Dernière mise à jour : juin 2015

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L’ordonnance du 23 septembre 2015 procède à une nouvelle rédaction des dispositions législatives du livre 1er du Code de l’urbanisme. Consultez sur Légifrance la table de concordance permettant de faire le lien entre l’ancienne numérotation des articles (utilisée dans cette fiche) et la nouvelle numérotation en vigueur depuis le 1er janvier 2016.

La n°86-2 du 3 janvier 1986 relative à l’aménagement, la protection et la mise en valeur du littoral, dite Loi « Littoral », a pour ambition de protéger et mettre en valeur les espaces littoraux, pris au sens large. L’objectif est ainsi de parvenir à un équilibre entre le développement des activités économiques, la maitrise de l’urbanisation, la protection des équilibres biologiques, ainsi que la préservation des sites et paysages situés à la proximité de l’eau.

En Droit de l’urbanisme, cette loi a donc une influence importance, car des modalités particulières de protection des espaces sont à respecter dans les zones concernées.

Plusieurs points sont à aborder en ce qui concerne la Loi Littoral : son champ d’application (I), ses objectifs (II), les conditions de l’urbanisation (III), les règles propres aux espaces protégés (IV), ainsi que la présentation d’autres règles spécifiques (V). Ses modalités d’application peuvent être complétées par une directive territoriale d’aménagement (VI).

1. Champ d’application de la Loi Littoral

Le littoral est une entité géographique qui appelle une politique spécifique d'aménagement, de protection et de mise en valeur. Cette définition téléologique montre bien que ce qui importe est la protection de zones sensibles situées proches de l’eau.

Ainsi, la loi « Littoral » s’applique aux communes riveraines des mers, océans, des étangs salés et des plans d’eau intérieurs de plus de mille hectares, ainsi qu’aux communes riveraines des estuaires et deltas dont la liste est fixée à l’article R. 321-1 du Code de l’environnement.

Ces dispositions visent donc de nombreuses situations, ce qui fait que plus de 1 200 communes françaises sont concernées par l’application de la Loi Littoral.

Référence : article L. 321-1 du code de l'environnement

2. Les objectifs de la Loi Littoral

Le premier objectif de la Loi Littoral est la mise en œuvre d’un effort de recherche et d’innovation portant sur les particularités et les ressources du littoral.

Le second vise la protection des équilibres biologiques et écologiques, la lutte contre l’érosion, la préservation des sites et paysages et du patrimoine

La Loi Littoral doit également permettre la préservation et le développement des activités économiques liées à la proximité de l’eau, telles que : la pêche, les cultures marines, les activités portuaires, la construction et la réparation navales et les transports maritimes

Enfin, le maintien ou le développement, dans la zone littorale des activités agricoles ou sylvicoles, de l’industrie, de l’artisanat et du tourisme est un autre objectif.

Ces objectifs impliquent de nombreuses mesures concernant la protection et l’aménagement du littoral et des plans d’eau intérieurs, que doivent mettre en œuvre les documents locaux d’urbanisme.

Référence : L. 321-1 du Code de l’environnement

3. Les conditions de l’urbanisation en zone Littoral

Pour déterminer la capacité d'accueil des espaces urbanisés ou à urbaniser, les documents d'urbanisme doivent tenir compte de la préservation des espaces et milieux fragiles, de la protection des espaces nécessaires au maintien ou au développement des activités agricoles, pastorales, forestières et maritimes ainsi que des conditions de fréquentation par le public des espaces naturels et littoraux.

Néanmoins, dans les espaces urbanisés, ces dispositions n’empêchent pas la réalisation d’opérations de rénovation des quartiers ou de réhabilitation de l'habitat existant, ainsi que l'amélioration, l'extension ou la reconstruction des constructions existantes. Les modalités d’extension de l’urbanisation, admissibles selon les caractéristiques et la localisation des espaces concernés, sont précisées par l’article L 146-4.

Plusieurs zones sont à distinguer, chacune connaissant un régime spécifique : l’extension de l’urbanisation en continuité avec les agglomérations et villages existants (3.1), l’extension limitée dans les espaces proches du rivage ou des rives des plans d’eau intérieurs (3.2), l’interdiction de construction dans la bande littorale des cent mètres en dehors des espaces urbanisés (3.3).

Référence : L. 146-2 du Code de l’urbanisme

3.1 L’extension de l’urbanisation en continuité

L’extension de l’urbanisation doit se réaliser soit en continuité avec les agglomérations et villages existants, soit en hameaux nouveaux intégrés à l’environnement.

En prévoyant que l’urbanisation doit être réalisée en continuité des agglomérations et villages existants, ou sous forme de hameaux nouveaux, la loi interdit à la fois les constructions isolées et la création en site vierge d’agglomérations nouvelles importantes.

Afin de permettre le maintien ou le développement de l’activité agricole proche des rivages, deux exceptions sont prévues au principe de continuité de l’urbanisation.

La première concerne la possibilité de réaliser des travaux de mise aux normes des exploitations agricoles, à condition que les effluents d’origine animale ne soient pas accrus.

La seconde vise la possibilité d’autoriser, en dehors des espaces proches du rivage, les constructions ou installations liées aux activités agricoles ou forestières incompatibles avec le voisinage des zones habitées. L’autorisation nécessite alors l’accord du préfet, après avis de la commission départementale compétente en matière de nature, de paysage et de sites.

Référence : L. 146-4 I du Code de l’urbanisme

3.2 L’urbanisation limitée dans les zones proches du rivage

Dans les « espaces proches », l’extension de l’urbanisation doit être limitée et motivée dans le PLU, compte tenu de la configuration des lieux ou de la nécessité d’accueillir des activités économiques nécessitant la proximité immédiate de l’eau.

La délimitation des espaces proches du rivage ou des rives des plans d'eau intérieurs est appréciée localement, en fonction d’un faisceau d’indices, il ne faut donc pas se fonder sur un critère unique tel que la distance. De plus, le caractère limité de cette extension est apprécié au regard des conditions générales de l’urbanisation de la commune, de l’implantation, de l’importance, de la densité et de la destination des constructions envisagées, ainsi que l’a jugé le Conseil d’Etat dans une décision Société les Hauts de Saint-Antoine, rendue le 5 avril 2006.

Cette justification par le recours à des critères n’est pas nécessaire si l’urbanisation projetée est conforme aux dispositions d’un Schéma de Cohérence Territoriale (SCOT) ou d’un Schéma d’Aménagement Régional ou compatible avec un Schéma de Mise en Valeur de la Mer.

En revanche, si l’extension n’est pas prévue par un schéma, ni justifiée spécialement dans le PLU, les extensions d’urbanisation ne peuvent être réalisées qu’après délibération spécifique du conseil municipal, avec l’accord du préfet, après avis de la commission départementale compétente en matière de nature, de paysages et de sites.

Ces dispositions visent à protéger les espaces littoraux demeurés naturels ou agricoles, à éviter la densification excessive des zones urbaines proches de la mer ou du plan d’eau, en privilégiant l’urbanisation en profondeur.

Du point de vue de la procédure, il faut noter que l’extension de l’urbanisation peut concerner l’agrandissement de la tache urbaine comme la densification d’espaces déjà urbanisés. A l’intérieur des parties actuellement urbanisées d’une commune, le fait d’édifier des constructions est apprécié généralement comme une évolution de l’urbanisation et non comme une extension.

Or, l’autorisation du préfet n’est nécessaire que s’il s’agit bien d’une extension, selon une décision Société Soleil d’or et commune de Menton, rendue le 7 février 2005 par le Conseil d’Etat.

Référence : L. 146-4 II du Code de l’urbanisme

3.3 La protection de la bande littorale

L’objectif de cette protection est de réduire les nuisances ou dégradations liées à la présence de ces équipements ou constructions, et d'améliorer les conditions d'accès au domaine public maritime, tout en conciliant les objectifs de préservation de l’environnement et d’organisation de la fréquentation touristique.

Dans une bande de cent mètres comptée horizontalement à partir de la limite haute du rivage ou des plus hautes eaux pour les plans d’eau intérieurs, les constructions sont interdites en dehors des espaces urbanisés. Le caractère urbanisé ou non de ces espaces est apprécié en fonction de la situation physique et non par référence au classement dans le document d’urbanisme. Le plan local d'urbanisme peut porter la largeur de la bande littorale visée au premier alinéa du présent paragraphe à plus de cent mètres, lorsque des motifs liés à la sensibilité des milieux ou à l'érosion des côtes le justifient.

Il existe deux exceptions à cette interdiction, des constructions ou installations nécessaires à des services publics ou à des activités économiques exigeant la proximité immédiate de l'eau pouvant tout d’abord être autorisées.

A ce titre, des sanitaires peuvent par exemple être installés l’été sur les plages, selon la décision Assocation de défense des propriétaires longevillais, rendue 17 juin 1998 par le Conseil d’Etat.

L’autre exception concerne, en littoral maritime, les communes ou Etablissements Publics de Coopération Intercommunale (EPCI) qui peuvent établir un schéma d’aménagement des plages, prévoyant à titre dérogatoire, d’autoriser le maintien ou la reconstruction d'une partie des équipements ou constructions existant dans la bande des cent mètres avant l’entrée en vigueur de la Loi Littoral.

Référence : L. 146-4 III et L. 146-6-1 du Code de l’urbanisme

4. Les espaces protégés par la Loi Littoral

Deux catégories d’espaces protégés sont à distinguer : les espaces, sites et paysages remarquables ou caractéristiques du littoral et les milieux nécessaires au maintien des équilibres biologiques (4.1), les parcs et ensembles boisés les plus significatifs (4.2).

4.1. Les espaces, sites et paysages remarquables ou caractéristiques du littoral et les milieux nécessaires au maintien des équilibres biologiques

Les documents et décisions relatifs à la vocation des zones ou à l'occupation et à l'utilisation des sols préservent les espaces terrestres et marins, sites et paysages remarquables ou caractéristiques du patrimoine naturel et culturel du littoral, et les milieux nécessaires au maintien des équilibres biologiques. Il s’agit en particulier des dunes, plages, ilots inhabités, marais, gisements de minéraux ou de fossiles, récifs coralliens.

Des aménagements légers peuvent toutefois y être implantés lorsqu’ils sont nécessaires à la gestion, à la mise en valeur ou à l’ouverture au public, sous réserve de ne pas dénaturer le caractère des sites. Ces projets d'aménagement sont soumis, préalablement à leur autorisation, selon leur importance et leur incidence sur l'environnement, soit à l'enquête publique prévue au chapitre III du titre II du livre Ier du code de l'environnement lorsqu'ils entrent dans le champ d'application de cette enquête, soit à une mise à disposition du public pendant une durée d'au moins quinze jours, dans des conditions permettant à celui-ci de formuler ses observations.

Afin de concilier la protection des espaces remarquables et le maintien des activités économiques traditionnelles liées au site, les documents d’urbanisme doivent préciser la nature des activités et catégories d’équipements nécessaires à leur gestion ou à leur mise en valeur notamment économique.

Depuis 2013, peuvent également être autorisées les canalisations du réseau public de transport ou de distribution d'électricité visant à promouvoir l'utilisation des énergies renouvelables. Leur réalisation est soumise à enquête publique.

Références : articles L 146-6, L 146-6-1 et R 146-1 à R 146-4 du Code de l’urbanisme

4.2. Les parcs et ensembles boisés les plus significatifs

Les PLU doivent classer en espaces boisés, au titre de l'article L. 130-1 du code de l’urbanisme, les parcs et ensembles boisés existants les plus significatifs de la commune ou du groupement de communes, après consultation de la commission départementale compétente en matière de nature, de paysages et de sites.

Sont pris en compte la qualité du boisement, sa superficie, son importance dans le paysage.

Référence : article L 146-6 dernier alinéa du Code de l’urbanisme

5. Les règles spécifiques de la Loi Littoral

La loi Littoral comporte d’autres dispositions spécifiques : elles ont trait au libre accès au rivage (5.1), à l’aménagement des plages et des espaces naturels de bord de mer (5.2), à la création de nouvelles routes (5.3), à l’aménagement de terrains de camping ou au stationnement de caravanes (5.4).

5.1. Le libre accès au rivage

Les opérations d'aménagement admises à proximité du rivage organisent ou préservent le libre accès du public à celui-ci. Le libre accès au rivage concerne la mer uniquement. Celui-ci est préservé par deux servitudes.

La première est longitudinale, elle grève les propriétés riveraines d’une bande de trois mètres réservée au passage des piétons. Elle peut être adaptée en fonction des situations locales. Des motifs de sécurité peuvent ainsi justifier un déplacement de la servitude, par exemple selon une décision Association Levante, rendue par la Cour administrative d’appel de Marseille le 3 mars 2011.

La seconde est transversale, elle a pour but de relier la voirie publique au rivage de la mer ou aux sentiers d'accès immédiat à celui-ci, en l'absence de voie publique située à moins de cinq cent mètres et permettant l'accès au rivage. Cette servitude est, dans certains cas, susceptible d’indemnisation, s’il en résulte pour le propriétaire un dommage direct, matériel et certain.

Pour ce qui concerne les cours d’eau et lacs domaniaux, seule existe une servitude, dite de marchepied, établie par la loi n° 64-1245 du 16 décembre 1964 relative au régime et à la répartition des eaux ainsi qu’à la lutte contre leur pollution. Ainsi, les propriétaires riverains ne peuvent planter d'arbres ni se clore qu'à une distance de 3,25 mètres à partir de la limite des plus hautes eaux. Cette servitude est à l'usage du gestionnaire du lac et des pêcheurs. La loi n° 2006-1772 du 30 décembre 2006 sur l'eau et les milieux aquatiques a étendu aux piétons le bénéfice de la servitude de marchepied.

Références : articles L 146-3, L 160-6, R 160-8 et R 160-9 du code de l’urbanisme, article L. 2131-2 du code général de la propriété des personnes publiques

5.2. L’aménagement des plages et des espaces naturels de bord de mer

Les communes littorales de la mer ou les EPCI compétents peuvent établir un schéma d’aménagement visant à réduire, sur une plage et les espaces naturels proches, les nuisances ou les dégradations liées à la présence d’équipements ou de constructions réalisés avant l’entrée en vigueur de la loi littoral.

Ce schéma d’aménagement comporte, pour le territoire qu’il délimite, une analyse de l’état initial du site, portant notamment sur les paysages, les milieux naturels, les conditions d’accès au domaine public maritime et sur les équipements ou constructions antérieurs à l’entrée en vigueur de la loi littoral. Il définit les conditions d’aménagement des plages et des espaces naturels proches, ainsi que les modalités d’accès et de stationnement des véhicules. Il fixe les mesures permettant d’améliorer l’accès au domaine public maritime, de réduire les dégradations constatées et d’atténuer les nuisances. Il justifie les partis d’aménagement retenus et évalue leurs incidences au regard des objectifs de réduction des nuisances et dégradations. Il indique également dans la bande littorale les équipements ou constructions dont le maintien ou la reconstruction peuvent être autorisés.

Il est approuvé par décret en Conseil d’Etat et annexé au PLU s’il existe.

Références : articles L146-6-1 et R 146-3 du Code de l’urbanisme

5.3. La création de nouvelles routes

Trois dispositions limitent la possibilité de réaliser des routes proches du littoral.

Tout d’abord, les routes nouvelles de transit doivent être localisées à plus de 2 000 mètres du rivage des mers, océans et étangs salés. Cette disposition ne s’applique pas aux rives des plans d’eau intérieurs.

Ensuite, la création de nouvelles routes sur les plages, dunes ou en corniche sont interdites.

Enfin, les routes de desserte locale ne peuvent être établies sur le rivage ni le longer.

En cas de contrainte liée à la configuration des lieux ou à l’insularité, une dérogation peut être accordée après avis de la Commission départementale compétente en matière de nature, de paysages et de sites. Cette dérogation ne vise que les deux dernières limitations.

En outre, l’aménagement de routes dans la bande des cent mètres à partir du littoral est possible dans les espaces urbanisés ou lorsqu’elles sont nécessaires à des services publics ou à des activités économiques nécessitant la proximité immédiate de l’eau. Il en va de même si la réalisation de la nouvelle route répond à des besoins de sécurité civile ou militaire.

Références : article L 146-7 et L. 146-8 du Code de l’urbanisme

5.4. Les terrains de camping ou de stationnement de caravanes

L'aménagement et l'ouverture de terrains de camping ou de stationnement de caravanes en dehors des espaces urbanisés sont subordonnés à la délimitation de secteurs prévus à cet effet par le Plan Local d'Urbanisme.

Ils doivent respecter les dispositions relatives à l'extension de l'urbanisation et ne peuvent être installés dans la bande littorale de cent mètres.

Référence : article L 146-5 du Code de l’urbanisme

6. Les directives territoriales d’aménagement

Les directives territoriales d'aménagement peuvent permettre de préciser les modalités d’application de la loi Littoral.

Elles sont applicables à toute personne publique ou privée pour l'exécution de tous travaux, constructions, défrichements, plantations, installations et travaux divers, la création de lotissements et l'ouverture de terrains de camping ou de stationnement de caravanes, l'établissement de clôtures, pour l'ouverture de carrières, la recherche et l'exploitation de minerais. Elles sont également applicables aux installations classées pour la protection de l'environnement.

La conformité d’un projet de construction doit alors s’apprécier au regard de ces prescriptions. Le Conseil d’Etat a cependant précisé qu’il fallait s’assurer que les dispositions de la directive étaient suffisamment précises et compatibles avec les articles L. 146-1 et suivants du Code de l’urbanisme (CE, 16 juillet 2010, Société les Casuccie).

Référence : article L. 146-1 du Code de l’urbanisme

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