Par Vincent Chrétien
Dernière mise à jour : octobre 2019

1. Un contexte réglementaire porteur

1.1. Les lois du Grenelle de l’environnement

Loi Grenelle 1 (3 août 2009) et Loi Grenelle 2 (12 juillet 2010)
La loi prévoit des mesures dans six chantiers majeurs dont la Préservation de la biodiversité avec des objectifs :

  • Assurer un bon fonctionnement des écosystèmes en protégeant les espèces et les habitats ;
  • Elaborer la Trame verte et bleue (TVB) ;
  • Rendre l’agriculture durable en maîtrisant les produits phytopharmaceutiques et en développant le bio ;
  • Protéger les zones humides et les captages d’eau potable ;
  • Encadrer l’assainissement non collectif et lutter contre les pertes d’eau dans les réseaux ;
  • Protéger la mer et le littoral.

1.2. La loi Labbé

La loi du 6 février 2014, dite Loi Labbé, qui tend vers le zéro pesticide à l’horizon 2020 pour les collectivités sera finalement « bousculée » par la loi de transition énergétique pour une croissance verte.

1.3. La loi de transition énergétique pour une croissance verte (LTECV)

Le 22 juillet 2015, l’Assemblée nationale adopte la loi de transition énergétique pour la croissance verte qui prévoit la mise en place de l’objectif zéro pesticide dans l’ensemble des espaces publics à compter du 1er janvier 2017 : interdiction de l’usage des produits phytosanitaires par l’État, les collectivités locales et établissements publics pour l’entretien des espaces verts, promenades, forêts et les voiries.
La commercialisation et la détention de produits phytosanitaires à usage non professionnel seront interdites à partir du 1er janvier 2019. Cette mesure concerne tout particulièrement les jardiniers amateurs.
Les produits de biocontrôle, qualifiés à faible risque ou dont l’usage est autorisé dans le cadre de l’agriculture biologique, peuvent être utilisés.

1.4. La loi biodiversité

La « loi pour la reconquête de la biodiversité, de la nature et des paysages » a été votée le 20 juillet 2016. La loi crée l’Agence française pour la biodiversité (AFB).

2. Pratiques dans les espaces verts

2.1. La réduction des opérations de désherbage

Depuis la loi de transition énergétique pour la croissance verte qui prévoit la mise en place de l’objectif zéro pesticide dans l’ensemble des espaces publics à compter du 1er janvier 2017, la mise en place de techniques alternatives s’impose. On retrouve :

2.1.1. Stratégies de biocontrôle

Les produits de biocontrôle (macro-organismes, micro-organismes, médiateurs chimiques, substances naturelles), utilisés en lutte biologique, représentent l'un des leviers d'action pour compenser l'utilisation des produits phytosanitaires. Ils sont intégrés à des stratégies de protection biologique intégrée (PBI).

2.1.2. Les méthodes préventives

En empêchant les adventices de se développer, on limite leur infestation et ainsi les opérations de désherbage grâce aux techniques de :

  • paillage : la technique du paillage consiste à recouvrir la terre avec un paillis végétal, minéral ou en plastique.
  • emploi de couvre-sols : ils apportent une solution naturelle contre le développement des adventices, en s’étalant sur le sol sans prendre de hauteur.

2.1.3. Les méthodes curatives

  • Mécaniques : en général, ces techniques permettent de déraciner les herbes indésirables, soit par un travail superficiel du sol, soit par un déracinement : exemple le balayage mécanique
  • Thermiques : le désherbage thermique utilise la chaleur pour détruire la flore spontanée : exemple les bruleurs à gaz

2.1.4. L’acceptation de la végétation spontanée

Nous considérons tendancieusement que la propreté de la ville passe systématiquement par la destruction massive des "mauvaises herbes". Changer notre vision vis-à-vis de cette végétation spontanée et accepter son développement (maîtrisé) dans certains espaces des communes constitue une alternative à part entière dans la gestion des espaces.

2.2. La réduction des consommations d’eau

2.2.1 L’utilisation d’eau non potable

  • Utilisation des eaux issues d’un bassin de rétention des eaux pluviales enterrée ou à ciel ouvert.
  • Le pompage d’eau dans la nappe ou les plans d’eau avoisinants.

2.2.2. Le paillage dans les massifs

Le paillage est une technique qui consiste à recouvrir le sol de matériaux organiques, minéraux ou plastiques pour le nourrir et/ou le protéger. Ces matériaux sont déposés au pied des plantes dans les massifs. Un avantage au paillage sur un sol nu :

  • Limiter les arrosages : le phénomène d'évaporation (pertes d'eau) est 3 fois plus important que sur le sol nu.
  • Le paillage permettra d'absorber l'eau et de maintenir l'humidité de votre sol.
  • Éviter le désherbage chimique : le paillage empêche la lumière d'atteindre la surface du sol ce qui ne permet pas aux plantes adventices de germer.
  • Créer un lieu propice aux insectes utiles : les matériaux utilisés servent de refuge pour les insectes utiles (attirés par le nectar des fleurs) pendant l'hiver

2.2.3. Choix des plantes dans les massifs

Les plantes vivaces nécessitent moins d’eau pour se développer que les plantes annuelles ou bisannuelles. Exemple de vivaces :

  • Vivaces de printemps : l'ancolie, le myosotis du Caucase, la valériane, le muguet, l'acanthe, l'achillée, la rose trémière, la campanule, le bleuet, la marguerite…

2.2.4. Arrosage raisonné, arrosage automatique, MIR

Ces techniques permettent de maitriser les consommations d’eau.
La méthode la plus aboutie est la MIR (méthode d’irrigation raisonnée) qui combine des sondes tensiométriques capables de mesurer le « stress hydrique » de la plante et de lui apporter l’eau nécessaire à son développement par un système d’arrosage automatique ; l’ensemble étant autonome et géré par un ordinateur.
On enregistre une réduction de la consommation d’eau (20 à 30 %) et des traitements.

2.3. La gestion différenciée

La gestion différenciée (parfois appelée gestion raisonnée, harmonique ou durable) s'oppose au principe de gérer tous les espaces verts de la même façon, avec du gazon bien tondu, des plantations d'espèces exotiques annuelles, l'utilisation généralisée de produits chimiques..., alors que chacun d'eux a ses propres spécificités. De plus, elle s'oppose à l'idée que la nature n'a pas sa place dans les zones urbanisées.
La gestion différenciée consiste à adapter le mode d'entretien aux caractéristiques et fonctions de chaque espace vert. Il s'agit d'appliquer la bonne gestion au bon endroit.

"Entretenir autant que nécessaire et aussi peu que possible"

Globalement, à l'échelle d'une commune ou d'une ville, la gestion différenciée se traduit par une diversité d'espaces verts et des objectifs d’entretien – Élaboration du cahier des charges et propositions d’entretien adaptées. On parle de code d’entretien.
Les codes d’entretien sont de véritables outils de mise en application de la gestion différenciée. Ils correspondent à un résultat visuel, à un aspect esthétique attendu que l’on souhaite atteindre. Ils varient en fonction de la nature, de la localisation et de la fréquentation du lieu, de la destination et de l’utilisation de l’espace, de la volonté paysagère (situation actuelle et évolution possible) car les interventions sont différentes et plus ou moins nombreuses. Cette codification de l’espace correspond donc à des intensités d’entretien qui évoluent des plus entretenues aux espaces gérés de manière plus extensives.

image-20181127153809-1.png

2.4. La gestion de l’arbre en ville

L’arbre a une fonction d’ombrage et de régulateur thermique ; un alignement d’arbre peut faire baisser la température de 5 °C en été dans une rue.
C’est un moyen de limiter les nuisances urbaines telles que le bruit, la pollution, les îlots de chaleur urbains et ainsi d’améliorer la santé des citadins. Les arbres contribuent à diminuer le taux de gaz carbonique, neutralisent les autres polluants atmosphériques (ozone, dioxyde, soufre…) et filtrent les poussières, cendres, pollens et les aérosols. En outre, ils apportent des bénéfices en termes d’économie d’énergie.
En été, les feuilles peuvent intercepter jusqu’à 90 % des rayons solaires et en hiver, les arbres dépourvus de feuillage laissent passer les rayons du soleil, tout en gardant un effet de déviation du vent qui arrive sur les maisons.
Un arbre n'est pas éternel. Il vieillit, contracte des maladies et il faut parfois l’abattre et le remplacer. Les arbres plantés le long des rues dépassent rarement 80 ans. Il peut être atteint de maladies :

  • Le chancre coloré est une maladie grave qui cause la mort chaque année de nombreux platanes. Le champignon responsable de cette maladie est classé parasite de lutte obligatoire ce qui signifie qu’il n’existe pas de moyen de lutte efficace et que le signalement de tout sujet contaminé ainsi que la mise en place des méthodes de lutte sont obligatoires en tout temps et en tout lieu. L’agent responsable de cette maladie est un champignon, Ceratocystis platani.
  • La Mineuse du Marronnier, Cameraria ohridella, le principal responsable de la chute prématurée des feuilles, est la chenille du papillon Cameraria ohridella, plus communément appelée « mineuse du marronnier ». La chenille mineuse du marronnier, insecte ravageur pour ces arbres emblématiques est en recrudescence dans nos régions.
  • Le bombyx du chêne. Le Bombyx est le plus important ravageur des forêts de chênes. Qu’il soit appelé “Moine”, “Cul-Brun” ou “Laineux”, le Bombyx est un défoliateur très polyphage ; il s’attaque à de nombreuses feuilles particulièrement aux chênes et même à d’autres résineux
  • Le phytophthora, dépérissement des conifères. La pourriture des racines et de la tige peut affecter les conifères mais également d’autres végétaux (rhododendrons, azalées, bruyères…). Ce fléau qui s’est beaucoup développé en pépinières ces vingt dernières années à diverses espèces de conifères d’ornement entraîne des pertes considérables. Parmi les espèces les plus touchées, le thuya.

3. La biodiversité en ville

La biodiversité, ou diversité biologique, constitue le tissu vivant de la planète. Elle recouvre l'ensemble des formes de vie sur Terre, les relations qui existent entre elles et avec leurs milieux depuis l'origine commune de la vie.

3.1. L’Observatoire National de la biodiversité

Issu de la loi pour la reconquête de la biodiversité, de la nature et des paysages, l’Observatoire National pour la biodiversité est créé. Il a pour missions principales de lutter contre la perte de biodiversité et répondre aux enjeux d’adaptation aux effets du changement climatique.
L’Agence française pour la biodiversité sera un opérateur de référence au service d’un nouveau modèle de développement. Elle est opérationnelle depuis le 1er janvier 2017. Elle est issue de la réunion de quatre organismes engagés dans les politiques de la biodiversité : l’Office national de l’eau et des milieux aquatiques, l’Agence des aires marines protégées, l’établissement des Parcs nationaux de France et l’Atelier technique des espaces naturels.
L’Agence est une référence institutionnelle en matière d’expertise, de pilotage, d’assistance et de contrôle ainsi qu’un lieu de partenariat avec les collectivités territoriales, les réseaux associatifs. Elle exerce des missions de préservation, de gestion et de restauration de la biodiversité et permet le développement des connaissances, la gestion équilibrée et durable des eaux et la lutte contre la biopiraterie…

3.2. Les outils réglementaires de protection de la biodiversité

La réserve naturelle nationale (RNN) permet de protéger réglementairement des milieux naturels de grande valeur. Toute action susceptible de nuire au développement de la flore et de la faune ou d’entraîner la dégradation de biotopes peut être réglementée ou interdite.

La réserve naturelle régionale  (RNR) est un espace naturel protégé réglementairement classé par le Conseil Régional. La gestion durable de cette zone est assurée à l’aide de suivis scientifiques réguliers et d’une réglementation adaptée.

L’arrêté de protection de biotope (APB) a pour objectif la préservation des milieux naturels nécessaires à l’alimentation, à la reproduction, au repos ou à la survie des espèces animales ou végétales protégées par la loi. Pris par le Préfet de département, cet arrêté établit, de manière adaptée à chaque situation, les mesures d’interdiction ou de réglementation des activités pouvant porter atteinte au milieu.

La réserve biologique dirigée ou intégrale (RBD ou RBI) : l’Office National des Forêts en est le gestionnaire. Pour certains sites, des réserves biologiques sont mises en place. Elles permettent, selon les cas, de préserver ces zones de toute activité humaine ou de cibler la protection sur une ou plusieurs espèces.

Un parc national est une portion de territoire dans laquelle la faune, la flore et le milieu naturel en général sont protégés des activités humaines.

Les espèces protégées : les articles L411-1 et L411-2 du code de l’Environnement fixent les principes de protection de certaines espèces de faune et de flore dont la liste est arrêtée au niveau national et complétée par arrêté régional.

Le réseau Natura 2000 a pour vocation de créer un maillage grâce aux Réseaux écologiques européens cohérents formés par les Zones de Protection Spéciale (ZPS) et les Zones Spéciales de Conservation (ZSC). Dans les zones de ce réseau, les Etats Membres s'engagent à maintenir les habitats et espèces concernés dans un état de conservation favorable. Pour ce faire, ils peuvent utiliser des mesures réglementaires, administratives ou contractuelles

Une Zone Naturelle d’Intérêt Écologique Faunistique et Floristique (ZNIEFF) est une zone écologique remarquable. Les ZNIEFF n'ont pas de portée réglementaire directe : elles ont le caractère d'un inventaire scientifique. La loi de 1976 sur la protection de la nature impose cependant aux PLU de respecter les préoccupations d'environnement et interdit aux aménagements projetés de "détruire, altérer ou dégrader le milieu particulier" à des espèces animales ou végétales protégées (figurant sur une liste fixée par décret en Conseil d'Etat).

La trame verte et bleue et le schéma régional de cohérence écologique (SRCE) : Le SRCE, qui précisera la trame verte et bleue, est un document de référence pour porter à connaissance les continuités écologiques régionales à prendre en compte dans les documents de planification, les projets et infrastructures linéaires portés par l’État, les collectivités territoriales et leurs groupements. Le SRCE, qui a une portée juridique, devra être pris en compte par les documents d'urbanisme et les futures infrastructures de l’État.

Tags :
    
© 2023 CNFPT