Par Marc Baudino
Dernière mise à jour : novembre 2018

Introduction

Les espaces scéniques dédiés au spectacle vivant (salles de concerts, théâtres…) démontrent, dans l’accueil de spectacles, une grande capacité d’adaptation et de modulation. Ces lieux doivent être capables de recevoir des spectacles de nature et de dimensions relativement différentes. Les réalités sociales et économiques ne permettant pas à chaque secteur culturel de diffusion de spectacle d’avoir son propre lieu consacré (à ses spécificités), il est courant d’y trouver en plus des activités à dimension artistique en tout genre, des réunions, des lotos, des repas et bien d’autres choses.
Cette polyvalence doit être néanmoins bien réfléchie car dans le cadre d’un ERP, l’activité accueillie peut faire évoluer la destination du bâtiment (accueil de centre de loisirs, soirées dansantes…) et de ce fait lui affecter une autre classification. Cette nouvelle classification nécessitera sûrement d’autres aménagements que ceux dont le lieu est pourvu de par sa classification officielle.
Ainsi, des moyens de secours différents peuvent être nécessaires, une jauge plus restreinte de publics admissibles peut y être déterminée, etc. Il sera important de consulter l’avis d’un préventionniste ou d’être en mesure de déterminer ces changements afin d’accueillir les publics dans de bonnes conditions de sécurité.
De plus, les montages et démontages de certains matériels techniques qui sont des éléments que l’on trouve en fixe dans certaines structures culturelles finissent par les fragiliser et imposent aux personnels des temps de travail importants. Temps qu’ils ne consacreront pas à la maintenance d’autres équipements plus sensibles (qu’il faudra changer plus souvent).
Pourtant, cette polyvalence va permettre aux multiples publics y participant de s’approprier le lieu, le rendant plus accessible pour certains, le faisant découvrir pour d’autres… et peut-être ainsi en augmenter la fréquentation sur des spectacles, le lieu en lui-même n’étant plus un frein. Ce qui demande une vraie réflexion autour du fonctionnement et de la gestion de ces espaces. La mise en place d’un « règlement intérieur d’exploitation », approuvé par le conseil municipal ou le conseil d’administration selon l’exploitant, public ou privé, qui permet de décider l’accueil des activités supplémentaires dans le respect de la réglementation, du cadre de travail des salariés, etc. paraît fort utile.

1. Gestion et exploitation de salle (et du parc de matériels)

1.1. Le choix du mode de gestion d’un équipement culturel

Les collectivités et les responsables de structures culturelles disposent de multiples choix de modes de gestion juridiques : 

  • gestion dans le cadre d’organismes à but non lucratif (associations 1901 ou fondations),
  • sociétés commerciales (SARL, SA, SCOP, SCIC1, Société d’économie mixte),
  • modes de gestion publique (régie directe, régie dotée de l’autonomie financière, régie personnalisée, groupement d’intérêt public à objet culturel, établissement public national, Etablissement Public de Coopération Culturelle (EPCC). 

Le statut juridique d’une structure dépend de la nature de l’activité exercée, civile ou commerciale, à but lucratif ou non. La question du mode de gestion se pose souvent pour les activités de service public.

1.2. Gestion et maintenance du parc de matériel et des locaux d’exploitation

Les prestations de maintenance peuvent être réparties en deux parties :
La première comprend les prestations de maintenance préventive qui ont pour objet le maintien des matériels en conformité avec les règlements spécifiques et en parfait état de fonctionnement, d'assurer l'entretien régulier des organes mécaniques ou électriques et de déceler, pour les prévenir, des défauts d'usure éventuels.
Cet objectif est assuré par le passage planifié et périodique de techniciens spécialisés aptes à procéder aux vérifications.
La seconde comprend les prestations de maintenance corrective ainsi que des prestations de changement nécessaire de fournitures (non prévues au budget primitif pour les collectivités). Elles ont pour objet la remise en état de marche des matériels après un dysfonctionnement constaté.
Cet objectif est assuré, au coup par coup (à la demande de la personne publique pour une collectivité), par des techniciens spécialisés, aptes à procéder aux diagnostics et aux prestations de dépannage, de réparation et de remplacement des éléments endommagés.
Les techniciens du spectacle participent le plus souvent à l’entretien et la maintenance des matériels. A contrario, certains contrôles et entretiens font souvent l’objet de marchés publics (exemple la machinerie d’un théâtre, le contrôle des extincteurs, la partie électrique, etc.).
Les contrôles et les vérifications techniques ne doivent pas être considérés seulement comme un acte administratif réglementaire. Ils sont aussi l’occasion de faire un état des installations et de mettre en évidence les défauts qui pourraient être sources de danger pour les personnes et les biens.

1.3. Conditions de maintenance, de gestion et d’exploitation des salles

Dans les Etablissements Recevant du Public (ERP), les contrôles et les vérifications techniques ainsi que leurs périodicités, sont réglementés (Arrêté du 19 novembre 2001). L’exploitation d’un ERP comprend le respect d’un grand nombre de cadres réglementaires.
L’exploitant est le premier responsable de la sécurité (incendie et de panique) dans l’établissement. L’existence d’un dispositif de contrôle par la commission de sécurité n’en diminue pas cette responsabilité.
Outre l’obligation de respect des procédures administratives relatives à la délivrance des autorisations de travaux et à la réception de travaux, l’exploitant est soumis aux règles de sécurité comprises dans le Code de la Construction et de l’Habitation (CCH) et dans le règlement de sécurité des ERP.
Il doit solliciter auprès de la mairie le passage de la commission de sécurité pour la réception des travaux. Il est tenu d’assister aux visites de cette dernière.
Les objectifs de ces visites sont de :

  • vérifier le respect des dispositions du règlement de sécurité,
  • vérifier l'application des dispositions permettant l'évacuation des personnes à mobilité réduite,
  • s'assurer que les vérifications techniques réglementaires ont été effectuées,
  • suggérer les améliorations ou modifications à apporter,
  • étudier les éventuelles mesures d'adaptation qu'il y a lieu d'apporter.

L’exploitant a l’obligation de s’assurer que les installations ou équipements sont établis, maintenus et entretenus, en conformité avec le règlement de sécurité. Il doit ainsi procéder périodiquement à leur contrôle. Les procès verbaux et comptes rendus des vérifications sont tenus à la disposition de la commission de sécurité.
Les établissements des 1ère, 2ème, 3ème et 4ème catégories doivent être visités périodiquement par la commission de sécurité compétente, selon leur type et leur catégorie. En type L les ERP des 3 premières catégories seront vérifiés tous les 3 ans et en 4ème catégorie tous les 5 ans. Selon le même principe que les visites périodiques, des visites inopinées peuvent être effectuées (c’est assez rare).
Selon la catégorie et le type de l’établissement, les contrôles techniques de certaines installations doivent être réalisés, selon une périodicité fixée, soit par des organismes agréés, soit par des techniciens compétents2 (le Système de sécurité incendie (SSI), le désenfumage, les extincteurs, l’électricité ainsi que l’éclairage de sécurité et d’évacuation, le chauffage, les équipements de travail, etc.).
Par ailleurs, l’exploitant doit présenter à la commission le registre de sécurité3 qui contiendra notamment les consignes d'évacuation prenant en compte les différents types de handicap, mais aussi les rapports et attestations faisant suite à ces vérifications énoncées ci-dessus, qui doivent y être annexés.
Pour les ERP de type L avec un espace scénique, de 1ère et 2ème catégories, ou un espace scénique intégré :

Installations techniquesPériodicité des contrôlesPersonne habilitée à procéder au contrôle
Désenfumage, chauffage, gaz, grandes cuisines, ascenseurs, escaliers mécaniques et trottoir roulant et moyens de secourscontrôle annuelcontrôle tous les 3 ans
technicien compétentorganisme agréé
Avant chaque spectacle dans un espace scénique intégré à la salle : les systèmes de fixation des décors mobiles propres au spectacle doivent être contrôlés par un OA

Concernant des aménagements ou des modifications à apporter à un établissement, tous les travaux qui ne sont pas soumis au permis de construire ne peuvent être exécutés qu’après autorisation du Maire (Code de la Construction et de l’Habitation).

1.4. Affichage obligatoire

Le code du travail oblige tout employeur à afficher un certain nombre de documents dans les locaux utilisés par les salariés :

  • les adresses et numéros d’appel utiles : SAMU, sapeurs-pompiers, gendarmerie, centre antipoison,
  • les consignes sur la conduite à tenir en cas d’incendie et les plans d’évacuation4,
  • l’avis relatif au contrôle de sécurité5,
  • le tableau des horaires de travail du personnel,
  • le tableau des congés et des repos hebdomadaires du personnel,
  • l’adresse et le numéro de téléphone de l'inspection du travail compétente ainsi que le nom de l'inspecteur compétent,
  • l’adresse et le numéro de téléphone du médecin du travail ou du service de santé au travail compétent pour l'établissement,
  • l’interdiction de fumer dans les lieux affectés à un usage collectif.

2. Organisation et gestion d’un service

2.1. Gestion et encadrement d’un service

2.1.1. Le service de sécurité incendie

Un service de « représentation » composé de personnels formés6 vient en complément du service de sécurité incendie pendant la durée des spectacles.
L'organisation de ces services est déterminée par la nature de l'activité. Les agents du service de représentation doivent connaître l'établissement et être munis notamment de moyens de communication. Ils seront plus particulièrement chargés :

  • de la surveillance de la salle et de la scène,
  • d'assurer la vacuité et la permanence des cheminements d'évacuation jusqu'à la voie publique.

Toutes les personnes désignées doivent avoir reçu une formation de sécurité incendie. La composition du service de sécurité incendie et de représentation peut être modifiée, après avis de la sous-commission départementale pour la sécurité contre les risques d'incendie et de panique dans les ERP.

2.1.2. Responsable d’équipe technique

Une des missions principales d’un responsable technique dans une salle de spectacle consiste à coordonner l’ensemble des interventions techniques (internes ou externes), la gestion des plannings d’utilisation du lieu en relation directe avec les prestataires, les régisseurs, les équipes artistiques accueillies, les salariés permanents et intermittents techniques et les services de sécurité internes et/ou externes.
Ses missions consistent aussi à gérer la maintenance de l’équipement technique scénique et de tout le matériel dont l’équipement est propriétaire ou celui qui est loué pour les manifestations, faire la régie des spectacles (responsable technique de la préparation, de l'exploitation et de la coordination des manifestations) et veiller à la sécurité des publics. De ce fait, il est nécessaire qu’il ait reçu une formation en sécurité incendie.
Exemple de tâches :

  • préparer, valider la faisabilité technique des manifestations et les planifier en coordination avec la direction,
  • superviser l’installation du matériel des artistes et de tout autre intervenant «spectacle» (réception, mise en place et enlèvement des équipements et des décors éventuels),
  • préparer le budget technique annuel et les budgets techniques des manifestations (locations, recrutement, renouvellement des stocks, entretien du parc « maison »...),
  • assurer la planification et l'organisation du travail de l'équipe technique permanente, intermittente et des prestataires (planning, répartition des tâches, recrutement, formation...),
  • assurer l’encadrement et la responsabilité des équipes techniques permanentes, intermittentes et veiller aux interventions des organisateurs externes,
  • assurer les permanences de coordination et sécurité sur les spectacles,
  • déterminer les conditions de mise en œuvre des matériels et les besoins en investissement,
  • assurer l’accueil et l’encadrement des productions et des artistes lors des manifestations,
  • assurer l’entretien (vigilance et maintenance) du lieu en relation avec les services du bâtiment et/ou les équipes et entreprises spécialisées.

2.2. Dispositif d’accueil des publics

Il est essentiel de réserver le meilleur accueil aux spectateurs. Un accueil de qualité passe par le respect et la mise en place de certains aspects :

  • L’hygiène : mettre des toilettes à disposition, des points d’eau gratuits, des poubelles sur le site, assurer la propreté du lieu et des espaces.
  • La sécurité : dimensionner un Dispositif Prévisionnel de Secours à personnes (DPS), faciliter l’évacuation (éviter les culs de sac et les sols glissants, flécher les circulations et les accès…), prévoir des aires de stationnement pour les véhicules, encadrer les enfants, accompagner les handicapés, se renseigner sur les prévisions météo (Météo-France), garantir l'accès des services de secours, assurer un service d’ordre, le cas échéant en référence au décret du 31 mai 1997 (manifestations à but lucratif). Ce dernier devra être « briefé » quant aux publics accueillis et à leurs spécificités s’il y a lieu.
  • Les secours à personne : selon le type de manifestations, il faut envisager la présence des pompiers et/ou de la sécurité civile et avoir sous la main les numéros d’appel d’un médecin de garde.
  • Veiller au niveau de température de la salle (chauffage en hiver et bonne ventilation l’été.
  • Un vestiaire peut être mis en place.
  • En cas de pluie, il faut prévoir un dispositif qui permette de ne pas laisser les publics attendre à l’extérieur (avancer l’ouverture des portes, laisser entrer les spectateurs dans le hall (à l’abri), gérer les parapluies en consigne, etc.
  • La mise en place d’une buvette (même sans alcool) reste un espace de partage et de convivialité entre les publics qui pourront y attendre le début du spectacle et/ou en discuter entre eux à la fin.
  • La fluidité du dispositif d’entrée, de la « fouille » s’il y a lieu, le temps d’attente à la billetterie, au contrôle des billets et le placement des spectateurs en salle si besoin doivent être des moments réfléchis.
  • La mise à disposition d’un « espace fumeur » à l’extérieur, à proximité, doit aussi être prévue.
  • La qualité du système de sonorisation et des éclairages de scène est importante.

2.3. Rapport avec le voisinage

Entretenir de bons rapports avec le voisinage est primordial dans l’exploitation d’un lieu de spectacle. Les manifestations sont produites dans des espaces de temps de loisir, il faut donc veiller à ce que le plaisir des uns ne devienne pas le cauchemar des autres.
En effet, un spectacle peut engendrer des répercussions, certaines directes (niveau sonore important du spectacle proposé en lui-même), d’autres induites ou indirectes (le stationnement et la circulation autour du site peuvent vite devenir compliqués, les cris des publics dans la rue après le spectacle, etc.).
Depuis 1992, la gestion sonore est soumise à la première loi sur les nuisances sonores. Depuis, la législation française s’est dotée d’un panel de mesures visant à limiter les nuisances liées au bruit7.
Les lieux de spectacle qui diffusent de la musique sont concernés par ces dispositions législatives qui instaurent un grand nombre de réglementations : limitation du niveau sonore en salle8, nouvelles normes de construction des lieux dédiés à la diffusion, mesures de protection des habitants mitoyens…
Le dialogue restant un moyen essentiel de bon voisinage, un travail de médiation est à mettre en place. Il peut s’agir de connaître les goûts artistiques des « voisins » et ainsi de pouvoir les inviter à des manifestations choisies leur correspondant ; ou encore d’accueillir dans le lieu, les réunions du « comité de quartier », d’organiser (ou d’accueillir) la « fête des voisins », de disposer un agent du service sécurité « malveillance » sur l’extérieur de la salle après 22h00, afin de sensibiliser les publics sortant du spectacle quant au respect du sommeil de certains, etc.

  1. ^ SARL : Société A Responsabilité Limité / SA : Société Anonyme / SCOP : Société Coopérative et Participative / SCIC : Société Coopérative d'Intérêt Collectif.
  2. ^ Ne pas confondre avec les opérations d’entretien qui peuvent être effectuées par le personnel de l’établissement ou par une entreprise.
  3. ^ Article R. 123-51 du code de la construction et de l'habitation. Les exploitants d’ERP sont tenus de disposer et de mettre à jour leur registre de sécurité sur lequel sont reportés les renseignements indispensables à la bonne marche du service de sécurité et en particulier : l’état du personnel chargé du service incendie, les diverses consignes générales et particulières établies en cas d’incendie, les dates des divers contrôles et vérifications ainsi que les observations auxquelles ceux-ci ont donné lieu et les dates des travaux d’aménagement et de transformation, leur nature, le nom du ou des entrepreneurs (et s’il y a lieu de l’architecte ou du technicien chargé de surveiller les travaux). Le registre de sécurité n’est exigé que pour les ERP du 1er groupe et les ERP de 5ème catégorie disposant d’un local à sommeil.
  4. ^ Le bon état et la mise à jour des plans d’évacuation et des plans destinés aux sapeurs pompiers doivent être vérifiés chaque fois qu’un changement intervient dans l’établissement.
  5. ^ Dans tout ERP doit être affiché d’une façon apparente, près de l’entrée principale, un « avis » relatif au contrôle de la sécurité.
  6. ^ Conformément aux dispositions de l'article MS 48.
  7. ^ Loi n° 92-1444 du 31 décembre 1992, loi « Royal ».
  8. ^ Ministère de l'aménagement du territoire et de l'environnement, Décret no 98-1143 du 15 décembre 1998 relatif aux prescriptions applicables aux établissements ou locaux recevant du public et diffusant à titre habituel de la musique amplifiée, en aucun endroit, accessible au public, de ces établissements ou locaux, le niveau de pression acoustique ne doit dépasser 105 dB (A) en niveau moyen et 120 dB en niveau de crête.
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