Par André Lafarie
Dernière mise à jour : décembre 2018

1. Grands principes et procédures

1.1. Définition et grands principes de la commande publique

1.1.1. Définition et champ d’intervention de la commande publique

La commande publique est un terme générique relatif à l'ensemble des contrats passés par les acheteurs publics ou privés pour satisfaire leurs besoins.

Une commande publique est donc un contrat passé par un « acheteur », c'est-à-dire :

  • un pouvoir adjudicateur (personne morale de droit public, personne morale de droit privé poursuivant une mission d'intérêt général et financée principalement sur fonds publics…),
  • une entité adjudicatrice (pouvoir adjudicateur exerçant une des activités d'opérateur de réseaux, entreprise publique qui exerce une activité d'opérateur de réseaux, organisme de droit privé qui n'est ni pouvoir adjudicateur ni entreprise publique lorsqu'il bénéficie de droits spéciaux ou exclusifs ayant pour effet de lui réserver l'exercice d'une des activités d'opérateur de réseau).

La commande publique recouvre ainsi une notion très large englobant plusieurs formes telles que les marchés publics,  les marchés soumis à l'ordonnance n° 2005-649 du 6 juin 2005 relative aux marchés passés par certaines personnes publiques ou privées non soumises au code des marchés publics, les délégations de service public, les contrats de partenariat...

L'article 38 de la loi "Sapin 2" (loi n° 2016-1691 du 9 décembre 2016) prévoit l'adoption d'un code de la commande publique. Ce code regroupe et organise les règles relatives aux différents contrats de la commande publique qui s’analysent, au sens du droit de l’Union européenne, comme des marchés publics et des contrats de concession.

Les marchés publics relèvent de l'ordonnance n° 2015-899 du 23 juillet 2015 relatives aux marchés publics et les contrats de concession relèvent de l'ordonnance n° 2016-65 du 29 janvier 2016 relative aux contrats de concession.

1.1.2. Les grands principes communs

  • Les principes fondamentaux :

Indépendamment de l'activité concernée, une commande publique doit obligatoirement respecter 3 principes fondamentaux :

  • Le principe de liberté d'accès :

Selon ce principe, toutes les entreprises privées, quels que soient leur taille ou leur statut juridique, peuvent participer à la procédure de consultation et obtenir, à cette fin, un égal accès aux documents décrivant la nature et les modalités de mise en œuvre de la commande.

  • Le principe d'égalité de traitement

Toutes les sociétés candidates à une commande publique doivent être traitées de la même façon, équitablement. Elles doivent toutes recevoir la même documentation, être soumises aux mêmes délais, faire l'objet du même examen de leur proposition. La sanction du non-respect de ce principe est le délit de favoritisme qui est pénalement sanctionné. C’est aussi un motif de contestation, par un candidat évincé, du refus d'attribution d'un marché public.

  • Le principe de transparence des procédures

Un acheteur public doit rendre publiques toutes ses procédures de consultation et d'attribution du marché public. Ce principe permet de limiter les conflits d'intérêts.

  • L’obligation de dématérialisation :

Adopté en décembre 2017, le plan de Transformation Numérique de la Commande Publique a pour objectif la dématérialisation complète de la commande publique en 2022.

Cette dématérialisation concerne la passation des marchés publics, l'encadrement de la signature électronique et l'accès du public aux données essentielles des marchés.

Depuis le 1er octobre 2018, pour les marchés dont le montant est supérieur ou égal à 25 000 € HT, les acheteurs doivent :

  • dématérialiser la procédure de passation de leurs marchés publics : publication des avis, mise en ligne des documents de la consultation (cahier des charges…), réception des candidatures/offres, réponse aux demandes des entreprises et des acheteurs, négociations et notification des décisions (courrier de rejet, attribution, notification, etc…) ;
  • publier les données essentielles du contrat sur leur « profil d'acheteur » (plateforme dématérialisée) dans les 2 mois qui suivent la notification du marché ;
  • disposer d'une signature électronique pour l'attribution du marché.

Concernant la facturation, l'ordonnance 2014-697 du 26 juin 2014 impose à l'État, aux collectivités territoriales et à leurs établissements publics respectifs de recevoir les factures électroniques depuis le 1er janvier 2017. L'obligation de facturation par voie électronique concerne :

•      les grandes entreprises et les personnes publiques au 1er janvier 2017 ;

•      les entreprises de taille intermédiaire au 1er janvier 2018 ;

•      les petites et moyennes entreprises au 1er janvier 2019 ;

•      les très petites entreprises au 1er janvier 2020.

1.2. Les procédures applicables à la commande publique

Les parties législative et réglementaire du code de la commande publique ont été publiées le 5 décembre 2018 au Journal officiel de la République française.

Le code de la commande publique regroupe l’ensemble des règles applicables aux contrats de la commande publique. Il intègre notamment les dispositions relatives à la maîtrise d’ouvrage publique et à ses rapports avec la maîtrise d’œuvre privée, à la sous-traitance et aux délais de paiement. Il entrera en vigueur le 1er avril 2019 afin de laisser le temps aux acteurs, acheteurs, autorités concédantes et entreprises, de s’approprier ce nouvel outil.

1.2.1. Les marchés publics

Les différents types de prestations

La législation prévoit 3 types de besoins :

  • les travaux,
  • les fournitures (achat, location...),
  • les services.

Les différentes formes de marchés

En fonction de l’importance du besoin, de son rythme, de sa fréquence, le pouvoir adjudicateur peut utiliser différentes techniques d’achat, qui prendront principalement la forme de :

  • marchés ordinaires dès lors que les éléments déterminants du marché (prix, durée, caractéristiques techniques) sont connus dès le lancement de la consultation,
  • marchés fractionnés lorsque les besoins sont plus difficilement programmables, ce qui peut amener à recourir à :
  • un marché à tranches optionnelles (qui seront actionnées ou pas en fonction des besoins),
  • un accord-cadre (mono-attributaire ou pluri-attributaire) soit à bons de commande (le besoin est récurrent et précisément défini, mais il existe une incertitude sur l’importance et/ou le rythme d’exécution du marché), soit à marchés subséquents (pour un besoin récurrent mais évolutif, les opérateurs désignés dans l’accord-cadre étant, par le biais des marchés subséquents, sollicités pour répondre, selon un formalisme allégé, à une nouvelle consultation affinant les caractéristiques exactes de la commande).

Les différentes procédures de mise en concurrence

La procédure change aussi en fonction du type de besoins (voir ci-dessus) et de la valeur estimée du marché : si la valeur estimée du marché est inférieure aux seuils de procédure formalisée (selon les modalités fixées par le Code de la commande publique), l'acheteur peut recourir à un marché à procédure adaptée (MAPA) dont il détermine librement les conditions.

Pour les marchés d'une valeur inférieure à 25 000 € HT, l'acheteur a pour seules obligations de choisir une offre pertinente, de faire une bonne utilisation des deniers publics et de ne pas contracter systématiquement avec un même fournisseur lorsqu'il y a plusieurs offres susceptibles de répondre à son besoin.

Les différents seuils déterminant les modalités de publicité et le choix des procédures de marchés sont explicités dans le tableau en annexe.

1.2.2. Les contrats de concession

Un contrat de concession est un contrat par lequel une ou plusieurs autorités concédantes confient l’exécution de travaux ou la gestion de services à un ou plusieurs opérateurs économiques. Le titulaire du contrat obtient alors le droit d’exploiter l’ouvrage ou le service objet du contrat, et assume la responsabilité quant aux risques liés à cette exploitation. 

On distingue deux types de contrats de concession : 

  • les concessions de travaux,
  • les délégations de services publics (DSP). 

C’est l’ordonnance n° 2016-65 du 29 janvier 2016 et son décret d’application n° 2016-86 du 1e février 2016 qui posent les règles applicables aux contrats de concession. Elle remplace tous les textes qui s’appliquaient à ces contrats avant 2016 et rassemble donc dans son spectre d’application tous les contrats constituant des concessions au sens du droit de l’Union Européenne (y compris, par exemple les concessions d’aménagement).

Plus de précisions : https://www.economie.gouv.fr/daj/FT-modalites-mise-concurrence-contrats-concession-2016

2. Les enjeux de la commande publique

2.1. Une stratégie d’achat public efficace et innovante

2.1.1. Une réponse efficiente aux besoins

L’évaluation préalable des besoins est juridiquement une obligation : la nature et l'étendue des besoins à satisfaire sont déterminées avec précision avant le lancement de la consultation en prenant en compte des objectifs de développement durable dans leurs dimensions économique, sociale et environnementale.

Conformément, l’acheteur doit définir ses besoins en recourant à des spécifications précises qui sont des prescriptions techniques décrivant les caractéristiques d’un produit, d’un ouvrage ou d’un service. Les spécifications techniques doivent cependant être rédigées de manière la plus précise, claire et objective pour ne pas restreindre la concurrence.

C’est aussi une nécessité pratique pour se donner les moyens de trouver le prestataire le plus adapté à ses attentes et pouvoir encadrer efficacement sa production dans le cadre de la mise en œuvre du marché.

Pour cela l’acheteur peut réaliser des consultations préalables au marché, également désignées sous le terme de « sourcing » : pour préparer la passation d’un marché public, l’acheteur peut réaliser des consultations ou études de marché, solliciter des avis ou informer les opérateurs économiques de son projet et de ses exigences. Ce type de démarche peut être une piste intéressante pour mieux définir le besoin, s’assurer que celui-ci est en phase avec le marché actuel et favoriser une concurrence accrue pour éviter les procédures infructueuses.

2.1.2. Les achats innovants et durables

  • Des pistes nouvelles pour l’innovation :

La commande publique est un formidable levier pour la croissance des entreprises innovantes. L’achat public représente 60 milliards d’euros par an pour l’État et ses opérateurs et 20 milliards d’euros pour les collectivités territoriales. En novembre 2012, le Pacte national pour la compétitivité, la croissance et l’emploi proposait de mobiliser l’achat public pour accompagner le développement des PME de croissance innovantes (par exemple via des solutions technologiques permettant de relever les défis énergétiques à venir).

Le décret n° 2018-1225 du 24 décembre 2018 portant diverses mesures relatives aux contrats de la commande publique a été publié le 26 décembre 2018 au Journal officiel de la République française.

Afin de soutenir l’innovation dans la commande publique, ce décret crée une expérimentation de trois ans permettant aux acheteurs de passer des marchés négociés pour leurs achats innovants d’un montant inférieur à 100 000 €.

  • La prise en compte du développement durable

Les clauses environnementales font partie des critères qui peuvent être décisifs dans l’attribution de la commande publique. Elles se réfèrent au respect de l’environnement et peuvent être introduites dans la phase de préparation, de passation ou d’exécution du marché. Il s’agit donc clairement d’un vecteur de développement durable sur lequel les pouvoirs publics peuvent s’appuyer.

Les acheteurs disposent, en outre, d’une possibilité accrue de réserver des marchés pour favoriser l’insertion sociale :

  • à des entreprises adaptées, établissements d’aide par le travail, et structures équivalentes qui emploient une proportion minimale de travailleurs handicapés,
  • à des structures d’insertion par l’activité économique qui emploient une proportion minimale de travailleurs défavorisés,
  • à des entreprises de l’économie sociale et solidaire.

2.2. Un usage maîtrisé des partenariats

2.2.1. Une nouvelle approche des marchés de partenariat :

L’ordonnance n°2015-899 du 23 juillet 2015 visait à sécuriser le recours au marché de partenariat, par la voie d’une clarification des conditions qui permettent aux personnes publiques de solliciter ce « contrat d’exception » pour :

  • limiter le recours à un outil contractuel dont les effets sur les PME étaient considérés comme discutables,
  • assurer une utilisation plus sereine et plus simple du dispositif.

Dans cette optique, l’ordonnance consacre le marché de partenariat comme une catégorie spécifique de marché public (donc avec les mêmes règles procédurales que les marchés « classiques ») qui « permet de confier à un opérateur économique ou à un groupement d’opérateurs économiques une mission globale » sous maîtrise d’ouvrage privée.

Cette mission globale comprend :

  • des missions principales obligatoires : tout ou partie du financement, ainsi que la construction, la transformation, la rénovation, le démantèlement, la destruction d’ouvrages ou d’équipements immatériels, nécessaires au service public ou à une mission d’intérêt général,
  • des missions complémentaires facultatives (entretien, maintenance…).

A titre accessoire, l’ordonnance consacre la possibilité de déléguer la gestion d’une mission de service public ou des prestations de services concourant à l’exercice d’une mission de service public.

En tant que contrat à paiement public différé, le marché de partenariat implique un financement principalement privé pour l’ensemble des opérations à réaliser. Mais l’ordonnance prévoit une possibilité de financement public qui peut émaner de l’acheteur public et d’autres personnes publiques (par exemple par participation minoritaire de la personne publique au capital de la société titulaire, spécialement constituée pour la réalisation du projet ou encore par des versements à titre d’avances et d’acomptes).

Le titulaire est rémunéré à compter de l’achèvement des travaux. Mais l’ordonnance ouvre la possibilité de procéder à des versements anticipés, dès la phase de construction. La rémunération est obligatoirement liée à des objectifs de performance qui lui sont assignés.

2.2.2. De nouvelles modalités de recours

  • La justification de la pertinence de l’outil

Les conditions de complexité du projet et d’urgence, qui constituaient précédemment des motifs légaux de recours mais qui avaient débouché sur des usages excessifs voire inefficaces, sont supprimées.

L’acheteur doit aujourd’hui démontrer que le recours à un tel contrat présente un bilan plus favorable que celui des autres modes de réalisation du projet, ceci sur la base d’une évaluation préalable (c’est-à-dire avant le lancement de la procédure de passation) du mode de réalisation du projet et d’une étude de soutenabilité budgétaire. Un avis motivé doit être rendu par la DRFIP ou DDFIP.

Le bilan fait l’objet d’une appréciation globale et tient compte notamment de critères relatifs au transfert de la maîtrise d’ouvrage, aux contours des missions confiées au titulaire, au partage des risques avec le titulaire du contrat et au coût du projet.

L’ordonnance précise que « la procédure de passation d’un marché de partenariat ne peut être engagée que si l’acheteur démontre que, compte tenu des caractéristiques du projet envisagé, des exigences de service public ou de la mission d’intérêt général dont l’acheteur est chargé, ou des insuffisances et difficultés observées dans la réalisation de projets comparables, le recours à un tel contrat présente un bilan plus favorable, notamment sur le plan financier, que celui des autres modes de réalisation du projet ».

  • Des conditions de recours

L’ordonnance introduit un seuil minimal de recours au marché de partenariat :

  • 2 M€ HT pour les biens immatériels ou équipements autres que des ouvrages ou lorsque le contrat comporte des objectifs chiffrés de performance énergétique et prévoit que la rémunération du titulaire tient compte de l’atteinte de ces objectifs,
  • 5 M€ HT pour les ouvrages d’infrastructure de réseau, notamment dans le domaine de l’énergie, des transports, de l’aménagement urbain et de l’assainissement et pour les bâtiments sans mission liée à la maintenance, à l’exploitation ou à la gestion d’un service public.
  • 10 M€ HT pour les autres ouvrages.

Annexe : seuils 2018 applicables aux marchés publics

Seuils de publicité des marchés des collectivités territoriales, de leurs établissements et de leurs groupements ainsi que des autres acheteurs (sauf l'État) - Montants hors taxe
 Publicité non obligatoirePublicité libre ou adaptéePublicité au BOAMP ou dans un JALPublicité au BOAMP et au JOUE
Fournitures et servicesen dessous de 25 000 €de 25 000 € et jusqu'à 89 999,99 €de 90 000 € à 220 999,99 €à partir de 221 000 €
Travauxen dessous de 25 000 €de 25 000 € et jusqu'à 89 999,99 €de 90 000 € à 5 547 999,99 €à partir de 5 548 000 €
 Publicité non obligatoirePublicité libre ou adaptéePublicité au JOUE
Services sociaux et spécifiques en dessous de 25 000 €de 25 000 € à 749 999,99 €à partir de 750 000 €
Seuils de procédure formalisée - Montants hors taxe
 Seuils de procédure formalisée
Fournitures et services
  • à partir de 144 000 € pour l'État et ses établissements publics
  • à partir de 221 000 € pour les collectivités et les établissements publics de santé
  • à partir de 443 000 € pour un acheteur public qui exerce une activité d'opérateur de réseaux (production, transport ou distribution d'électricité, gaz, eau, etc.)
Travauxà partir de 5 548 000 €

Source : https://www.boamp.fr

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