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Les concours de la FPT

Dernière mise à jour : septembre 2019

Une juridiction est un organe crée par la Constitution ou par la loi qui a pour but de trancher des litiges en droit et dont la décision a une autorité qui s'impose aux parties au litige. En France, il y a dualité de juridiction. Cela consiste en l’existence de deux juridictions séparées : l’ordre administratif et l’ordre judiciaire, ayant à leur tête respectivement le Conseil d’État et la Cour de Cassation. L’existence de ces deux ordres de juridiction distincts est en France le produit de l’histoire, fruit de la volonté d’empêcher le juge judiciaire de s’immiscer dans les questions de l’administration. Il ne faut pas confondre dualité de juridiction et double degrés de juridictions. Ce dernier principe du fonctionnement de la justice garantit que toute affaire puisse être jugée deux fois tant sur les faits que sur le droit. Toute décision rendue en premier ressort (juridiction de première instance : tribunal de grande instance, conseil des prud'hommes...) peut être contestée par l'exercice d'une voie de recours (l'appel) devant une cour d'appel. Ce principe est exclu pour les décisions rendues en premier et dernier ressort (litiges de faible importance, infractions mineures). Dans ce cas, seul le pourvoi en cassation est possible.

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*Depuis le 1er janvier 2019, le contentieux social, réparti actuellement entre les tribunaux des affaires de sécurité sociale (TASS), les tribunaux du contentieux de l'incapacité (TCI) et les commissions départementales d'aide sociale (CDAS), est fusionné et transféré aux tribunaux de grande instance. Les tribunaux des affaires de sécurité sociale sont donc supprimés.

**Le juge de proximité n'existe plus depuis le 1er juillet 2017. Les litiges de moins de 4 000 € relèvent désormais tous de la compétence du tribunal d'instance. Toutefois, le projet de loi de programmation 2018-2022 pour la justice (qui devrait être définitivement adopté fin janvier 2019) prévoit la fusion du tribunal d’instance et du tribunal de grande instance (TGI). Les juges de proximité ont été remplacés par les magistrats exerçant à titre temporaire. Ce sont des juges issus de la société civile, qui exercent parallèlement à leur fonction judiciaire une activité professionnelle compatible. Ils peuvent siéger comme juges au tribunal d'instance et au tribunal de police, ou comme assesseurs au tribunal de grande instance.

1. Les principales juridictions de l’ordre judiciaire

Au niveau de l’ordre judiciaire existent différentes juridictions (1.1.) ainsi que différents degrés de juridiction (1.2.). L’ensemble de ces juridictions fonctionnent grâce à des magistrats qui disposent d’un statut spécifique (1.3.).

1.1. Les différentes juridictions

Les juridictions de l’ordre judiciaire se divisent en deux catégories : les juridictions civiles et les juridictions pénales.

1.1.1. Les juridictions civiles

Les juridictions civiles sont compétentes pour régler les litiges opposant les personnes privées. Parmi les juridictions civiles, il convient de mentionner tout particulièrement :

  • le tribunal de grande instance. Le tribunal de grande instance est une juridiction de droit commun, chargée de juger les affaires civiles ordinaires. Le tribunal de grande instance est également seul compétent pour certaines affaires énumérées par la loi, quel que soit le montant : état civil, divorce, autorité parentale, adoption, succession ;
  • le tribunal de commerce. Le tribunal de commerce est une juridiction, composée de juges non professionnels élus par les commerçants parmi leurs pairs, chargée de trancher les conflits relatifs aux engagements et transactions entre négociants, marchands et banquiers et aux actes de commerce entre toutes personnes. Ils sont également compétents pour connaître des procédures concernant le règlement judiciaire et la liquidation des biens, la faillite personnelle, ainsi que des procédures tendant à faciliter le redressement économique et financier de certaines entreprises si le débiteur est commerçant.
  • Le conseil de prud’hommes. Le conseil de prud'hommes est une juridiction de premier degré, chargée de juger les litiges individuels nés d'un contrat de travail ou d'apprentissage, entre employeurs et employés ou apprentis : licenciement, litige sur les salaires, les congés... Le conseil de prud'hommes est composé de juges non professionnels élus, les conseillers prud'homaux, qui sont, en nombre égal, des employeurs et des salariés. En cas de partage des voix, il est fait appel à un magistrat professionnel lequel prend alors le titre de juge départiteur.

1.1.2. Les juridictions pénales

Les juridictions pénales ont pour objectif de sanctionner toute infraction à la loi. Elles fonctionnent selon une classification des infractions répartie en trois catégories et qui conditionne notamment, la compétence des juridictions pénales d’instruction et des juridictions pénales de jugement.

1.1.2.1. La classification des infractions

La loi répartit les infractions en trois catégories. Le critère de répartition est celui de la gravité de l'acte, qui se traduit par la peine encourue. Pour savoir à quelle catégorie appartient une infraction, il suffit de regarder quelle peine elle fait encourir. Selon l’article 111-1 du code pénal, les trois catégories d’infractions sont donc :

Les crimes

Il s’agit des infractions les plus graves. La catégorie des crimes recouvre des actes portant une atteinte tellement grave à l’ordre social qu’on ne peut les réparer que par une très longue privation de liberté, écartant ainsi la personne de la société. La peine de prison en matière de crime est appelée réclusion criminelle – ou détention criminelle pour les crimes politiques.

L’article 131-1 du code pénal définit l’échelle des peines criminelles comme suit :

  • la réclusion / détention criminelle de 15 ans : le viol (art. 222-23 CP),
  • la réclusion / détention criminelle de 20 ans : la séquestration (art. 224-1 CP),
  • la réclusion / détention criminelle de 30 ans : le meurtre (art. 221-1 CP),
  • la réclusion / détention à perpétuité : le génocide (art. 211-1 CP).

Si le principe est la privation de liberté, la peine d’amende peut être prévue pour certaines infractions. Le juge a également la possibilité de prononcer une des peines complémentaires de l’article 131-10 du code pénal (obligation de soins, privation d’un droit, confiscation de l’objet du crime …) ;

Les délits

Les délits constituent une catégorie intermédiaire. L’atteinte n’est pas d’une gravité exceptionnelle, mais suffisante pour que la privation de liberté soit encore de mise. Les délits sont punis d’une des deux peines principales prévues par l’article 131-3 du code pénal : l’emprisonnement et l’amende.

L’emprisonnement s’échelonne ainsi : 2 mois, 6 mois, 1 an, 2 ans, 3 ans, 5 ans, 7 ans, 10 ans.

L’amende sanctionnant un délit doit être supérieure à 3 750 € – si elle n’est pas accompagnée d’un sursis. L’une des peines principales d’un délit peut être remplacée, sous certaines conditions, par l’une des peines correctionnelles alternatives :

  • le jour-amende,
  • le stage de citoyenneté,
  • le travail d’intérêt général,
  • les peines privatives ou restrictives de droits de l’article 131-6 du code pénal : suspension de permis de conduire, confiscation de véhicule, retrait du permis de chasser…

Les peines complémentaires de l’article 131-10 du code pénal sont, tout comme pour les crimes, également envisageables ;

Les contraventions

Les contraventions sont les infractions les moins graves et aussi les plus fréquentes. La loi distingue les contraventions en cinq classes (art. 131-13 CP) :

  • 1ère classe : 38 € au plus : injures non-publiques (art. R.621-2 CP),
  • 2e classe : 150 € au plus : abandon d’ordures (art. R.632-1 CP),
  • 3e classe : 450 € au plus : menace de violence (art. R.623-1 CP),
  • 4e classe : 750 € au plus : mauvais traitement envers un animal (art. R 654-1 CP),
  • 5e classe : 1500 € au plus : destruction de bien n’ayant entraîné qu’un dommage léger (art. r. 635-8 CP).

Le juge peut également prononcer une ou plusieurs peines alternatives ou complémentaires qui lui sont proposées aux articles 131-14 et suivants du code pénal.

Cette classification des infractions est très importante. En effet, de cette classification découlent des règles particulières en matières de cumul des peines, de complicité, de fractionnement et de dispense de peines, de prescription, de sursis, de règle de preuve, de citation directe devant le tribunal, d’instruction préparatoire, de compétence des tribunaux, etc.

1.1.2.2. Les juridictions pénales d’instruction

L’instruction pénale, appelée aussi « information judiciaire » dans le code de procédure pénale, a pour objet d’enquêter sur des faits susceptibles d’être constitutifs d’un crime ou d’un délit. L’information judiciaire est décidée par le procureur de la République qui rédige pour cela un « réquisitoire introductif » ou par la victime d’une infraction par le biais d’une plainte avec constitution de partie civile. L’information judiciaire est obligatoire lorsque les faits sont de nature criminelle, et facultative lorsque les faits sont de nature délictuelle. Dans le cas des délits, l’information judiciaire est ouverte, si le ministère public le décide, lorsque les faits sont complexes et nécessitent des investigations poussées.

L’information judiciaire est confiée à un juge d’instruction, un magistrat du tribunal de grande instance. Il est chargé d’instruire le dossier à charge et à décharge, ce qui signifie que le code de procédure pénale lui fait obligation de rechercher à la fois des preuves d’innocence et de culpabilité des personnes soupçonnées d’avoir commis les faits ayant motivé l’ouverture de l’information judiciaire. À ce titre, il dirige alors l'action de la police judiciaire. Il peut décider de mettre une personne en examen et d'un contrôle judiciaire. Il rassemble les éléments qu'il juge utiles à la manifestation de la vérité, dirige les interrogatoires, confrontations et auditions. Au terme de son instruction, il peut décider :

  • de rendre une « ordonnance de non-lieu » s’il estime qu’aucune infraction n’a été commise par la ou les personnes mises en examen. L’affaire ne sera alors pas transmise à la juridiction de jugement et sera classée. Elle pourra éventuellement reprendre si de nouvelles informations sur les faits parviennent au juge d'instruction ;
  • de rendre une « ordonnance de renvoi » devant la juridiction de jugement s’il estime qu’une ou plusieurs infractions sont constituées. Selon la nature des faits, délictuelle ou criminelle, le dossier sera alors transmis à une juridiction de jugement différente.

Les décisions du juge d’instruction peuvent faire l’objet d’un recours devant la chambre de l’instruction. Il s’agit d’une juridiction rattachée à la cour d’appel, composée de trois magistrats.

1.1.2.3. Les juridictions pénales de jugement

Elles sont au nombre de trois :

  • le tribunal de police. Le tribunal de police est une juridiction statuant à juge unique, chargée de juger les contraventions. Le tribunal de police est la formation pénale du tribunal d'instance ;
  • le tribunal correctionnel. Le tribunal correctionnel est une formation du tribunal de grande instance, chargée de juger les délits et, le cas échéant, de se prononcer sur les demandes d'indemnisation des victimes « parties civiles ». Les jugements du tribunal correctionnel peuvent être attaqués par voie d'appel ;
  • la cour d’assises. La cour d’assises est une juridiction compétente pour juger les crimes. Elle est composée de trois magistrats et de six jurés en première instance et de neuf jurés en appel (réforme du 10 août 2011). Les jurés sont tirés au sort à partir des listes électorales.

1.2. Les différents degrés de juridiction

1.2.1. L’appel

Toute personne dont l'affaire a déjà été jugée en premier ressort peut demander, si elle n'est pas d'accord avec la décision rendue, que son affaire soit réexaminée. Le recours, appelé « appel » s'exerce devant une juridiction de degré supérieur : la cour d'appel, à l'exception des recours contre les décisions rendues par une cour d'assises (crimes) soumis à une nouvelle cour d'assises. En effet, en raison du principe de l’autorité de la chose jugée, un tribunal ne peut pas réexaminer une affaire qu'il a déjà jugée. La cour d’appel peut ainsi infirmer ou confirmer le premier jugement. Le principe de l’appel est toutefois écarté pour des litiges où l'intérêt en jeu est de faible importance. Dans cette hypothèse, le jugement est rendu en « premier et dernier ressort ».

1.2.2. La cassation

Juridiction suprême de l'ordre judiciaire, la Cour de cassation, juridiction unique, est juge du droit et non des faits. Saisie d'un pourvoi en cassation, elle juge de la bonne application du droit et ne revient pas sur l'examen de l'affaire. Elle est composée de 6 chambres (3 civiles, 1 commerciale économique et financière, 1 sociale, 1 criminelle) et peut statuer en chambre mixte (membres d'au moins 3 chambres) ou en assemblée plénière (toutes les chambres réunies) lorsque le pourvoi pose une question de principe. Elle est composée de magistrats du siège (le premier président, les présidents de chambre...) et d'un parquet général (le procureur général...). Si, dans la décision contestée, le droit a correctement été appliqué, la Cour de cassation rejette le pourvoi. Dans le cas contraire, elle casse la décision et l'annule en tout ou partie. L'affaire est alors renvoyée devant une juridiction du fond. Elle a pour mission d'unifier la jurisprudence et de se prononcer sur les Questions Prioritaires de Constitutionnalité QPC.

1.3. Les magistrats composant l’ordre judiciaire

Au sein de l’ordre judiciaire, on distingue deux catégories de magistrats : les magistrats du siège et les magistrats du parquet, ces deux catégories de magistrats étant gérées par le Conseil supérieur de la magistrature.

1.3.1. Les magistrats du siège

Les magistrats du siège, ou magistrature assise, prononcent des jugements sur les litiges qui leur sont soumis par les parties ou sur réquisitoire du parquet. Ils ont pour mission d'appliquer la loi et de dire le droit après avoir entendu les parties en litige, leurs représentants (avocats, avoués...) et le ministère public. Ils sont aussi les garants du bon déroulement des procès.

1.3.2. Les magistrats du parquet

Les magistrats du parquet ne rendent pas de jugement. Représentant la société, ils sont chargés de la défendre en tant que ministère public. Ils dirigent l'action de la police judiciaire, décident des suites à donner lorsqu'une infraction est commise et veille à l'exécution des peines. Au cours des audiences, ils proposent au juge une peine au nom de la société. Ils s'assurent également que les droits des personnes vulnérables soient garantis. Placé sous l'autorité du garde des Sceaux, ils interviennent surtout en matière pénale. Le ministère public est constitué, au niveau de la Cour de cassation par le « procureur général près la Cour de cassation », des « premiers avocats généraux », et des avocats généraux ; au niveau des cours d'appel, par le procureur général, un ou des avocats généraux et des substituts généraux. Au niveau des tribunaux de grande instance, le ministère Public comprend le procureur de la République, le procureur adjoint (il n'en existe que dans les juridictions des villes importantes), les premiers substituts et les substituts. Il n'existe pas de parquet au niveau des tribunaux d'Instance et des juridictions spécialisées. Si l'intervention du ministère public se révèle nécessaire, c'est le procureur du tribunal de grande instance de la même circonscription judiciaire ou l'un des autres magistrats du parquet de ce tribunal qui intervient.

La séparation entre siège et parquet n’est pas hermétique. Les magistrats peuvent au cours de leur carrière passer, et à plusieurs reprises, de l’un à l’autre.

1.3.3. Le Conseil supérieur de la magistrature

Le Conseil supérieur de la magistrature apparaît pour la première fois en France avec la loi du 30 août 1883 relative à l’organisation judiciaire. C’est la Cour de cassation qui est ainsi dénommée, à cette époque, lorsqu’elle siège toutes chambres réunies en matière de discipline des magistrats. La Constitution du 27 octobre 1946, à travers son titre IX, en fera un organe constitutionnel. La Constitution du 4 octobre 1958, à travers son titre VIII « de l’autorité judiciaire », confirme cet ancrage constitutionnel. Depuis 1958, le statut constitutionnel du Conseil supérieur de la magistrature a connu plusieurs évolutions dont la dernière remonte à la loi constitutionnelle du 23 juillet 2008.

Aujourd’hui, le Conseil supérieur de la magistrature est chargé d’assister le chef de l’État dans sa fonction de garant de l’indépendance de l’autorité judiciaire, en ayant en charge la gestion de la carrière des magistrats. Pour remplir cette mission, il dispose d’une organisation et de missions spécifiques.

1.3.3.1. L’organisation du Conseil supérieur de la magistrature.

Le Conseil supérieur de la magistrature est composé de deux formations différentes :

  • la première, compétente pour les magistrats du siège, comprend, outre le premier président de la Cour de cassation, cinq magistrats du siège et un magistrat du parquet, élus par leurs pairs, un conseiller d’État, un avocat et six personnalités qualifiées qui n’appartiennent ni au Parlement, ni à l’ordre judiciaire, ni à l’ordre administratif. Ces personnalités sont désignées par le président de la République et les présidents des assemblées ;
  • la seconde formation, compétente à l’égard des magistrats du parquet, comprend, outre le procureur général près la Cour de cassation, cinq magistrats du parquet et un magistrat du siège, ainsi que le conseiller d’État, l’avocat et les six personnalités précédemment mentionnées.

1.3.3.2. Les missions du Conseil supérieur de la magistrature

La formation du Conseil supérieur de la magistrature compétente à l’égard des magistrats du siège fait des propositions pour la nomination des plus hauts magistrats du siège et pour les chefs de juridictions. Les autres magistrats du siège sont nommés par le pouvoir exécutif après son avis conforme. Elle statue en outre comme conseil de discipline des magistrats du siège (elle est alors composée d’un magistrat du siège supplémentaire). La formation du Conseil supérieur de la magistrature à l’égard des magistrats du parquet donne son avis pour les nominations concernant tous les magistrats du parquet, y compris les postes les plus importants (cela n’était pas le cas avant la réforme de 2008). Elle donne également un avis simple sur les sanctions disciplinaires concernant les magistrats du parquet, qui sont prises par le garde des Sceaux. Cette formation disciplinaire est alors composée d’un magistrat du parquet supplémentaire.

Par ailleurs, le Conseil supérieur de la magistrature se réunit en formation plénière pour répondre aux demandes d'avis formulées par le président de la République au titre de l'article 64 (indépendance de l'autorité judiciaire, statut et déontologie des magistrats ainsi que sur toute question relative au fonctionnement de la justice dont le saisit le ministre de la Justice).

Enfin, le Conseil supérieur de la magistrature peut être saisi, sous certaines conditions, par tout justiciable qui estime qu'à l'occasion d'une procédure judiciaire le concernant, le comportement adopté par un magistrat dans l'exercice de ses fonctions est susceptible de recevoir une qualification disciplinaire.

Pour en savoir plus : http://www.conseil-superieur-magistrature.fr/

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2. Les principales juridictions de l’ordre administratif

Au niveau de l’ordre administratif existent, tout comme pour l’ordre judiciaire, différentes juridictions ainsi que différents degrés de juridiction. L’ensemble de ces juridictions fonctionne grâce à des juges qui disposent d’un statut spécifique.

2.1. Les différentes juridictions de l’ordre administratif

La justice administrative comporte quatre types de juridictions.

2.1.1. Les tribunaux administratifs

Ils sont les juridictions compétentes de droit commun en première instance. Il en existe 42, au moins un par région. C'est à eux que le requérant doit d'abord s'adresser.

2.1.2. Les cours administratives d'appel

Elles sont les juridictions compétentes pour statuer en appel, à la demande d'une personne privée ou d'une administration, contre un jugement de tribunal administratif. Elles ont été créées par la loi du 31 décembre 1987 portant réforme du contentieux administratif afin d'alléger la charge du Conseil d'État. Elles sont aujourd’hui au nombre de 8. Cinq cours administratives d'appel ont été créées initialement le 1er janvier 1989 à Paris, Lyon, Nancy, Nantes et Bordeaux. D'autres se sont ajoutées depuis à Marseille, Douai et Versailles.

2.1.3. Le Conseil d'État

C’est la juridiction suprême de l'ordre administratif. Elle est le juge de cassation des arrêts rendus par les cours administratives d'appel. Il ne juge pas une troisième fois le litige mais vérifie le respect des règles de procédure et la correcte application des règles de droit par les tribunaux administratifs et les cours administratives d'appel.

Le Conseil d'État est également compétent en premier et dernier ressort notamment pour les recours contre les décrets et actes réglementaires des ministres (circulaires, ...), pour les protestations concernant les élections européennes et régionales, ...

Enfin, le Conseil d'État est, à titre exceptionnel, juge d'appel notamment en matière électorale (élections municipales et cantonales).

2.1.4. Les juridictions spécialisées

Certains litiges spécifiques relèvent, en première instance puis en appel, de juridictions administratives spécialisées. Leurs décisions peuvent ensuite être portées devant le Conseil d'État, juge de cassation.

2.2. Les différents degrés de juridiction de l’ordre administratif

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Répartition des compétences au sein de la juridiction administrative

Tableau de répartition des compétences selon le type de contentieux entre les tribunaux administratifs (TA), les cours administratives d'appel (CAA), le Conseil d'État et les juridictions administratives spécialisée (JAS).

Types de contentieux1er RessortAppelCassation
Contentieux ordinaire
Tous les litiges administratifs, sauf les contentieux énumérés dans les rubriques suivantes du tableau.TACAAConseil
d'État
Litiges relatifs au rejet des demandes de visa d'entrée sur le territoire de la République française relevant des autorités consulaires.TA de NantesCAA de NantesConseil d'État
Élections municipales et cantonales.TAConseil
d'État
-

Questions préjudicielles en appréciation de la légalité ou en interprétation d'actes relevant de la compétence des TA en premier ressort.

 

TAConseil
d'État
-
Arrêtés du ministre chargé du travail fixant la liste des organisations syndicales reconnues représentatives par branche professionnelle et au niveau national et interprofessionnel.CAA de Paris Conseil d'État
Recours dirigés contre :
- les décrets ;
- les actes réglementaires des ministres ;
- les décisions prises par les organes de certaines autorités au titre de leur mission de contrôle ou de régulation ;
- les décisions ministérielles prises en matière de contrôle des concentrations économiques.
Conseil
d'État
--

- Contentieux relatif à la carrière des fonctionnaires nommés par décret du président de la République.

- Contentieux des élections régionales et européennes.

- Les actions en responsabilité dirigées contre l'État pour durée excessive de la procédure devant la juridiction administrative.

Conseil
d'État
--
Litiges visés à l'article R.222-13 du code de la justice administrative, dont contentieux relatifs à :
- situation individuelle des fonctionnaires ;
- pension, aide personnalisée au logement ;
- redevance audiovisuelle ;
- permis de conduire ;
- etc.
TA Conseil d'État
Contentieux spécialisé.

- Juridictions financières (chambres régionales des comptes, cour des comptes) ;
- Ordres professionnels statuant en matière disciplinaire ;
- Juridictions de l'aide sociale ;

- Contentieux des pensions, militaire, d'invalidité, etc.

JAS JAS Conseil
d'État

2.3. Les juges composant l’ordre administratif

Au sein des juridictions administratives, les décisions sont rendues par des juges qui relèvent de deux statuts différents.

2.3.1. Les magistrats de l'ordre administratif

Les membres des tribunaux et cours administratives d’appel - 1 200 magistrats environ – forment, depuis une loi de 1987, un corps unique. Le corps des juges administratifs est structuré en trois grades : conseiller, premier conseiller et président. Leur carrière se déroule indifféremment dans l’un ou l’autre des deux degrés de juridiction. Recrutés parmi les anciens élèves de l’École nationale d’administration, par concours spécifique ou par la voie du détachement, les juges des cours et tribunaux administratifs bénéficient d’une garantie d’inamovibilité inscrite dans la loi du 6 janvier 1986.

La gestion de leur carrière et les procédures disciplinaires sont assurées par un conseil supérieur des tribunaux administratifs et cours administratives d’appel, sur le modèle du Conseil supérieur de la magistrature. Ce conseil est présidé par le vice-président du Conseil d'État et comprend 13 membres dont 5 représentants élus du corps des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel et 3 personnalités qualifiées, nommées respectivement par le président de la République et par les présidents de l'Assemblée nationale et du Sénat.

La gestion matérielle du corps est assurée par le vice-président du Conseil d’État, et non par le ministère de l’Intérieur comme auparavant, ce qui est une garantie supplémentaire d’indépendance.

2.3.2. Les membres du Conseil d'État

Les membres du Conseil d’État - environ 300 membres dont les deux tiers sont en activité au sein du Conseil et un tiers à l’extérieur - constituent un corps distinct de celui des autres juges administratifs. Leur recrutement s’effectue par le biais de l’École nationale d’administration, et du « tour extérieur » qui permet à des personnalités d’expériences variées d’entrer au Conseil d’État. Le statut des membres de la plus haute juridiction administrative ne leur confère que des garanties juridiques limitées : aucune inamovibilité n’est par exemple prévue. Toutefois, l’indépendance de ces juges est protégée par la coutume qui se matérialise par trois pratiques anciennes :

  • la gestion du Conseil d'État et de ses membres est assurée de façon interne, par le bureau du Conseil d'État, composé du vice-président, des sept présidents de section et du secrétaire général du Conseil d'État, sans interférences extérieures ;
  • si les textes ne garantissent pas l'inamovibilité des membres du Conseil, en pratique, cette garantie existe, sauf situation tout à fait exceptionnelle, comme en 1940-44 ;
  • si l'avancement de grade se fait, en théorie, au choix, il obéit, dans la pratique, strictement à l'ancienneté, ce qui assure aux membres du Conseil d'État une grande indépendance, tant à l'égard des autorités politiques qu'à l'égard des autorités du Conseil d'État elles-mêmes.

3. Le Tribunal des conflits

Les conflits d'attribution entre la juridiction administrative et la juridiction judiciaire sont réglés par un Tribunal des conflits dont l’organisation et les compétences viennent d’être modifiées par la loi n°2015-177 du 16 février 2015 relative à la modernisation et à la simplification du droit et des procédures dans les domaines de la justice et des affaires intérieures. Cette loi vient modifier une loi du 24 mai 1872 relative au Tribunal des conflits.

3.1. Composition du Tribunal des conflits

De façon générale, le Tribunal des conflits est composé en nombre égal de membres du Conseil d'État et de la Cour de cassation. Dans sa formation ordinaire, le Tribunal des conflits comprend :

1° Quatre conseillers d'État en service ordinaire élus par l'assemblée générale du Conseil d'État ;

2° Quatre magistrats du siège hors hiérarchie de la Cour de cassation élus par les magistrats du siège hors hiérarchie de la Cour de cassation ;

3° Deux suppléants élus, l'un par l'assemblée générale du Conseil d'État parmi les conseillers d'État en service ordinaire et les maîtres des requêtes, l'autre par l'assemblée générale des magistrats du siège de la Cour de cassation parmi les conseillers hors hiérarchie et référendaires.

Les membres du Tribunal des conflits sont soumis à réélection tous les trois ans et rééligibles deux fois. Lorsqu'un membre titulaire ou suppléant cesse définitivement d'exercer ses fonctions, il est procédé à son remplacement jusqu'à la fin du mandat en cours.

3.2. Présidence du Tribunal des conflits

Les membres choisissent parmi eux, pour trois ans, un président issu alternativement du Conseil d'État et de la Cour de cassation, au scrutin secret à la majorité des voix. En cas d'empêchement provisoire du président, le tribunal est présidé par le membre le plus ancien appartenant au même ordre de juridiction. En cas de cessation définitive des fonctions du président, le tribunal est présidé par un membre du même ordre pour la durée du mandat restant à courir.

3.3. Rapporteurs publics

Deux membres du Conseil d'État, élus par l'assemblée générale du Conseil d'État parmi les rapporteurs publics, et deux membres du parquet général de la Cour de cassation, élus par l'assemblée générale des magistrats hors hiérarchie du parquet général parmi eux, sont chargés des fonctions de rapporteur public. Ils sont élus pour trois ans et rééligibles deux fois. Le rapporteur public expose publiquement et en toute indépendance son opinion sur les questions que présentent à juger les affaires dont le Tribunal des conflits est saisi.

3.4. Délibérations du Tribunal des conflits

Le Tribunal des conflits ne peut délibérer que si cinq membres au moins sont présents. Dans le cas où, après une seconde délibération, les membres du Tribunal n'ont pu se départager, l'affaire est examinée en formation élargie. Cette formation est composée, outre les membres composant la formation ordinaire, de deux conseillers d'État en service ordinaire et de deux magistrats du siège, hors hiérarchie de la Cour de cassation, élus lors de l'élection des membres de la formation ordinaire. Les règles de suppléance sont applicables. Le Tribunal ne peut siéger que si tous les membres sont présents ou suppléés. Les débats ont lieu en audience publique après une instruction contradictoire. Le délibéré des juges est secret. Les décisions sont rendues au nom du peuple français. Elles sont motivées et comportent les noms des membres qui en ont délibéré. Elles sont rendues en audience publique. Par ailleurs, lorsque la solution de la question soumise au Tribunal des conflits s'impose avec évidence, le président, conjointement avec le membre le plus ancien appartenant à l'autre ordre de juridiction, peut statuer par voie d'ordonnance. Les décisions du Tribunal des conflits s'imposent à toutes les juridictions de l'ordre judiciaire et de l'ordre administratif.

3.5. Compétence du Tribunal des conflits

Le Tribunal des conflits règle le conflit d'attribution entre les deux ordres de juridiction :

1° lorsque le représentant de l'État dans le département ou la collectivité a élevé le conflit. Lorsque le représentant de l'État dans le département ou la collectivité estime que la connaissance d'un litige ou d'une question préjudicielle portée devant une juridiction de l'ordre judiciaire relève de la compétence de la juridiction administrative, il peut, alors même que l'administration ne serait pas en cause, demander à la juridiction saisie de décliner sa compétence ;

2° lorsque les juridictions de l'un et l'autre ordre se sont déclarées respectivement incompétentes pour connaître d'un litige ayant le même objet ;

3° lorsqu'une juridiction de l'un ou l'autre ordre lui a renvoyé la question de compétence soulevée dans un litige.

Le conflit d'attribution entre les juridictions judiciaire et administrative ne peut être élevé en matière pénale.

Le Tribunal des conflits peut être saisi des décisions définitives rendues par les juridictions administrative et judiciaire dans les instances introduites devant les deux ordres de juridiction, pour des litiges portant sur le même objet, lorsqu'elles présentent une contrariété conduisant à un déni de justice.

Sur les litiges qui lui sont ainsi déférés, le Tribunal des conflits juge au fond, à l'égard de toutes les parties en cause. Ses décisions ne sont susceptibles d'aucun recours.

En application de la loi n° 2015-177 du 16 février 2015, un décret n° 2015-233 du 27 février 2015 précise les règles applicables devant le Tribunal des conflits en ce qui concerne les procédures de conflit positif, de conflit négatif et de recours en cas de contrariété de décisions au fond. Le décret améliore les procédures de prévention des conflits, en étendant à toute juridiction saisie d'un litige présentant une difficulté sérieuse de compétence, la faculté reconnue jusqu'ici seulement au Conseil d'État et à la Cour de cassation, de renvoyer au Tribunal des conflits le soin de désigner l'ordre de juridiction compétent. Enfin, le décret crée une procédure de questions préjudicielles permettant aux juridictions saisies d'un litige qui soulève une question relevant de la compétence de l'autre ordre, de saisir elles-mêmes les juridictions de cet ordre.

4. Le Conseil constitutionnel

Le Conseil constitutionnel a été institué par la Constitution de la Ve République, en date du 4 octobre 1958. Régulateur du fonctionnement des pouvoirs publics et juridiction aux compétences variées, il a notamment la charge du contrôle de conformité de la loi à la Constitution.

La compétence du Conseil constitutionnel, délimitée par la Constitution, est précisée et complétée par des lois organiques. Les attributions que lui confient les textes peuvent se ranger en deux catégories : le contentieux normatif et le contentieux électoral et référendaire.

4.1 Le contentieux normatif

  • Juge de la constitutionnalité des lois, le Conseil constitutionnel exerce soit un contrôle a priori, soit un contrôle a posteriori

Contrôle a priori :

Le Conseil constitutionnel est obligatoirement saisi des lois organiques et des règlements des assemblées parlementaires, avant la promulgation des premières et l'entrée en vigueur des seconds. Il peut être saisi d'un engagement international avant sa ratification ou son approbation. Pour les lois ordinaires, le Conseil peut être saisi d'une loi avant sa promulgation. Dans ces deux derniers cas de figure, le Conseil est saisi, selon des modalités variables selon l'acte contrôlé, soit par une autorité politique (Président de la République, Premier ministre, président de l'Assemblée nationale ou du Sénat), soit par 60 députés ou 60 sénateurs au moins.

Depuis 1999, le Conseil constitutionnel peut également examiner la conformité à la Constitution des lois du pays adoptées par le congrès de la Nouvelle-Calédonie.

Contrôle a posteriori : les questions prioritaires de constitutionnalité (QPC)

Depuis le 1er mars 2010 et à la suite de la révision constitutionnelle du 23 juillet 2008, le Conseil constitutionnel, sur renvoi du Conseil d'État ou de la Cour de cassation, contrôle si une disposition législative déjà en application porte atteinte aux droits et libertés garantis par la Constitution. Dans cette hypothèse, un requérant est à l'origine du contrôle de constitutionnalité exercé, puisque la question posée a été soulevée à l'occasion d'une instance en cours devant une juridiction. On parle de question prioritaire de constitutionnalité (QPC).

  • Juge de la répartition des compétences entre la loi et le règlement, le Conseil constitutionnel peut être saisi, soit en cours de discussion parlementaire par le président de l'assemblée intéressée ou le Premier ministre, soit a posteriori par ce dernier pour déclasser une disposition législative, c'est-à-dire modifier par décret une telle disposition dont le contenu est de nature réglementaire.
  • Depuis la révision du 23 juillet 2008, le Conseil constitutionnel peut être amené à vérifier si les conditions de présentation des projets de loi répondent aux conditions fixées par une loi organique (loi organique n° 2009-403 du 15 avril 2009).
  • Enfin, le Conseil constitutionnel est juge de la répartition des compétences entre l'État et certaines collectivités d'outre-mer (à ce jour : Polynésie française, Saint-Barthélemy et Saint-Martin).

4.2 Le contentieux électoral et référendaire

Le Conseil constitutionnel veille à la régularité de l'élection du Président de la République et des opérations de référendum, dont il proclame les résultats. Il est juge de la régularité de l'élection des parlementaires (députés et sénateurs), et donc de leur éligibilité ; il intervient également lorsqu'un parlementaire se trouve, ou est susceptible de se trouver, dans un cas d'incompatibilité.

Largement ouvertes aux électeurs, les saisines du Conseil en matière électorale ont vu leur nombre considérablement augmenter à la suite du vote de la législation organisant et contrôlant le financement des dépenses électorales dont le Conseil est juge pour les candidats aux élections législatives et présidentielle (en appel). Ainsi, au 4 octobre 2012, le Conseil avait rendu 2871 décisions en matière électorale pour 889 décisions sur le contentieux des normes (dont 650 DC).

Auteur(s) :

DIETSCH François, LEGRAND Jean-Marc, MEYER François

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