Les conditions générales de la possession

Modifié le 16 mai 2023

Famille :

Les concours de la FPT

Par Frédéric ARCHER, docteur en droit privé et sciences criminelles, Maître de conférences H.D.R. Université Lille 2, Codirecteur de l'Institut de criminologie de Lille.
Dernière mise à jour : février 2019

 

La possession correspond à une apparence de propriété qui se manifeste comme un rapport de fait entre une chose et une personne par laquelle celle-ci a la possibilité d’accomplir sur le bien des actes qui, vu de l’extérieur, correspondent à l’exercice d’un droit.

Dans une telle situation, peu importe que la personne soit ou non propriétaire du bien. Il est vrai que le possesseur est très souvent le propriétaire mais, si ce n’est pas le cas, le possesseur va pouvoir acquérir le droit de propriété du bien sous certaines conditions.

L’intérêt pratique de la possession est l’acquisition du droit de propriété mais aussi, de prouver ce dernier.
Il est très important de distinguer la possession de la détention précaire. En effet, la détention précaire suppose que celui qui a la chose entre ses mains la détient en vertu d’un droit personnel (contrat de bail, prêt…) et doit donc la restituer à son véritable propriétaire à l’issue du terme. Le détenteur précaire n’est jamais possesseur du bien, il ne peut en aucun cas en acquérir la propriété de cette façon.

Exemple pratique où l’on rencontre la notion de possession : une maison est en indivision entre deux personnes. L’une décide de vendre, mais pour que l’acte soit valable il faut le consentement des deux. L’acquéreur croit devenir propriétaire du bien or, il en est possesseur pour une partie car la vente nécessitait l’accord des deux co-indivisaires. Si celui qui n’a pas consenti à la vente ne conteste pas l’acte en justice, l’acquéreur va pouvoir acquérir la totalité du droit de propriété par la possession du bien après un certain délai.

1. Eléments constitutifs de la possession

Pour exister la possession doit réunir deux éléments de manière cumulative : le corpus et l’animus.

1.1. Le corpus : élément matériel de la possession

Le corpus se traduit comme l’exercice d’un pouvoir de fait sur la chose. C’est le fait d’accomplir des actes matériels sur la chose.
Exemple : habiter un appartement, cultiver un champ, entretenir un mur, conduire une voiture…
Le corpus n’est pas nécessairement réalisé par le possesseur en personne car le Code civil admet que l’on peut posséder par le corpus d’autrui. Concrètement si le possesseur loue son bien, son locataire va exercer le corpus en ses lieux et place.

1.2. L’animus : élément psychologique de la possession

L’animus est l’élément moral ou intellectuel ou encore psychologique de la possession. Il se traduit concrètement comme la manifestation de la volonté de se comporter comme si l’on était le propriétaire du bien.
Evidemment cet élément est difficile à prouver, c’est la raison pour laquelle la loi permet d’avoir recours à une présomption selon laquelle l’établissement du corpus suppose l’animus sauf preuve contraire.
Si l’animus est perdu la possession prend fin. En effet l’exercice du seul corpus correspond à la situation d’un détenteur précaire (qui est obligé de restituer la chose) mais pas un possesseur (qui a vocation à acquérir la propriété du bien).
L’association des deux éléments constitutifs, que sont le corpus et l’animus, est indispensable pour caractériser l’existence de la possession. Mais pour que cette dernière produise des effets de droit encore faut-il qu’elle satisfasse aux conditions d’efficacité.

2. Conditions d’efficacité

Le Code civil impose, à l’article 2261, la réunion de certaines conditions d’efficacité pour que la possession puisse produire ses conséquences juridiques.
Ce texte est cependant ambigu car il mêle des conditions d’existence aux conditions d’efficacité, il ne peut donc être étudié en l’état, il importe avant tout de le clarifier et de l’expliquer pour pouvoir en retenir l’essentiel.
Pour produire des effets de droit, l’article 2261 du Code civil considère que la possession doit être :

  • continue et non interrompue ;
  • paisible ;
  • publique ;
  • non-équivoque ;
  • exercée à titre de propriétaire.

Pour mieux comprendre ce que sont les conditions d’efficacité, il importe d’isoler les conditions d’existence qui sont contenues dans ce texte.
Ce texte contient deux conditions d’existence de la possession qui sont :

  • L’exercice de la possession à titre de propriétaire : ce n’est pas une condition d’efficacité mais bien le rappel d’une condition d’existence. En effet, elle ne fait que traduire la nécessité de l’animus qui est la volonté de se comporter comme le propriétaire du bien.
  • La non-interruption : une possession interrompue n’existe plus car un des éléments constitutifs fait défaut (ex. : perte de l’animus).

Au sens strict, au regard des conditions d’efficacité, la possession doit donc être :

  • Continue (à bien distinguer de la non interruption) : l’usage sur la chose doit être exercé de manière normale et régulière lorsque l’occasion se présente. A défaut la possession serait viciée par la discontinuité et serait alors inefficace.
  • paisible : le possesseur ne doit pas être entré en possession par la force ou la contrainte. A défaut la possession serait viciée du vice de violence et serait alors inefficace.
  • publique :
    La possession doit être exercée sans dissimulation, de manière apparente, au vue et au su des tiers. A défaut la possession serait viciée par la clandestinité et serait alors inefficace.
  • non-équivoque
    La possession ne doit pas être ambigüe. Le possesseur doit manifester clairement le corpus et l’animus. A défaut la possession serait viciée du vice d’équivoque et serait alors inefficace.

3. Conséquences de la possession

D’une manière générale, la possession produit deux conséquences :

  • elle permet d’acquérir le droit de propriété du bien possédé ;
  • elle permet de prouver le droit de propriété : le possesseur est en effet présumé propriétaire jusqu’à preuve du contraire.
    Lorsque la possession produit ses effets on parle de possession utile. Si ce n’est pas le cas, soit parce qu’elle n’existe pas ou qu’elle est atteinte d’un vice, on parle de possession viciée qui est totalement inefficace.
    Il est très important de distinguer la possession portant sur un bien immeuble et celle concernant un bien meuble.

Le possesseur peut être de bonne ou de mauvaise foi : il est considéré comme étant de bonne foi lorsqu’il ignore, au moment de l’entrée en possession, qu’il n’est pas le véritable propriétaire du bien. Les éléments constitutifs sont alors sincères et la possession permettra donc l’acquisition plus rapide du droit de propriété.
En revanche, si lors de l’entrée en possession, le possesseur sait parfaitement qu’il n’est pas propriétaire du bien, il est considéré comme de mauvaise foi. Il pourra toujours acquérir le droit de propriété mais dans des conditions plus strictes.

Tags :

Accès thématique

Accès famille

© 2017 CNFPT