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Les concours de la FPT

Dernière mise à jour : juin 2019

1. L’objet de la loi pénale, la détermination de l’infraction

L’article 111-1 du code pénal dispose que « les infractions sont classées, suivant leur gravité, en crimes, délits et contraventions». Les crimes sont donc les infractions les plus graves, les délits, des infractions de moyenne gravité et les contraventions, des infractions mineures. Cette classification tripartite des infractions est apparue pour la première fois dans le code de brumaire an IV, puis sera reprise dans le code de 1810 afin d’être pérennisée dans le code pénal de 1992. Elle constitue la base de la technique de tout notre droit pénal.

Cette classification permet de mettre en œuvre la hiérarchie des valeurs protégées (atteintes à la personne, atteintes aux biens, atteintes aux intérêts de la nation) en stigmatisant les infractions les plus graves par une qualification particulière et une peine sévère.

La classification tripartite, crimes, délits, contraventions, présente un intérêt majeur tant en droit pénal de fond qu’en droit pénal de forme (1.1). Néanmoins, cet intérêt tend à être relativisé de par les différents régimes applicables à certaines catégories (1.2).

1.1. Présentation et intérêt de la classification des infractions

  • Intérêt en matière constitutionnelle :

Il tient à la détermination de l’autorité compétente pour créer ou modifier les incriminations ainsi que les peines qui leur sont applicables. Seul le Parlement est compétent pour déterminer les crimes et les délits. La définition des contraventions relève du pouvoir réglementaire, c’est-à-dire le gouvernement. Cette répartition des compétences se déduit des articles 34 et 37 de la Constitution, affirmée par l’article 111-2 du code pénal.

  • Intérêts en droit pénal de fond :

Ils sont nombreux et se révèlent quant au champ d’application de la loi pénale dans l’espace. En effet, la loi pénale française est toujours applicable aux crimes commis à l’étranger par un Français ou à l’encontre d’une victime française. Pour les délits, elle n’est applicable que sous certaines conditions et elle n’est pas applicable pour les contraventions (Cf. fiche loi d’application dans l’espace).

En ce qui concerne la mise en œuvre de la responsabilité pénale, la classification permet de déterminer la nature de la faute recherchée. La faute est toujours intentionnelle pour les crimes, alors qu’en matière délictuelle elle peut consister en une négligence, ou une faute non intentionnelle (Cf. fiche élément moral de l’infraction). De même, la tentative de crime est toujours punissable alors qu’elle doit être expressément prévue par le législateur pour les délits. Enfin, la complicité est réprimée de manière générale pour les crimes et délits alors que pour les contraventions seules certaines formes de complicité sont répréhensibles.

Le régime des peines diffère suivant la nature de l’infraction. La récidive, facteur d’aggravation de la peine est prévue à titre général pour les crimes et les délits alors que pour les contraventions, il faut qu’un texte spécial d’incrimination la prévoit et sous certaines conditions (cf. fiche les peines). Pour les infractions en concours, le principe est que les peines peuvent se cumuler entre elles sauf en ce qui concerne les peines d’amende.

La réforme de 2017 a allongé les délais de prescription.

Le délai de la prescription de la peine est dorénavant de vingt ans pour les crimes, trente ans pour certaines crimes graves (terrorisme, traite des êtres humains), de six ans pour les délits et d’un an pour les contraventions. Le délai démarre à compter du jour où l’infraction a été commise.

Il convient de noter que les crimes contre l’humanité sont imprescriptibles.

La réforme de 2019 a admis dans un objectif d'accélération de la procédure, d’étendre l'amende forfaitaire délictuelle afin d’éviter le passage devant le juge. Elle sera désormais possible pour des délits tels que la vente non autorisée d'alcool, l'usage de produits stupéfiants, la vente à la sauvette, les délits routiers ou encore l'occupation en réunion des halls d'immeuble.

  • Intérêts en droit pénal de forme :

La compétence juridictionnelle dépend de la nature des infractions (cf. fiche acteurs institutionnels). Certaines règles de procédure sont dictées par la nature des infractions. Si l’infraction constitue un crime, elle fera obligatoirement l’objet d’une instruction préparatoire. Les délits le peuvent aussi mais pas les contraventions. Les modes de poursuites sont également dictés par la nature des infractions : la comparution immédiate n’est applicable qu’en matière délictuelle ou certaines procédures simplifiées, comme l’amende forfaitaire n’est prévue que pour la poursuite des contraventions. Enfin, le délai de prescription de l’action publique varie suivant la nature de l’infraction (cf. fiche action publique).

1.2. La portée relative de la classification

L’appartenance d’une infraction à l’une des trois catégories n’est pas définitive et peut être remise en cause. Classiquement, à chaque catégorie d’infraction est assimilé un régime spécifique : tribunal compétent, peine applicable, régime procédural. Toutefois, cette assimilation de la nature de l’infraction au régime applicable tend à s’amoindrir.

  • La répartition variable des infractions au sein de la classification :

Cette variabilité tient à l’évolution permanente de la qualification des infractions. En effet, une infraction considérée comme un crime hier, est un délit aujourd’hui par le biais d’une pénalisation de certains comportements ou encore d’une dépénalisation de certaines infractions.

C’est également le cas par le mécanisme de correctionnalisation judiciaire. C’est un mouvement de transformation de crimes en délits. L’inadéquation des qualifications criminelles nécessitent l’intervention des juridictions avant celle du législateur. Elles traitent alors des crimes comme des délits (exemple : phénomène de correctionnalisation judiciaire du viol en agression sexuelle). Le procédé est simple, il consiste à négliger une circonstance aggravante ou bien à passer sous silence un élément constitutif de l’infraction. Une tentative de meurtre sera qualifiée de violences volontaires en ne tenant pas compte de l’intention tendue vers le résultat, autrement dit du dol spécial (Cf. fiche élément moral de l’infraction).

Cette pratique est indispensable au fonctionnement de la justice pénale. Les cours d’assises sont dans l’incapacité de juger l’ensemble des infractions constituant des crimes du fait de la lourdeur de la procédure. C’est également un moyen pour adapter la réaction sociale aux circonstances particulières de chaque affaire, étant donné que les infractions sont définies de manière abstraite par le législateur. Elle permet enfin, de mettre en cohérence le droit pénal avec l’évolution de la société.

Longtemps illégale, cette pratique a été consacrée partiellement par la loi du 9 mars 2004, lorsqu’elle est faite par un juge d’instruction à l’issue de son instruction. Il saisit alors le tribunal correctionnel qui ne pourra pas soulever son incompétence selon l’article 469 alinéa 3 du code de procédure pénale.

  • Complexification des infractions au sein des catégories :

La pratique a laissé place à la complexité des régimes applicables aux infractions. À ce titre, le régime spécifique des contraventions de cinquième classe, contraventions les plus graves, se rapprochent de celui des délits si bien que la doctrine a développé le terme de « contraventions-délits ». Le mécanisme des peines alternatives leur est applicable, tout comme aux délits, leur répression est aggravée comme pour les délits. À l’audience, le siège est occupé par le procureur de la République et non l’officier du ministère public comme c’est en principe le cas pour les contraventions.

Ce mouvement trouve son pendant du côté des délits. En effet, le régime spécifique des délits punis de dix ans d’emprisonnement se rapproche des crimes. Qualifiés de « délits-crimes », la commission d’un délit puni de dix ans d’emprisonnement est assimilée à un crime en matière de récidive. De même, la période de sûreté est applicable automatiquement.

2. Les sources du droit pénal : légalité et souveraineté

L’article 8 de la Déclaration des Droits de l’Homme et du Citoyen (DDHC) consacre le principe de légalité criminelle : « Nul ne peut être puni qu’en vertu d’une loi établie et promulguée antérieurement au délit et légalement appliquée ». Ce principe met fin à l’arbitraire judiciaire qui régnait sous l’Ancien régime, qui laissait aux juges une grande latitude pour définir des comportements répréhensibles et fixer des peines. Désormais, seul le législateur est légitime à l’édiction de lois pénales. Ce principe, fondement moderne de notre droit pénal, constitue une garantie nécessaire contre l’arbitraire (2.1). Néanmoins, la loi, source en apparence exclusive, n’en demeure pas moins limitée par des normes supérieures (2.2).

2.1. Le principe de légalité criminelle

La valeur normative du principe de légalité démontre son intérêt (2.1.1). Il revêt une double signification. D’une part, il garantit une sécurité juridique dans un État de droit (légalité matérielle). D’autre part, il garantit la qualité de la loi pénale (légalité matérielle) (2.1.2).

2.1.1. La valeur normative du principe de légalité criminelle

Le principe de légalité criminelle a valeur constitutionnelle. Ce principe est inscrit à l’article 8 de la DDHC, qui a été intégrée au préambule de la Constitution du 4 octobre 1958. De plus, le Conseil Constitutionnel a rappelé sa valeur constitutionnelle dans la décision Sécurité- Liberté des 19 et 20 janvier 1981.

Par ailleurs de nombreux textes internationaux et européens ont repris ce principe : la Déclaration universelle des droits de l’Homme (DUDH), le pacte international relatif aux droits civils et politiques dans son article 15 et enfin la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales dans son article 7 (CESDH).

2.1.2. La légalité formelle

2.1.2.1. La loi, seule compétente dans la détermination des crimes et des délits

Dans son acception formelle, le principe de légalité criminelle signifie que les infractions et les peines applicables doivent être définies par la loi. Autrement dit, seul le parlement incarnant les représentants du peuple peut édicter les normes pénales.

Par conséquent, seule la loi est compétente pour déterminer les crimes et les délits et les peines qui leur sont applicables. Les articles 34 de la Constitution et 111-2 du code pénal posent la compétence du pouvoir législatif en matière de détermination des crimes et délits.

2.1.2.2. Le règlement, compétence limitée en matière de contravention

La compétence exclusive du législateur n’est pas exclusive de l’intervention du pouvoir réglementaire. En effet, d’après les articles 34 et 37 de la Constitution et 111-2 du code pénal, le pouvoir réglementaire est compétent pour déterminer les contraventions. Le règlement visé à l’article 111-2 du code pénal recouvre les décrets pris par le Premier ministre et ceux délibérés en Conseil des ministres pris par le Président et contresignés par le Premier ministre.

Chaque fois qu’un décret édicte une contravention, il doit être pris après avis du Conseil d’État. Ainsi, les décrets simples, les arrêtés préfectoraux et municipaux ne peuvent pas édicter de contraventions. Par conséquent, bien que la légalité criminelle soit amputée, il n’en demeure pas moins que des garde-fous sont instaurés limitant la portée du pouvoir réglementaire.

Il convient d’ajouter que le pouvoir exécutif n’est pas libre. Par une décision du 28 novembre 1973, le Conseil Constitutionnel est venu définir la compétence du pouvoir exécutif en matière de détermination des contraventions : « la détermination des contraventions ne relève du pouvoir réglementaire que lorsque les dites peines ne comportent pas de mesures privatives de liberté ». Le pouvoir réglementaire n’est donc compétent que pour déterminer les peines applicables dans la limite et selon les distinctions établies par la loi. Les peines susceptibles d’être encourues en matière contraventionnelle sont définies par la loi aux articles 131-12 et 131-40 du code pénal. De plus, la loi détermine la division de contraventions en cinq classes qui correspondent à la gravité de l’infraction commise.

2.1.2.3. L’interdiction pour le juge pénal d’édicter la norme pénale

Le principe de légalité criminelle exclut toute influence de la jurisprudence. Le juge ne peut donc pas s’ériger en législateur, cela contreviendrait au principe de séparation des pouvoirs. Par conséquent, le juge pénal ne peut pas édicter d’incriminations pénales. Il est chargé, en revanche de déterminer l’exacte qualification des faits et de rechercher le texte qui est applicable.

En ce qui concerne les peines, en vertu du principe d’individualisation des peines, le juge doit choisir la nature de la peine, son quantum et ses modalités d’exécution. Toutefois, le juge n’intervient que dans les limites fixées par la loi. À titre d’exemple, la loi lui interdit de cumuler certaines peines entre elles.

Il en ressort également que le juge est soumis à une interprétation stricte de la loi pénale, d’après l’article 111-4 du code pénal. Autrement dit, le juge doit s’en tenir à la loi uniquement, ce qui exclut le raisonnement par analogie (raisonnement qui consiste à appliquer la loi pénale à des comportements qu’elle ne vise pas directement mais qui ont des éléments de similitude). En revanche, l’interprétation téléologique est admise. Elle consiste à se référer à la volonté déclarée ou présumée du législateur. Par exemple, elle est très utile pour donner un sens aux anciens textes. La jurisprudence, en 1912 avait considéré que l’électricité était susceptible de vol, ce qui aujourd’hui a été consacré par le législateur.

Il convient toutefois d’ajouter que la position européenne diverge de celle de la France quant à la place accordée à la jurisprudence. En effet, dans plusieurs décisions ne concernant pas la France, la Cour européenne des droits de l’Homme (CEDH) a eu une conception large de la légalité qui renvoyait à l’ensemble du droit en vigueur (réglementaire, législatif et jurisprudentiel). À cet égard, dans un arrêt rendu le 10 octobre 2006, Pessino c/ France, elle soumet la jurisprudence à l’application du principe de non-rétroactivité de la loi pénale.

2.1.3. La légalité matérielle

Le principe de la légalité criminelle impose que les infractions soient clairement définies. Le citoyen doit savoir ce qui est interdit et ce qu’il encourt avant d’agir. La sanction de son action doit être prévisible. Cette prévisibilité implique de la clarté : c’est ce que l’on appelle la légalité matérielle. On retrouve cette exigence :

  • Au niveau constitutionnel :

Dans sa décision des 19 et 20 janvier 1981, Sécurité-Liberté, le Conseil Constitutionnel pose le principe selon lequel une loi doit être rédigée en termes clairs et précis. De plus, cette exigence est renforcée depuis l’instauration de la question prioritaire de constitutionnalité (article 61-1 de la Constitution) qui a permis de censurer des dispositions pénales aux qualifications imprécises (inceste).

  • Au niveau de la Cour Européenne des droits de l’Homme :

Dans un arrêt Cantoni c/ France, la CEDH indique que la loi doit être accessible, précise et prévisible, conformément à l’article 7 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’Homme (CESDH).

  • Par les juridictions pénales :

Si les textes sont imprécis, les juridictions ont plusieurs recours pour y remédier et les écarter. S’il s’agit d’une loi, elles ont compétence pour effectuer un contrôle de conventionnalité et écarter l’application d’une disposition qui n’est pas claire au sens de l’article 7 de la CESDH. S’il s’agit d’un règlement, les juridictions pénales peuvent contrôler la clarté d’un texte par le biais de l’exception d’illégalité de l’article 111-5 du code pénal et ainsi écarter l’application du règlement.

2.2. La hiérarchie des normes pénales

Le principe de légalité criminelle implique que les lois pénales soient conformes aux normes qui lui sont supérieures. Il convient d’envisager d’une part la primauté des normes supérieures sur la loi et le règlement (2.2.1) et d’autre part celle de la Constitution (2.2.2).

2.2.1. La subordination des lois et règlements aux normes internationales

L’article 55 de la Constitution pose le principe de supériorité des normes internationales sur les lois. Il comprend le droit originaire composé des traités et le droit dérivé composé des actes unilatéraux pris par les institutions de l’Union à savoir, les règlements et directives. Ce principe impose la conformité des lois pénales nationales aux normes internationales. Le contrôle s’effectue par les juridictions nationales qui sont compétentes et doivent écarter une disposition contraire.

En ce qui concerne le droit communautaire, il est d’application directe (il crée des droits et des obligations directement pour les personnes physiques et morales des États membres) et prime sur les lois internes. Le contrôle de conformité des lois aux règlements communautaires peut être effectué par les juridictions nationales mais aussi par la Cour de justice de l’Union européenne par le biais d’un recours en manquement de l’État.

En ce qui concerne le droit européen des droits de l’Homme, il obéit également au principe de primauté et d’applicabilité directe. Pour veiller à la conformité, plusieurs mécanismes peuvent être mis en œuvre :

  • La CEDH peut tout d’abord être saisie par un État ou une personne physique ou morale. Dans cette hypothèse, la CEDH condamne l’État. Les juridictions peuvent alors écarter les dispositions qui ont été jugées contraires à la Convention.
  • C’est par le biais du contrôle de conventionnalité que les juridictions pénales vont faire prévaloir les normes conventionnelles sur les lois internes.

2.2.2. La subordination des lois à la Constitution

La loi et le règlement doivent être conformes à la Constitution ainsi qu’à l’ensemble du bloc de constitutionnalité (Préambule de la Constitution, Préambule de la Constitution de 1946, DDHC et les principes fondamentaux reconnus par les lois de la République). Cette exigence ressort du contrôle de constitutionnalité effectué par le Conseil Constitutionnel mais aussi par la mise en œuvre de la question prioritaire de constitutionnalité depuis la révision constitutionnelle du 23 juillet 2008. Ainsi, le contrôle de constitutionnalité des lois a été élargi et peut s’effectuer après la promulgation d’une loi.

2.2.3. La subordination, du règlement à la Constitution et à la loi

Le contrôle de légalité opéré sur un règlement s’effectue par le juge administratif par le biais du recours pour excès de pouvoir. Il permet de conformer un acte administratif à la loi, voire plus largement à une norme supérieure étant donné que les juridictions administratives sont également compétentes pour exercer un contrôle de conventionnalité.

L’article 111-5 du code pénal donne compétence au juge pénal, par le biais de l’exception d’illégalité, de vérifier la validité d’un acte réglementaire. Le plus souvent, la contestation est soulevée par un mis en cause sur un règlement qui fonde les poursuites contraventionnelles. La juridiction pénale apprécie la légalité d’un acte administratif, qu’il soit réglementaire ou individuel. Elle a également compétence pour l’interpréter.

Les causes d’illégalité sont nombreuses : incompétence de l’auteur de l’acte, violation de la loi. Si les juridictions pénales constatent l’irrégularité de l’acte, elles peuvent l’écarter.

3. La détermination de la loi pénale applicable (qualification des faits)

La qualification pénale correspond à l’opération par laquelle le juge va faire entrer les éléments de faits dans les catégories d’infractions afin de leur appliquer un régime de peine. La qualification découle directement du principe de légalité étant donné qu’un comportement ne peut entrer dans une catégorie d’infraction que si cette dernière a été préalablement établie par la loi. À défaut de qualification pénale, le procureur classera sans suite ou le juge d’instruction rendra une ordonnance de non-lieu.

Il convient de préciser que le principe non bis in idem, consacré à l’article 6 du code de procédure pénale, prévoit que nul ne peut faire l’objet d’une double déclaration de culpabilité pour les mêmes faits. Pour ce faire, alors que plusieurs qualifications peuvent entrer en conflit, des règles sont organisées en matière de qualifications exclusives (3.1) et de concours de qualification (3.2).

3.1. Les qualifications exclusives

Les qualifications exclusives supposent que deux qualifications sont envisageables, mais elles s’excluent l’une de l’autre. Le juge ne devra donc en retenir qu’une. Elles sont variées :

  • Les qualifications alternatives :

Elles supposent une opposition dans leurs éléments constitutifs. C’est le cas de l’homicide volontaire et involontaire. Les deux infractions sont exclusives l’une de l’autre de par leur élément moral qui est différent.

  • Les qualifications redondantes :

Une qualification est redondante lorsqu’elle recouvre des faits inclus dans une autre qualification. C’est l’hypothèse de la présence d’une règle générale et une règle spéciale : il convient dans cette hypothèse de ne retenir que la qualification spéciale.

  • Les qualifications incompatibles :

Il y a incompatibilité de qualifications, lorsque la seconde infraction est la conséquence logique de la première. Le recel suit un vol, il en est la conséquence. Les infractions ne seront pas cumulées pour défaut de pluralité d’intention. Il en va de même de l’abus de confiance suivi du recel.

3.2. Les concours de qualification

Plusieurs infractions sont susceptibles d’entrer en concours. Autrement dit, plusieurs faits sont commis dans des laps de temps restreint, ou encore un fait est susceptible d’entraîner plusieurs qualifications. Dans ces hypothèses, le juge pénal devra qualifier la situation de concours d’infraction. Encore convient-il de déterminer de quel concours il s’agit : concours réel (3.2.1) ou bien concours idéal (3.2.2).

3.2.1. Le concours réel

Selon l’article 132-2 du code pénal il y a concours réel d’infraction « lorsqu’une infraction est commise par une personne avant que celle-ci ait été définitivement condamnée pour une autre infraction ». Il y a donc deux infractions distinctes commises qui ne sont pas séparées par un jugement de condamnation.

Toutefois, la jurisprudence a élargi le domaine d’application du concours réel : la question s’est posée de savoir s’il pouvait y avoir concours d’infraction alors qu’un seul fait délictueux a été commis. Par un arrêt Ben Haddadi, du 3 mars 1960 la chambre criminelle de la Cour de cassation a posé le principe selon lequel doit être qualifiée de concours réel la situation dans laquelle une action délictueuse unique et matériellement indivisible est susceptible de revêtir des qualifications pénales protégeant des valeurs sociales distinctes : en l’espèce, l’individu avait jeté une grenade dans un café, ce qui avait entraîné des dommages corporels et matériels. La chambre criminelle retient la double déclaration de culpabilité du chef de tentative d’assassinat et de tentative de destruction sur le fondement que les valeurs protégées sont différentes (personne et bien).

Le régime du concours réel a des conséquences sur les peines encourues. Outre la pluralité de déclarations de culpabilité qu’il génère, l’article 132-3 du code pénal prévoit que chacune des peines encourues au titre des infractions retenues peuvent être prononcées sauf si elles sont de même nature. Dans cette dernière hypothèse, une seule sera prononcée dans la limite du maximum légal le plus élevé. Les peines de nature différente peuvent donc se cumuler entre elles.

3.2.2. Le concours idéal

Le concours idéal ne s’envisage que pour un fait délictueux matériellement indivisible ou un fait unique susceptible de revêtir des qualifications protégeant des valeurs sociales identiques.

La qualification de concours idéal revêt un régime moins sévère que celui du concours réel.

Compte tenu de l’application du principe non bis in idem, un même fait ne peut entraîner une double déclaration de culpabilité. Par conséquent, une seule qualification doit être retenue. Le fait unique doit donc donner lieu à la plus haute expression pénale, c’est-à-dire l’infraction dont la peine est la plus sévère.

Le principe d’unité de qualification revêt une exception. Lorsque le fait unique a entraîné des dommages de gravité différente pour les victimes, la chambre criminelle considère qu’il convient de prononcer une déclaration de culpabilité pour chacune des infractions en concours.

Auteur(s) :

COULLET Camille et DI TELLA Camille

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