Par Vincent Chrétien
Dernière mise à jour : octobre 2019

1. Le cadre réglementaire se veut d’abord sanitaire

1.1. Règles sanitaires

On parle de « paquet hygiène » car il s’agit d’un ensemble constitué par six règlements communautaires, fixant des exigences relatives à l’hygiène des denrées alimentaires et des denrées animales. Ces réglementations obligent les professionnels à respecter les principes suivants :

  • Respecter les bonnes pratiques d’hygiène ;
  • Élaborer des procédures fondées sur les principes HACCP (Hazard Analysis Critical Control Point), qui visent à analyser les dangers et définir les points critiques pour mieux les maîtriser ;
  • Se former dans les domaines de l’hygiène alimentaire et de l’application des principes HACCP ;
  • Mettre en place un système de traçabilité pour pouvoir procéder à des retraits ciblés et rapides en cas de crise ;
  • Mettre en place des procédures de retrait et de rappel ;
  • Déclarer son activité aux services d’hygiène (DD(CS)PP) et obtenir les agréments nécessaires. (DDPP et DDCSPP : les services de contrôle officiels en hygiène alimentaire).

La réglementation en vigueur varie selon les modalités de fonctionnement :

  • Une « cuisine sur place » n’est pas soumise à l’agrément sanitaire, quel que soit le nombre de repas servi. En revanche, elle ne peut pas livrer de repas à un autre restaurant collectif ;
  • Une cuisine centrale est un établissement qui doit être agréé ;
  • Les restaurants satellites ne fabriquent pas de repas et, à ce titre, ne sont pas soumis au régime de l’agrément. Ils peuvent néanmoins préparer également certaines fractions de repas sur place et sont donc assimilés pour cette partie à une « cuisine sur place ».

En fonction du statut de l’établissement, soumis à agrément ou pas, le mode d’approvisionnement obéit à des règles différentes, approvisionnement direct chez un producteur ou un commerce de détails ou établissement agréé.

1.2. Un politique nutritionnelle portée par le Programme National Nutrition Santé (PNNS)

La mise en place d’une politique nutritionnelle est apparue, au cours des quinze dernières années, comme une priorité de santé publique. Le rôle joué par la nutrition comme facteur de protection ou de risque des pathologies les plus répandues en France est de mieux en mieux compris, qu’il s’agisse du cancer, des maladies cardiovasculaires, de l’obésité, de l’ostéoporose ou du diabète de type 2.
Le PNNS traite de la nutrition comme déterminant de la santé. Le Plan obésité (PO) s’articule autour et complète le PNNS par l’organisation du dépistage, de la prise en charge des patients ainsi que par une dimension importante de recherche. Le PNNS et le PO sont présentés conjointement.
Dans les Objectifs du PNNS 2018-2022 pour la politique nutritionnelle et de santé en France, on trouve des « Nouveautés sur le BIO et les produits ultra-transformés » :

  • consommer au moins un fruit ou légume par jour (y compris les personnes en situation de précarité). La consommation de produits complets, de légumineuses et fruits à coque sans sel ajouté doit être augmentée alors que des seuils de 150g/semaine et 500g/semaine à ne pas dépasser pour la viande et la charcuterie ont été fixés.
  • Les jus de fruit sont désormais comptés comme une portion de boisson sucrée.
  • La notion de transformation alimentaire avec la classification NOVA a été reprise. L’HCSP encourage à réduire explicitement la consommation de produits ultra-transformés de 20%.
  • Les produits BIO pour les fruits et légumes, céréales et légumineuses sont également mis en avant. La réduction des apports en sucres (mono et disaccharides hors lactose et galactose) et en sel est au programme en ciblant le seuil de moins de 10g/j de sel et moins de 10% de l’apport énergétique pour les sucres libres.

1.3. Le Plan de Maîtrise Sanitaire (PMS).

Le PMS est un outil pour atteindre les objectifs de sécurité sanitaire définis dans le « Paquet Hygiène » (le paquet hygiène c’est la réglementation sanitaire Européenne).
Un plan de maîtrise sanitaire (PMS) doit être composé de 4 grandes parties :

  • la maîtrise des bonnes pratiques d’hygiène générales et spécifiques ;
  • le plan HACCP validé et mis à jour régulièrement ;
  • le système de traçabilité ;
  • et pour finir la gestion des produits non-conformes.

2. Les partenaires de l’hygiène alimentaire

DDCSPP : La direction départementale de la cohésion sociale et de la protection de la population est compétente en matière de politiques de cohésion sociale et de politiques relatives à la jeunesse, aux sports, à la vie associative et à l’éducation populaire.
DDPP : La direction départementale de la protection des populations est compétente en matière de politiques de protection de la population. A ce titre, elle met en œuvre dans le département les politiques relatives à la protection et à la sécurité des consommateurs
ARS : Les agences régionales de santé sont chargées du pilotage régional du système de santé. Elles définissent et mettent en œuvre la politique de santé en région.

3. Les différents modes de restauration

3.1. Types de cuisine

Les cuisines sur place sont des établissements qui fabriquent des repas consommés exclusivement sur place ;
Les cuisines centrales sont des établissements dont une partie au moins de l’activité consiste en la fabrication de préparations culinaires destinées à être livrées, soit à au moins un restaurant satellite, soit à une collectivité de personnes à caractère social ;
Les restaurants satellites sont des « établissements ou locaux aménagés desservis par une cuisine centrale ». Les restaurants satellites peuvent fabriquer certaines fractions de repas sur place.

3.2. Types de liaison pour le cas de la fabrication externalisée

La liaison chaude

Les préparations sont fabriquées le jour même de la livraison. Jusqu’au moment du repas, les plats chauds doivent être maintenus à une température supérieure ou égale à + 63 °C à cœur.
Les entrées et les desserts froids livrés simultanément doivent être gardés à une température comprise entre 0° C et + 3° C. Il faut proscrire le transport dans le même contenant de plats chauds et de préparations froides.
Les repas doivent être pris rapidement après avoir été déposés.
Certains produits sensibles qui atteindraient difficilement 63°C (ex : steaks hachés, rôti de bœuf) pourront être supprimés des menus.
Dans ce cas, pour la livraison et lors du service, il est nécessaire de disposer d’une cuisine satellite équipée de containers chauffants et réfrigérants.

La liaison froide

Après élaboration ou cuisson, les préparations doivent être refroidies et maintenues à une température située entre 0 et + 3 °C. La durée totale du transport et les matériels utilisés doivent permettre de respecter les températures prescrites par la réglementation en vigueur.
Au moment du chargement et du déchargement, il faudra veiller à éviter toute attente des produits qui pourrait être préjudiciable à la sécurité alimentaire.
Le convive doit respecter les dates limites de consommation (DLC) apposées sur les préparations par le fabricant dans le cadre de l’étiquetage complet obligatoire.
Les repas doivent être placés dans le réfrigérateur du convive lors des livraisons.
Les préparations destinées à être consommées chaudes sont réchauffées au moment du repas. En aucun cas, les excédents ne doivent être conservés après réchauffage.
Dans ce cas, les lieux de consommation sont dotés d’une cuisine satellite équipée de fours de réchauffage pour les plats chauds et de containers réfrigérants ou de réfrigérateurs pour les plats froids.

3.3. Avantages et inconvénients des deux modes de liaisons

En faveur de la liaison froideContraintesEn faveur de la liaison chaude
C’est la seule façon de respecter rigoureusement la législationRéglementaireLa législation autorise des liaisons chaudes de 6 heures, si l’aliment est placé dans un conteneur chauffant
Elle respecte la qualité organoleptique de l’alimentQualités organoleptiquesElle évite à l’aliment les chocs thermiques
C’est une assurance qualité pour les municipalitésSécuritéLes accidents sont moins graves que ceux occasionnés par la liaison froide

Dans le cadre d’une grande cuisine centrale, elle permet des économies :

1/ au niveau de l’investissement initial des matériels
2/ au prix de revient des repas

EconomieC’est un moyen économique qui permet de limiter les investissements nécessaires dans les cuisines satellites
Elle améliore les conditions de travail. Elle permet de mieux contrôler le portionnage et la gestionSpécialités

En scolaire, pour un fonctionnement de 140 jours par an, c’est une solution avantageuse.

C’est une solution tout à fait adaptée pour les liaisons courtes n’excédant pas 5 km.

La gestion des déchets alimentaires est mieux contrôléeDéveloppement durableMoins énergivore

4. La méthode HACCP

La démarche HACCP (de l'américain Hazard Analysis Critical Control Point) est une méthode préventive visant à maîtriser les dangers pouvant survenir au cours d'un processus. Elle est tout particulièrement adaptée pour assurer la sécurité alimentaire en cuisine centrale et en restauration.

La démarche HACCP permet de satisfaire à l'obligation de résultat imposée par l’article 5 du règlement (CE) n° 852/2004 du 29 avril 2004 relatif à l’hygiène des denrées alimentaires. Elle a donc un caractère obligatoire.

4.1. Principe de la démarche HACCP

La méthode HACCP se décline en 7 principes décrits à l'article 5 du règlement (CE) N° 852/2004 du 29 avril 2004.

A partir d'un diagramme de fabrication décrivant les différentes étapes de production des repas, l'équipe HACCP, regroupée autour du responsable qualité, du responsable de production, des responsables de chaque secteur, doit :

  • Identifier tout danger qu’il y a lieu de prévenir, d’éliminer ou de ramener à un niveau acceptable ; depuis le choix des fournisseurs jusqu'à la distribution des repas,
  • Rechercher, pour les dangers microbiens en particulier, les facteurs sources de contamination, les facteurs sources de prolifération ou de survie microbienne et en établir la cause en utilisant la méthode des 5M.
  • Etablir pour chaque danger identifié des mesures de maîtrise adaptées à la structure.
  • Présenter cette analyse des dangers selon le tableau II. La plupart de ces mesures de maîtrise seront décrites dans le Guide de Bonnes Pratiques d'Hygiène en restauration collective (GBPH) dont la publication est attendue.
  • Mettre en place pour chaque étape définie comme point critique (CCP), une surveillance associée à un enregistrement, et définir les actions correctives à mener en cas de dépassement des limites préétablies. Présenter les mesures prises dans le cadre des CCP selon le tableau III.
  • Décrire l'ensemble des mesures de maîtrise et des mesures de surveillance dans des procédures ou modes opératoires portés à la connaissance de tous.
  • Auditer et réviser régulièrement le système.

Principaux dangers d'origine alimentaire

Classes de dangersType d’agentsEffetsAgents
BiologiesMicro-organismesToxi-infections alimentairesSalmonella, Campylobacter jejuni, Staphylococcus aureus, Clostridium perfringens, …
 Listeria monocytogenes, virus hépatite A, E Coli
ParasitesInfections alimentairesToxoplasmes, taenia, …
ChimiquesRésidusToxicité à long termePesticides, antibiotiques, hormones, métaux lourds, dioxines, produits lessiviels, …
AllergènesAllergie ou intolérances alimentairesArachide, fruits (rosacées), poisson, ovalbumine, gluten, …
AminesHypersensibilitéHistamine, putrescine, cadavérine
PhysiquesCorps étrangersBlessuresVerres, métal, carton, plastique

4.2. Méthodologie de la démarche HACCP

4.2.1. Maîtrise de l'hygiène du personnel

Toutes les conditions relatives à l'hygiène du personnel doivent être décrites : tenue selon les zones, déplacement, état de santé… Une charte d'hygiène peut être élaborée ainsi qu'un livret d'accueil pour les nouveaux arrivants décrivant les règles de fonctionnement à respecter dans une cuisine centrale. Un plan de formation des différents personnels à l'hygiène est établi et actualisé chaque année.

4.2.2. Maîtrise du nettoyage et de la désinfection

L’annexe 2 de l’arrêté du 8 juin 2006 impose l’existence d’un plan de nettoyage et de désinfection. Ce plan décrit pour chaque surface ou matériel la fréquence du nettoyage/désinfection, le produit utilisé et sa dose, le temps de contact, la méthode utilisée. L'utilisation de produits agréés pour le contact alimentaire est obligatoire.

4.2.3. Choix des fournisseurs

Choisir exclusivement des fournisseurs possédant un agrément sanitaire. Cet agrément n'existe que pour les denrées animales ou d'origine animale.
Réaliser des audits chez les fournisseurs majeurs et examiner en particulier leur système HACCP.

4.2.4. Réception

Décrire les contrôles à mettre en œuvre lors de la réception. Ces contrôles portent notamment sur la qualité et la fraîcheur des fournitures livrées, la température des produits à cœur, l'intégrité des conditionnements, la date limite de consommation (DLC).

4.2.5. Maîtrise du couple « temps – température » tout au long de l'élaboration des produits

Trois températures clefs ressortent de l’arrêté du 21 décembre 2009 :

  • 3°C : conservation sur plusieurs jours des produits périssables.
  • 10°C : température maximum à atteindre en sortie de cellule, température maximale d'exposition pour les préparations froides.
  • 63°C : température de maintien au chaud des préparations chaudes.

4.2.6. Maîtrise de la traçabilité et gestion des non conformes

Pour chaque recette, l'origine des matières premières utilisées (traçabilité ascendante) doit pouvoir être retrouvée : numéro d'agrément de l'atelier d'origine, numéro de lot, DLC.
Cette traçabilité est rendue obligatoire par le règlement (CE) N° 178/2002 du 28 janvier 2002 pour l’ensemble des fabrications.
Pour les cuisines centrales livrant plusieurs établissements, une traçabilité descendante doit également être mise en œuvre. Cette traçabilité passe par la conservation ou le recopiage des étiquettes des matières premières et par l'attribution de numéros de lots aux différentes fabrications.
Une procédure de gestion des produits non conformes doit être mise en place en s’inspirant du guide émis par l’administration (NS DGAL/MUS/ N2009-8188 du 7 juillet 2009).

4.2.7. Maîtrise de la qualité microbiologique

Le plan de maîtrise doit comporter un plan de prélèvements en vue de l'analyse microbiologique. Ces analyses permettent de vérifier l’efficacité des moyens mis en œuvre. Aucune fréquence n'est fixée par la réglementation. Il appartient au responsable de chaque site de définir la nature et la quantité des échantillons à prélever selon sa propre analyse des risques.
Ces analyses sont réalisées par un laboratoire spécialisé en microbiologie de l'eau et des aliments. Les germes recherchés et les critères microbiologiques retenus sont ceux définis par le règlement (CE) N°2073/2005 du 15 novembre 2005 pour les critères de sécurité et par les différentes instances professionnelles pour les critères d’hygiènes des procédés.

4.2.8. Maîtrise de la durée de vie des produits

Pour toutes les préparations distribuées de manière différée en liaison froide pour lesquelles on souhaite une DLC supérieure à 3 jours, il convient de réaliser une étude de vieillissement conformément à la norme AFNOR XP V 01-003. Les produits doivent satisfaire aux critères microbiologiques après avoir passé 2/3 de leur vie à 3°C et 1/3 à 8°C.

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