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Les concours de la FPT

Par Bastien Urbain, Docteur en droit privé
Dernière mise à jour : septembre 2019

Avant la Seconde Guerre mondiale, la France était dotée d’un système de protection sociale assez rudimentaire. Malgré l’adoption de diverses lois d’assistance publique et la création des premières assurances sociales, ce système ne permettait pas de protéger l’ensemble de la population contre les risques sociaux et n’était pas non plus en mesure d’offrir une protection suffisante aux personnes couvertes. Les dispositifs en vigueur ne parvenant pas à répondre aux besoins d’une population touchée par les guerres et ayant été confrontée à plusieurs crises économiques et financières, il est apparu indispensable de réformer en profondeur et de moderniser le système de protection sociale. C’est dans ce contexte qu’a été adoptée l’ordonnance du 4 octobre 1945 instituant la Sécurité sociale.

L’ambition des pères fondateurs de la Sécurité sociale était de mettre en place une institution répondant aux principes « beveridgiens » d’universalité et d’unicité. En d’autres termes, l’objectif était de couvrir l’ensemble de la population au sein d’une organisation unifiée. Une telle réalisation nécessite toutefois des moyens humains, matériels et financiers considérables. Or, ces moyens n’étaient pas disponibles au lendemain de la Seconde Guerre mondiale. C’est pourquoi la Sécurité sociale s’est construite par étape : d’abord réservée aux travailleurs et à leur famille, la protection devait progressivement s’étendre à une population plus vaste. Actuellement, la protection contre certains risques sociaux n’est plus conditionnée à l’exercice d’une activité professionnelle. La mise en place de la protection universelle maladie (PUMa) au 1er janvier 2016 s’inscrit dans ce mouvement d’ouverture des droits à d’autres catégories sociales que les travailleurs puisque cette protection est garantie à toutes les personnes qui résident de manière stable et régulière en France.

La Sécurité sociale est aujourd’hui une institution particulièrement complexe à appréhender, et ce pour plusieurs raisons :

  • Elle peut prendre en charge les risques sociaux selon deux logiques différentes : une logique contributive ou une logique redistributive.

Ainsi, le risque vieillesse obéit à une forte logique assurantielle dans la mesure où les droits à pension de retraite sont conditionnés au versement préalable de cotisations. À l’inverse, d’autres branches comme la branche maladie s’éloignent de cette logique contributive. Les personnes malades sont en effet soignées même si elles n’ont pas cotisé au préalable. Par conséquent, certaines prestations sont accordées sur des critères professionnels quand d’autres sont accordées sur des critères de résidence et/ou de ressources.

  • La protection sociale accordée n’est pas uniforme.

Tous les Français ne sont pas couverts de la même manière. La Sécurité sociale regroupe en effet les travailleurs dans une multitude de régimes socioprofessionnels. Or, tous les régimes fonctionnent différemment. Ils ne prennent notamment pas tous en charge les mêmes risques sociaux. Et lorsque deux régimes différents couvrent un même risque, le niveau de protection n’est pas le même.

  • Les risques sociaux sont gérés par une très grande diversité d’organismes.
  • Les ressources financières des régimes et des branches de Sécurité sociale sont de plus en plus diversifiées.

Afin d’avoir une vision globale de la Sécurité sociale, il est utile d’étudier son organisation administrative (1) et financière (2).

1. L’organisation administrative de la Sécurité sociale

La Sécurité sociale est structurée autour des notions de « régimes » (1.1) et de « branches » (1.2). Elle se caractérise en outre par le fait que la gestion des risques sociaux qu’elle couvre — maladie, maternité, invalidité, décès, accident du travail, maladie professionnelle, vieillesse, veuvage et les charges familiales — est confiée à un vaste réseau de caisses et d’organismes (1.3).

1.1. La notion de régime

En France, la protection sociale n’est pas uniforme. Elle diffère selon le régime auquel appartiennent les individus.

La notion de régime peut se définir comme un groupement de nature professionnelle (c’est-à-dire un groupement d’individus qui exercent une même profession) ou de nature catégorielle (c’est-à-dire un groupement de personnes ayant le même statut : salariés, fonctionnaires, travailleurs indépendants, etc.).

On distingue traditionnellement 4 types de régimes de base obligatoires de Sécurité sociale : le régime général (2.1.1), les régimes spéciaux (2.1.2), le régime des travailleurs indépendants (2.1.3) et le régime agricole (2.1.4).

En plus de ces régimes de base de Sécurité sociale, il est à noter qu’il existe des régimes complémentaires obligatoires ainsi que divers régimes sur-complémentaires facultatifs. Bien qu’ils soient exclus de la Sécurité sociale stricto sensu, ces régimes complémentaires et sur-complémentaires font partie intégrante du système français de protection sociale.

1.1.1. Le régime général

De tous les régimes de base de Sécurité sociale, le régime général est souvent considéré comme étant le plus important en raison de l’étendue des risques et de la population qu’il assure.

Le régime général couvre tous les travailleurs salariés et assimilés du secteur privé, à l’exception des travailleurs agricoles.

D’autres catégories de personnes sont également rattachées au régime général. Il s’agit notamment des étudiants, des chômeurs, des agents contractuels de l’État et depuis le 1er janvier 2018, des travailleurs indépendants (pour le risque maladie).

1.1.2. Les régimes spéciaux

Au lendemain de la Libération, les pouvoirs publics ont cherché à mettre en place un système de Sécurité sociale généralisé, c’est-à-dire destiné à couvrir de manière uniforme l’ensemble de la population du pays contre l’ensemble des facteurs d’insécurité. Mais les personnes qui étaient couvertes avant 1945 et qui se voyaient accorder des prestations plus importantes que ce que le nouveau système de Sécurité sociale était capable d’offrir ont tout fait pour garder leurs avantages et se sont opposées à la création d’un régime unique. Conscient de la résistance qu’il allait rencontrer, le législateur a préféré faire de la mise en place d’un régime unique un objectif vers lequel tendre à terme et conserver provisoirement les régimes spéciaux.

Théoriquement, les régimes spéciaux ne peuvent exister qu’à deux conditions cumulatives (art. L. 711-1 CSS) :

  • Ils doivent avoir été mis en place avant 1945 ;
  • Leur maintien doit être provisoire.

Cette règle n’a cependant jamais été respectée dans la pratique. Les régimes qui existaient en 1945 se sont pour la plupart maintenus. En outre, divers régimes ont été créés après cette date. C’est le cas par exemple du régime géré par la Caisse nationale des industries électriques et gazières, créée en 1946, ou encore de celui géré par la Caisse d’assurance vieillesse et maladie des cultes, mise en place en 1978.

Il existe aujourd’hui de nombreux régimes spéciaux dont, par exemple : les régimes de la fonction publique, le régime des personnels de la SNCF, de la RATP, de la Banque de France ou encore celui des membres de la Comédie Française.

1.1.3. Le régime des travailleurs indépendants

Le régime social des indépendants (RSI) assurait la couverture sociale des commerçants, des artisans et des professions libérales. Ce régime a été supprimé au 1er janvier 2018. Désormais, la gestion du risque maladie des travailleurs indépendants est assurée par le régime général.

1.1.4. Le régime agricole

Le régime agricole assure la couverture sociale des travailleurs agricoles, qu’ils soient salariés ou non.

1.2. La notion de branche

Chaque régime prend en charge un nombre variable de risques sociaux. Afin de simplifier leur gestion administrative et financière, ces risques sont regroupés en plusieurs « branches ».

Le nombre de branches varie d’un régime à l’autre. Le régime général compte par exemple quatre branches (art. L. 200-2 CSS) :

  • Une branche maladie/maternité/invalidité/décès ;
  • Une branche accidents du travail/maladies professionnelles ;
  • Une branche vieillesse/veuvage ;
  • Une branche famille.

Bien qu’elle ne soit pas prévue par le Code de la Sécurité sociale, la pratique se réfère régulièrement à une cinquième branche, qui serait une branche recouvrement gérée par les URSSAF et l’ACOSS.

1.3. Les caisses et organismes de Sécurité sociale

Chaque régime de Sécurité sociale est géré par un réseau plus ou moins complexe de caisses et d’organismes.

1.3.1. Les caisses du régime général

Au sein du régime général, la gestion des risques sociaux est confiée à un vaste réseau de caisses nationales (1.3.1.1), régionales (1.3.1.2) et locales (1.3.1.3), toutes dirigées par des représentants d’employeurs, de salariés et par des « personnalités qualifiées » désignées par l’autorité compétente de l’État.

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​Vue d’ensemble des principales caisses en charge de la gestion des risques sociaux au sein du régime général

1.3.1.1. Les caisses nationales

Les quatre branches du régime général sont gérées par trois caisses nationales : la CNAMTS, la CNAVTS et la CNAF.

La « branche recouvrement » est également gérée par une caisse nationale : l’ACOSS.

La CNAMTS (Caisse Nationale d’Assurance Maladie des Travailleurs Salariés) assure la gestion de la branche maladie/maternité/invalidité/décès ainsi que de la branche accidents du travail/maladies professionnelles. La caisse doit notamment :

  • Assurer sur le plan national, en deux gestions distinctes, le financement d’une part des assurances maladie, maternité, invalidité, décès et d’autre part des assurances accidents du travail et maladies professionnelles ;
  • Promouvoir une action de prévention, d’éducation et d’information de nature à améliorer l’état de santé de la population ;
  • Définir et mettre en œuvre les mesures de prévention des accidents du travail et des maladies professionnelles ;
  • Émettre un avis sur les projets de loi et de règlement.

La CNAVTS (Caisse Nationale d’Assurance Vieillesse des Travailleurs Salariés) assure la gestion de la branche vieillesse/veuvage du régime général. La caisse doit notamment :

  • Assurer le financement des prestations d’assurance vieillesse et veuvage ;
  • Contrôler les CARSAT concernant leurs attributions en matière de vieillesse ;
  • Proposer toute mesure qui, dans le cadre du projet de loi de financement de la Sécurité sociale, lui paraît nécessaire pour garantir l’équilibre financier de l’assurance vieillesse.

La CNAF (Caisse Nationale des Allocations Familiales) assure la gestion de la branche famille du régime général. La caisse doit notamment :

  • Assurer le financement des prestations familiales ;
  • Gérer et contrôler les caisses d’allocations familiales ;
  • Gérer un fonds d’action sanitaire et sociale.

L’ACOSS (Agence Centrale des Organismes de Sécurité Sociale) est l’organisme national chargé d’assurer la gestion de la trésorerie des différentes branches gérées par la CNAMTS, la CNAVTS et la CNAF. Pour mener à bien sa mission, l’ACOSS dispose de plusieurs prérogatives :

  • Elle définit les grandes orientations en matière de contrôle et de recouvrement des cotisations ;
  • Elle s’assure de l’application homogène des lois et règlements relatifs au recouvrement des cotisations ;
  • Elle exerce un pouvoir de direction et de contrôle sur les URSSAF ;
  • Elle centralise et reçoit le produit des cotisations et contributions prélevées aussi bien par les URSSAF que par des organismes tiers.

Ces quatre caisses nationales sont des établissements publics à caractère administratif, placés sous la tutelle de la Direction de la Sécurité Sociale (DSS), elle-même rattachée à 2 ministères :

  • Le ministère des Solidarités et de la Santé ;
  • Le ministère de l’Action et des Comptes publics.

L’UCANSS (Union des Caisses Nationales de Sécurité Sociale) exerce pour le compte des quatre caisses nationales des tâches qui leur sont communes. Elle assure notamment le suivi de la gestion prévisionnelle de l’emploi, des effectifs, de la masse salariale et des politiques de recrutement du régime général.

1.3.1.2. Les caisses régionales

Les CARSAT (Caisses d’Assurance Retraite et de la Santé Au Travail) assurent au niveau régional la gestion de la branche accidents du travail/maladies professionnelles et de la branche vieillesse/veuvage.

Les CARSAT ont 2 rôles distincts :

  • Dans le domaine de la santé, elles développent et coordonnent la prévention des accidents du travail et des maladies professionnelles. En outre, les CARSAT assurent la tarification des cotisations « accident du travail ».
  • Dans le domaine de la vieillesse, les CARSAT assurent, pour le compte de la CNAVTS, la tenue des comptes individuels des assurés sociaux, la liquidation et le paiement des prestations.

Il existe actuellement 15 CARSAT réparties sur toute la France.

Les URSSAF (Unions pour le Recouvrement des cotisations de Sécurité Sociale et d’Allocations Familiales) sont les organismes chargés du recouvrement des cotisations. À cette fin, elles assurent :

  • L’immatriculation des employeurs et des travailleurs indépendants ;
  • L’encaissement des cotisations de Sécurité sociale, d’allocations familiales, de la contribution sociale généralisée (CSG) ainsi que de la contribution au remboursement de la dette sociale (CRDS) ;
  • Elles contrôlent les employeurs, sur pièces et sur place ;
  • Elles sont saisies du contentieux du recouvrement.

Le 1er janvier 2014, les 88 URSSAF départementales ont fusionné en 22 URSSAF régionales.

Les URSSAF, comme les CARSAT, sont des organismes privés chargés de la gestion d’un service public.

Il est à noter que la branche famille est la seule qui ne dispose pas d’un réseau de caisses régionales.

1.3.1.3. Les caisses locales

Les CPAM (Caisses Primaires d’Assurance Maladie) assurent au niveau local la gestion de la branche maladie/maternité/invalidité/décès et de la branche accidents du travail/maladies professionnelles. Concrètement, les CPAM :

  • Procèdent à l’affiliation des assurés sociaux ;
  • Versent les prestations maladie, maternité, invalidité, décès, accidents du travail et maladies professionnelles ;
  • Entretiennent des relations permanentes non seulement avec les assurés sociaux, mais également avec les professionnels de santé et les établissements de soins.

Il existe aujourd’hui 102 CPAM en France Métropolitaine.

Les CAF (Caisses d’Allocations Familiales) assurent au niveau local la gestion de la branche famille. Les CAF :

  • Servent les prestations familiales aux allocataires ;
  • Servent, pour le compte de l’État, des avantages autres que les prestations familiales : aide au logement, allocation aux adultes handicapés, RSA, etc. ;
  • Mènent une action sociale en faveur des familles qui entrent dans leur circonscription ;
  • Aident au recouvrement des créances alimentaires des allocataires.

Comme les caisses régionales, les CPAM et les CAF sont des organismes privés chargés de la gestion d’un service public.

Il est à noter que la branche vieillesse ne dispose pas d’un réseau de caisses locales. Ce sont les CARSAT (caisses régionales), qui se chargent du versement des prestations d’assurance vieillesse et veuvage.

1.3.2. Les caisses du régime agricole

Tous les travailleurs agricoles sont assurés au sein d’une même structure : la MSA (Mutualité Sociale Agricole).

La MSA a pour missions de recouvrir les cotisations et de garantir le paiement des prestations pour les risques qu’elle couvre, à savoir la maladie, la maternité, l’invalidité, le décès, les accidents du travail, les maladies professionnelles, la vieillesse et les charges de famille.

La MSA est organisée autour :

  • D’une caisse nationale placée sous la tutelle du ministère de l’Agriculture : la CCMSA (Caisse Centrale de la Mutualité Sociale Agricole) ;
  • D’un réseau de caisses locales.

1.3.3. Les caisses des régimes spéciaux

Les régimes spéciaux sont divers et variés.

Certains régimes dits « d’employeurs » sont gérés directement par l’employeur, c’est-à-dire par un service spécifique de l’entreprise ou par un service spécifique de l’administration. Ainsi, la gestion du régime des fonctionnaires de l’État ou du régime des ouvriers des établissements industriels de l’État est assurée « en interne ».

D’autres régimes confient la gestion des risques sociaux à des caisses et organismes particuliers. Une partie des régimes spéciaux est alors gérée par des caisses du régime général. Une autre partie des régimes spéciaux est gérée par des caisses spécifiques aux régimes.

2. L’organisation financière de la Sécurité sociale

Pour assurer ses missions, la Sécurité sociale a besoin de ressources financières considérables. À titre d’exemple, les dépenses de l’ensemble des régimes de base (y compris du Fonds de solidarité vieillesse) s’élevaient à 488,6 Md€ en 2017.

L’importance des sommes en jeu suppose que la gestion des finances sociales soit très encadrée. Cette gestion repose sur des principes financiers spécifiques, en partie inspirés du droit des finances publiques (3.1). En revanche, il est un point qui oppose clairement les finances sociales et les finances publiques : les ressources financières de l’État ou des collectivités locales ne sont pas de même nature que les ressources financières de la Sécurité sociale. En effet, les dépenses publiques sont financées par l’impôt alors que les dépenses sociales sont majoritairement financées par des cotisations (3.2).

2.1. Les grands principes financiers

La Sécurité sociale est soumise à quelques grands principes financiers, parmi lesquels figurent :

  • Le principe de l’autonomie financière des régimes et des branches.

Théoriquement, chaque régime devrait fonctionner de manière autonome, c’est-à-dire qu’il devrait pouvoir prélever sur ses assurés sociaux les ressources nécessaires au financement de ses dépenses. De la même manière, lorsque le régime est organisé en branches (comme le régime général), chaque branche devrait être autonome financièrement. L’indépendance des régimes et des branches s’entend vis-à-vis des autres régimes et branches, mais également à l’égard de l’État, ce qui signifie que l’État ne devrait jamais avoir à financer la Sécurité sociale.

Malgré l’affirmation de ce principe d’autonomie, certains régimes se trouvent dans l’incapacité d’assurer leur équilibre financier. Dans cette situation, le législateur a mis en place des mécanismes assez complexes destinés à organiser une compensation financière entre l’État et les régimes, entre les régimes eux-mêmes, et entre les régimes et les organismes qui concourent à leur financement (FSV, CNSA, etc.).

  • Le principe de l’affectation des recettes aux dépenses.

La Sécurité sociale est organisée de manière à ce que chaque dépense soit financée par des recettes bien spécifiques et dont l’origine est connue à l’avance. Une telle affectation des recettes aux dépenses n’existe pas dans le budget de l’État au sein duquel toutes les recettes sont mélangées pour financer indistinctement les différents postes de dépense.

  • Le budget de la Sécurité sociale est voté et approuvé chaque année par le Parlement via les lois de financement de la Sécurité sociale.

Pendant longtemps, le Parlement a été tenu à l’écart du processus d’élaboration du budget de la Sécurité sociale. Mais face à l’importance des sommes en jeu et afin de lutter contre une dette sociale grandissante, le législateur a adopté en 1996 le principe des lois de financement de la Sécurité sociale. Ces lois, votées chaque année par le Parlement, ont pour objet de déterminer les conditions générales de l’équilibre financier de la Sécurité sociale et de fixer ses objectifs de dépenses en prenant en compte ses prévisions de recettes.

2.2. Les ressources financières du régime général

Pendant longtemps, la Sécurité sociale a été financée presque exclusivement par des cotisations assises sur les revenus professionnels. Cependant, la nature de ses ressources évolue depuis le début des années 1990. Bien qu’elle reste encore majoritairement financée par des cotisations (3.1.1), la Sécurité sociale est de plus en plus alimentée par des prélèvements fiscaux (3.1.2).

2.2.1. Les cotisations

En 2019, les cotisations représentent 60% (305,8Md€) des recettes des régimes de base et du Fonds de solidarité vieillesse.

Les cotisations présentent plusieurs caractéristiques :

  • Elles revêtent un caractère obligatoire.
  • Elles sont assises sur les revenus du travail (art. L. 242-1 CSS).
  • Elles sont précomptées par l’employeur.

Cela signifie que le salarié ne va pas directement verser à l’URSSAF les cotisations dont il est redevable au titre des différentes assurances sociales. C’est l’employeur qui prélève les cotisations sur le salaire brut de ses salariés. Ces derniers ne peuvent pas s’opposer à cette retenue.

  • Certains risques sociaux sont financés par une double cotisation – patronale et salariale – tandis que d’autres sont à la charge exclusive de l’employeur.
  • Le taux des cotisations varie en fonction du risque couvert et de la personne débitrice de l’obligation de cotiser (salarié ou employeur).
  • Les cotisations sont des prélèvements proportionnels aux revenus.

Le taux des cotisations ne varie pas en fonction des revenus. Cela revient mathématiquement à faire payer davantage les travailleurs aux rémunérations les plus élevées.

Le caractère proportionnel des cotisations connait toutefois une exception : certaines cotisations sont plafonnées.

Le plafond de cotisation peut se définir comme une limite de revenus au-dessus de laquelle les travailleurs ne paient plus de cotisations. En d’autres termes, la partie de la rémunération qui est inférieure à une limite posée par le gouvernement est soumise à des prélèvements. La partie qui dépasse ce plafond est exonérée de prélèvements sociaux.

Ce système de plafonnement qui remet en cause le caractère proportionnel des cotisations a beaucoup été critiqué et considéré comme injuste puisqu’il implique que les travailleurs aux plus faibles revenus paient des cotisations sur l’intégralité de leur rémunération tandis que les travailleurs les mieux payés sont exonérés de cotisations sur une partie de leurs revenus professionnels.

Depuis 1967, le plafond de cotisation est progressivement supprimé. Il reste encore aujourd’hui quelques rares cotisations plafonnées. C’est le cas notamment d’une partie des cotisations d’assurance vieillesse.

2.2.2. Les prélèvements fiscaux

Les cotisations ne suffisent plus à assurer le financement d’une Sécurité sociale aux besoins financiers de plus en plus importants. Divers prélèvements fiscaux ont alors été mis en place dans l’optique de diversifier ses ressources. Les prélèvements fiscaux les plus emblématiques sont la CSG (3.1.2.1) et la CRDS (3.1.2.2). Néanmoins, de nombreuses taxes et contributions annexes aux rendements plus modestes sont également mobilisées (3.1.2.3).

2.2.2.1. La CSG (Contribution Sociale Généralisée)

La CSG a été créée en 1990 dans le but de diversifier les ressources financières de la branche famille de la Sécurité sociale. Aujourd’hui, la CSG participe non seulement au financement de la branche famille, mais également à celui des branches maladie et vieillesse.

Le Conseil constitutionnel reconnaît à la CSG la nature d’une « imposition de toutes natures » au sens de l’article 34 de la Constitution depuis une décision du 28 décembre 1990 (CC 28 décembre 1990, n° 90-285 DC).

La CSG est un prélèvement fiscal dont l’assiette est très large puisqu’elle porte sur l’ensemble des revenus : revenus d’activité et de remplacement ; revenus du patrimoine ; produits de placement ; sommes engagées ou produits réalisés à l’occasion de jeux.

La CSG est partiellement déductible de l’impôt sur le revenu.

2.2.2.2. La CRDS (Contribution au Remboursement de la Dette Sociale)

La CRDS a été instituée par l’ordonnance du 24 janvier 1996 dans le but d’alimenter la CADES (Caisse d’Amortissement de la Dette Sociale) et donc de contribuer au remboursement de la dette sociale. Initialement, la CRDS était un prélèvement conçu pour durer 13 ans, le temps estimé pour apurer la dette du régime général. Finalement, son existence a été prolongée jusqu’à extinction totale de la dette sociale. Il est actuellement prévu que la dette sociale soit remboursée en 2024, ce qui signifie qu’à cette date, la CADES et la CRDS devraient disparaître.

2.2.2.3. Les contributions annexes

Le financement de la Sécurité sociale se fait également à l’aide de diverses contributions au rendement plus modeste que les cotisations, la CSG ou la CRDS. Parmi ces contributions annexes figurent notamment :

  • La C3S (Contribution Sociale de Solidarité des Sociétés).

Il s’agit d’une contribution assise sur le chiffre d’affaires des sociétés. La loi de financement rectificative de la Sécurité sociale pour 2014 a annoncé la suppression progressive de la C3S. Bien que cette contribution n’ait pas encore totalement disparu, son rendement a considérablement diminué. 

  • Les contributions et taxes dites « comportementales ».

Il s’agit par exemple des taxes sur les boissons alcooliques ou sur le tabac, lesquelles viennent financer la branche maladie et le Fonds de solidarité vieillesse.

Pour en savoir plus

  • CHAUCHARD (J.-P.), KERBOURC’H (J.-Y.) et WILLMANN (C.), Droit de la sécurité sociale, Issy-les-Moulineaux : LGDJ, 8e éd., 2018, 730 p.
  • Direction de la Sécurité sociale, Les chiffres clés de la Sécurité sociale 2017, éd. 2018, 46 p. [en ligne], disponible sur www.securite-sociale.fr
  • DUPEYROUX (J.-J.), BORGETTO (M.) et LAFORE (R.), Droit de la sécurité sociale, Paris : Dalloz, 18e éd., 2015, 1297 p.
  • KESSLER (F.), Droit de la protection sociale, Paris : Dalloz, 6e éd., 2017, 916 p.
  • MORVAN (P.), Droit de la protection sociale, Paris : LexisNexis, 9e éd., 2019, 1208 p.

 

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