique : la création monétaire. La création monétaire est régie par un ensemble de règles qui vont contraindre le secteur bancaire dans sa capacité à octroyer des financements. Notamment, les banques doivent constituer et déposer des réserves auprès de la Banque centrale pour pouvoir octroyer de nouveaux crédits. Ainsi, l’épargne et l’endettement sont au cœur du fonctionnement de la sphère monétaire qui va permettre à des entreprises de financer l’économie réelle. La compréhension des canaux de transmission de l’épargne vers une utilisation productive nécessite ainsi de comprendre le rôle joué par le système bancaire dans le cadre de la création monétaire (section 1), mais également les déterminants des arbitrages réalisés par les acteurs économiques dans leurs choix de financement (section 2) qui vont conditionner la demande de monnaie et l’activité bancaire qui conditionne elle-même les besoins d’épargne et son allocation vers un usage productif (section 3).

1 Le rôle du système bancaire dans la création monétaire

Dans les pays développés, la monnaie est constituée à plus de 80% par les dépôts à vue et autres formes de créances sur le système bancaire. Le système bancaire est ainsi le principal créateur de monnaie.

1.1 Le processus de création monétaire

On peut définir la création monétaire comme l’action consistant à monétiser des actifs auprès d’agents non financiers. En d’autres termes, il s’agit de transformer des créances sur des agents non bancaires en moyens de paiement immédiats.

La création monétaire est le fait de la Banque centrale et des banques dites de second rang. La Banque centrale est l’institut d’émission de la monnaie fiduciaire (pièces et billets), les banques de second rang (banques commerciales, banques d’investissement, etc.) sont à l’origine de la monnaie scripturale (dépôts à vue et autres formes de créances).

Les banques de second rang créent de la monnaie scripturale à l’occasion de trois types d’opération qui sont toutes des acquisitions de créances : créances sur l’extérieur, créances sur le Trésor et créances sur l’économie. Ce sont ces dernières qui nous intéressent le plus dans le cadre de cette fiche . En effet, ce type de créance intervient quand les banques octroient des crédits aux agents non financiers comme les ménages et les entreprises. Par exemple, deux entreprises, un client et son fournisseur, peuvent avoir contracté une reconnaissance de dette (paiement d’une livraison six mois après réception par exemple). Le fournisseur peut demander à sa banque de disposer immédiatement de la somme due, pour éviter des problèmes de trésorerie par exemple. Il peut faire escompter la dette de son client auprès de la banque. Cette dernière devient la créancière du client. Le fournisseur qui paie des intérêts peut disposer immédiatement des fonds. A l’échéance, le paiement de la dette par le client détruit cette monnaie créée.

1.2 L’encadrement du processus de création monétaire

Le processus de création monétaire n’est cependant pas illimité. D’une part, la création monétaire dépend des besoins et des comportements des agents, d’ autre part elle dépend d’un ensemble de règles prudentielles. Elle est enfin encadrée par le rôle de régulateur joué par la Banque centrale.

Ainsi, l’octroi de crédit dépend de l’existence d’une demande de crédit. Sans besoin de financements ou de liquidités, il n’y a pas de demande de création monétaire. Lors des phases de récession, lorsque les carnets de commande des entreprises baissent, la demande de création monétaire de la part des agents économiques se tarit. La création monétaire dépend ainsi de l’évolution de la conjoncture économique. En outre, les agents économiques peuvent souhaiter disposer d’une partie de leurs fonds sous forme de monnaie fiduciaire. Une banque de second rang doit donc acquérir cette forme de monnaie auprès de la Banque centrale ou d’autres banques de second rang. Ces opérations de refinancement ont lieu sur le marché interbancaire dont le fonctionnement est régulé par la Banque centrale (voir Fiche 10).

D’autre part, la capacité d’octroi de crédit des banques est restreinte par l’existence de régulations sectorielles. Parmi les plus connues, on trouve le coefficient de réserves obligatoires. Lorsqu’une banque octroie un crédit, elle doit déposer sur son compte ouvert auprès de la Banque centrale une portion du crédit accordé. La proportion requise dépend du coefficient de réserves obligatoires. La fixation de ce coefficient permet de limiter les capacités de création monétaire des banques de second rang. Sa détermination relève de la Banque centrale qui peut ainsi contrôler indirectement l’évolution des liquidités sur les marchés. Pour les dépôts à vue, la Banque centrale européenne fixe un coefficient de 1%. Les dépôts réalisés par les banques de second rang auprès de la Banque centrale sont libellés en monnaie Banque centrale. L’ensemble des avoirs des banques commerciales en monnaie centrale et en monnaie fiduciaire constitue la liquidité bancaire ou la base monétaire.

1.3 Les liens entre création monétaire et allocation de l’épargne

Plusieurs débats questionnent la capacité de la politique monétaire à encadrer la création monétaire et in fine à orienter l’allocation de l’épargne. Parmi ces débats, la théorie du multiplicateur de crédit et ses controverses cristallisent le mieux ces questions. La théorie du multiplicateur de crédit considère que la base monétaire détermine la masse monétaire. Pour pouvoir allouer des crédits, et donc participer au financement de l’économie, cette théorie stipule que les banques doivent posséder au préalable des réserves supplémentaires. Ceci revient à dire que la Banque centrale contrôle in fine l’allocation de l’épargne car elle peut contrôler les capacités d’octroi de crédit des autres établissements bancaires. Dans ce cadre, deux paramètres permettent à la Banque centrale de contrôler l’octroi de crédit : de manière indirecte avec le taux de retrait sous forme fiduciaire qui dépend des préférences des agents économiques et de manière directe avec le taux de réserve obligatoires qui peut être modifié par la Banque centrale.

Dans ce cadre, l’efficacité de l’allocation de l’épargne dépend de la capacité de la Banque centrale à encadrer le comportement d’octroi de crédit des banques secondaires. Cependant, des critiques se sont élevées sur la nature même des fondements de cette capacité. La première relève d’une analyse du comportement des institutions bancaires de second rang. Par exemple, on oppose la théorie du diviseur de crédit (Louis et Vivien Lévy-Garboua, 1972) à celle du multiplicateur. La théorie du diviseur suppose que les banques de second rang peuvent octroyer des crédits sans posséder de réserves suffisantes. L’idée est de coupler l’octroi de crédit avec la réescompte d’effets de commerce qui va contraindre la Banque centrale à créer de la monnaie pour ne pas déstabiliser le système bancaire. La masse monétaire génère ici la base monétaire. Le bilan de la Banque centrale s’accroît en réaction au crédit et non l’inverse. La théorie du diviseur de crédit suppose toutefois que la banque de second rang s’appuie sur un besoin de financement exprimé par un client. La Banque centrale répond ainsi à un motif de transaction qui s’exprime par des choix de modalités de financement génératrice de monnaie. Ce processus dépend donc des choix de financement des entreprises. De nombreux travaux en finance d’entreprise se sont intéressés à cette question.

2 La structure optimale de financement des entreprises

Deux questions centrales sont au cœur des recherches en finance d’entreprise :

1. La structure de financement d’une entreprise exerce-t-elle une influence sur la valeur de l’entreprise ?

2. Dans l’affirmative, existe-t-il une structure de financement optimale ?

Franco Modigliani et Merton Miller ont montré que si les marchés sont parfaits, qu’il n’y a pas d’impôts ni de défaillances d’entreprises, alors il n’existe pas de liens entre la structure de financement d’une entreprise et la valeur de cette dernière.

En revanche, si la fiscalité gouvernant l’endettement est attractive (déduction fiscale sur les intérêts d’emprunt par exemple) et si le risque de défaillance existe, deux hypothèses correspondant davantage à la réalité, alors il existe un niveau d’endettement optimal permettant aux entreprises de bénéficier d’un effet de levier créateur de valeur.

La détermination de la valeur cible d’endettement reste cependant délicate et plusieurs méthodes ont été élaborées pour la réaliser.

2.1 Structure du capital et théorie des options

Les travaux de Robert Merton, Fisher Black et Myron Scholes appliquent la théorie des options à cette question. L’idée est de considérer la dette comme une option d’achat sur l’actif économique d’une entreprise. Par exemple, lorsqu’une entreprise émet des obligations, les prêteurs acquièrent la société jusqu’à remboursement de la créance et sur le marché obligataire, les actionnaires ou les investisseurs acquièrent la possibilité de racheter l’entreprise en remboursant la dette. De ce fait, la dette peut être assimilée à une option d’achat d’un montant égal au nominal de la dette à rembourser à échéance. En appliquant la théorie des options aux différents actifs on peut alors valoriser l’entreprise et déterminer la valorisation optimale.

2.2 L’approche par l’analyse des risques

D’autres modèles cherchent à déterminer un niveau minimum de capitaux propres puis maximisent la valeur de l’entreprise compte-tenu de ce niveau minimum. L’idée est que les capitaux propres sont des ressources pour lesquelles l’obligation de rémunération peut être différée dans le temps sans risque de sanction monétaire. La politique de redistribution des dividendes d’une entreprise est un bon exemple. En effet, la redistribution peut varier entre une redistribution totale aux actionnaires ou nulle en fonction de la volonté des dirigeants ou du conseil d’administration. Dans le cas d’un contrat de dette, le non-respect des échéances est à l’origine de l’entrée en situation de défaillance. Il n’est pas possible de déroger unilatéralement au remboursement de ses créances.

De ce fait, la rémunération aléatoire des capitaux propres permet de financer les dépenses certaines des autres types de capitaux. Dès lors, le coût des capitaux propres devient plus élevé car ils intègrent une quasi-prime d’assurance en servant de garantie pour les autres types de capitaux dont la dette. L’évaluation des coûts et des bénéfices relatifs des différents types de capitaux requiert alors le développement d’une analyse des risques. Plusieurs méthodologies peuvent être utilisées, Value at Risk, modèle d’évaluation des actifs financiers, etc.

Une variable centrale pour effectuer ces évaluations, d’une part pour évaluer le niveau de risque mais également la rémunération nécessaire pour compenser ce risque est le taux d’intérêt. On peut donc expliquer en partie l’arbitrage réalisé par les chefs d’entreprises à l’aide de ce dernier.

Historiquement, depuis le début de la période des Trente Glorieuses, on peut distinguer plusieurs périodes correspondant à différentes modalités privilégiées par les entrepreneurs pour financer leurs entreprises qui ont varié parallèlement avec le niveau des taux d’intérêts. Dans les années 50-60, les entreprises recouraient peu à l’emprunt. Cette période de stabilité économique est caractérisée par la recherche de l’autonomie financière. C’est au début des années 70, avec des taux d’intérêts réels faibles que l’endettement a commencé à croître de façon importante. Avec la hausse des taux d’intérêts initiée à la fin des années 70 et au début des années 80, les entreprises se sont désendettées pour limiter les charges d’intérêts. Ce mouvement s’est poursuivi au début des années 90 dans le contexte de crise. La reprise économique et la décrue des taux d’intérêts qui l’ont accompagné marquent un retour de l’endettement comme source de financement pour les entreprises dans un contexte de faible inflation. La poursuite de cette tendance a néanmoins contribué à la crise économique de la fin des années 2000 et ses conséquences actuelles (voir Fiche 11).

Ainsi, l’évolution observée de la structure du capital des entreprises françaises montre les liens existants entre la conjoncture économique, l’évolution des taux d’intérêts et la politique monétaire.

3 Demande de monnaie, activité bancaire et allocation de l’épargne vers un usage productif

Au cœur des débats relatifs à la politique monétaire, la détermination de la demande de monnaie occupe une place centrale. La compréhension des déterminants de cette demande est en effet essentielle à la compréhension des interactions entre les créateurs monétaires (le système bancaire) et les utilisateurs de la monnaie (les entreprises).

3.1 Les déterminants de la demande de monnaie

La question des déterminants de la demande de monnaie traverse la pensée économique depuis les origines de la discipline. Chez les classiques, comme David Ricardo ou Jean-Baptiste Say, la monnaie n’est qu’un voile. Son rôle est celui d’un intermédiaire des échanges. Cette logique est reprise par les auteurs néoclassiques comme Léon Walras qui adoptent une vision purement transactionnelle de la fonction monétaire. La principale conclusion de leurs analyses est que la demande de monnaie ne dépendrait pas des taux d’intérêts. Le schéma esquissé est que c’est la croissance économique qui est à l’origine de la demande de monnaie ainsi que du niveau des taux d’intérêts. La croissance ne dépend donc pas à long terme du taux d’intérêt. Il faut attendre John Maynard Keynes pour que les analyses monétaires se modifient. John Maynard Keynes distingue le motif de transaction où la monnaie est un intermédiaire des échanges du motif de spéculation. Le motif de spéculation exprime l’idée selon laquelle les agents économiques peuvent désirer détenir de la monnaie pour elle-même. Le raisonnement keynésien repose sur une analyse de la spéculation qui a lieu sur les marchés financiers. Le mécanisme de base repose sur l’existence d’une relation inverse entre le cours d’un titre et le taux d’intérêt. Le mécanisme est le suivant : si un agent anticipe que les taux d’intérêts vont augmenter il a intérêt à conserver ses liquidités pour pouvoir les placer demain à un taux d’intérêt plus rémunérateur. Ainsi, personne ne souhaite acquérir des actifs financiers (actions ou obligations) aujourd’hui et leur cours diminue faute de demande. En revanche, si vous anticipez une baisse des taux d’intérêt, il est préférable d’investir aujourd’hui car les rendements futurs seront plus bas. Ces raisonnements établissent une relation négative entre le niveau des taux d’intérêts et la demande de monnaie.

Cette relation va influencer l’efficacité de l’allocation de l’épargne vers un usage productif. Deux exemples permettent de comprendre les mécanismes en jeu. Supposons dans un premier temps que les taux d’intérêts aient atteint leur niveau maximum . Ils ne peuvent alors que diminuer. Les agents économiques vont chercher à acquérir des titres, actions ou obligations, aujourd’hui. Cette situation va permettre aux entreprises de financer leurs projets d’investissement. Si à l’inverse, les taux d’intérêt sont à leur seuil minimum, ils ne pourront que remonter. Dès lors, le prix des titres détenus par les agents économiques ne pourra que descendre. Les agents ont tendance à vendre leurs titres et les entreprises ne trouveront pas preneurs si elles cherchent à se financer par des émissions de titres (actions ou obligations) faute d’acheteurs.

Pour compléter l’analyse, il ne faut pas oublier que le canal des taux d’intérêts est aussi l’un des principaux canaux de transmission de la politique monétaire. En fonction des objectifs guidant la définition de cette politique économique (voir Fiche 10) les entreprises peuvent se trouver dans l’incapacité de financer leur politique d’investissement à l’origine de la croissance car la politique monétaire peut suivre des objectifs différents.

En résumé, John Maynard Keynes introduit l’idée que les agents économiques peuvent souhaiter détenir des liquidités pour conserver la capacité de bénéficier d’opportunités de profits futurs. Ce faisant, une partie de la masse monétaire peut se trouver détourner d’un usage productif. Cette situation est d’autant plus probable que le niveau des taux d’intérêts est faible. Ce constat permet de comprendre en partie pourquoi Mario Draghi, le gouverneur de la Banque centrale européenne, annonce une stabilité des taux directeurs. S’il annonçait une hausse des taux comme Janet Yellet présidente de la Réserve Fédérale des Etats-Unis, les agents pourraient « thésauriser » dans la perspective de profits futurs, ce qui pourrait nuire à la reprise de l’investissement. En d’autres termes, la conception keynésienne du rôle joué par les taux d’intérêts revient à considérer que le taux d’intérêt n’est pas la rémunération compensatrice de la renonciation à consommer (voir fiche 2) mais la rémunération de la renonciation à la liquidité.

A la suite de Philippe d’Arviset, il convient de rappeler que les mécanismes décrits précédemment ne sont que des raccourcis utiles à l’analyse mais qui masquent une réalité plus complexe. En effet, le taux d’intérêt auquel les banquiers centraux font référence est le taux directeur principal aussi appelé le taux de politique monétaire. Or, ce sont les taux de marché aux différentes échéances qui conditionnent le coût du crédit et donc le recours à l’épargne pour financer l’activité économique. Les mouvements des taux directeurs n’ont des effets que dans la mesure où ils vont affecter les taux à échéance plus longues. Philippe d’Arviset relève que l’incidence des taux directeurs est d’autant plus forte et rapide que la part de l’endettement à court terme ou à taux variables est importante.

Par exemple, les situations fluctuent très largement selon les pays. En Europe, à la fin des années 2000, la part de l’endettement hypothécaire à taux variable était de 15% en Allemagne, 35% en France mais atteignait 85% en Italie, 92% en Irlande, 95% en Espagne et 98% au Portugal.

Les liens entre les différents taux d’intérêts peuvent être résumés par la courbe des taux ou la structure par terme des taux d’intérêts.

3.2 La structure par terme des taux d’intérêts

En circonstances normales, la courbe des taux est croissante et concave (les taux courts sont plus faibles que les taux longs car ils sont moins risqués). Néanmoins, la forme de la courbe des taux peut évoluer en fonction de l’évolution des anticipations des taux futurs. Ainsi, comme nous l’avons rappelé, la politique monétaire agit sur les taux courts tandis que les agents économiques prennent leurs décisions sur la base de taux plus longs. Sur le marché du crédit, un emprunteur préférera s’endetter à long terme à taux fixe tandis qu’un prêteur préférera prêter à court terme. Pour inciter les prêteurs à prêter à long terme, les emprunteurs doivent acquitter une prime de rendement qui mesure l’écart de rendement entre un investissement unique de long terme et un investissement répété en titres courts sur la même période. Le niveau de cette prime dépend également des caractéristiques du bilan des emprunteurs : composition de la richesse, qualité des collatéraux existants, risque des actifs. L’influence des taux d’intérêt se trouve amplifiée par l’évolution des bilans.

D’autres facteurs vont également influencer la transmission des effets des instruments de la politique monétaire sur les comportements d’épargne. En premier lieu, on trouve les effets richesse. C’est le cas par exemple avec le marché de l’immobilier. Les taux bas ont facilité l’accès des ménages au crédit ce qui a engendré une hausse des prix immobiliers. Cette hausse des prix de l’immobilier a permis d’améliorer l’octroi de crédit, notamment par le canal des prêts hypothécaires, et donc le financement d’activité productive. Cependant, la hausse des prix d’actifs peut également déstabiliser l’ensemble du système financier (voir Fiche 11). En second lieu, en période de taux bas et de hausse des prix d’actifs, la valeur des prix d’actifs devient sensiblement plus élevée que celle de la dette. Il s’agit d’un deuxième effet d’augmentation de la valeur des collatéraux qui réduit les risques et donc facilite l’accès au crédit. Enfin, sur les marchés financiers, les taux bas stimulent les placements en actions comparativement aux produits de taux. La valeur de marché des entreprises relativement à leur coût de remplacement augmente. Ce ratio, aussi appelé Q de Tobin, augmente ce qui stimule l’investissement et donc favorise l’utilisation de l’épargne vers un usage productif.

En conclusion, l’ensemble des mécanismes décrits ci-dessus montre que l’allocation de l’épargne à l’utilisation productive dépend de l’adéquation de deux logiques antagoniques :

celle des acteurs économiques qui cherchent soit des sources de financement soit des rendements financiers ;

celle des autorités de régulation comme les Banques centrales qui poursuivent des objectifs de régulation et de stabilisation économique (voir Fiche 10).

Lorsque les objectifs des différents acteurs ne sont pas suffisamment alignés, des crises économiques peuvent apparaître (voir Fiche 11).

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