La restauration collective et les enjeux du développement durable

Modifié par Julien Lenoir le 16 octobre 2019

Par Vincent Chrétien
Dernière mise à jour : octobre 2019

La restauration collective et les enjeux du développement durable

1. Restauration collective : plus de bio

1.1. Un cadre réglementaire encourageant

Pour la première fois en 2008, suite au Grenelle de l’environnement, afin d’encourager le développement de l’agriculture biologique, qui montre qu’elle est manifestement « plus durable », les collectivités doivent montrer l’exemple. L’Etat fixe des objectifs : pour l'année 2010, introduire 15 % de denrées issues de l'agriculture biologique dans les menus et atteindre 20 % en 2012.

Le projet de loi pour améliorer la qualité de l’alimentation dans les cantines scolaires a été adopté en Conseil des ministres le 31 janvier 2018. Au programme, deux obligations : des menus bios à 50% en 2022 et la mise en place d’un diagnostic obligatoire pour lutter contre le gaspillage alimentaire.

Très attendu par les agriculteurs, redoutés par la grande distribution, le projet de loi pour l’équilibre des relations commerciales dans le secteur agricole et une alimentation saine et durable va également compter dans les collectivités.

Alors que la restauration scolaire dans les écoles, collèges, lycées représentent plus de 3 milliards de repas par an, la restauration collective devra ainsi s’approvisionner avec « au moins  50% de produits biologiques, locaux ou sous signe de qualité à compter du 1er janvier 2022 ». Au moins 20% des produits devront être issus de l’agriculture biologique, précise le texte.

1.2. Les solutions alternatives pour encourager l’approvisionnement de la restauration scolaire en produits bio et locaux

Pour parvenir à 50% de produits biologiques en 2022, il va être nécessaire de manier habillement les marchés publiques.

1.2.1. Définir la procédure d'attribution applicable

L’interdiction des « clauses de proximité géographique » dans les marchés publics.

Le respect des seuils de passation impose le plus souvent, pour les marchés de restauration scolaire, le recours à des procédures formalisées et à une mise en concurrence élargie, auxquels il n’est pas possible de déroger sous peine d’illégalité.

En ce qui concerne les critères de sélection des offres, ils sont librement choisis par la collectivité et il est tentant pour les collectivités adjudicatrices de privilégier les offres des fournisseurs locaux sur le seul critère géographique de leur implantation.

Une telle décision se heurte aux principes généraux de la réglementation des marchés publics, tels qu’énoncés à l’article 1 du Code des Marchés Publics :

  • égal accès à la commande publique
  • égalité de traitement des candidats
  • transparence des procédures.

En l'absence de toute possibilité de référence explicite à une préférence locale dans les documents de commande publique, des solutions alternatives peuvent être trouvées dans l'activation de différents leviers.

1.2.2. L'adaptation de la forme du marché

La division du marché en lots (allotissement). L'allotissement en principe pour susciter la plus large concurrence entre entreprises et leur permettre, quelle que soit leur taille, d'accéder à la commande publique.

Ainsi est-il conseillé de diviser un marché de fournitures alimentaires en plusieurs lots auxquels pourront répondre des fournisseurs de proximité, en gardant à l'esprit l'idée d'ensembles cohérents (produits d'épicerie, produits laitiers…etc.) ou de lots spécifiques par exemple pour les produits issus de l'agriculture biologique.

La formulation d'exigences environnementales

Elles peuvent se retrouver dans les différentes étapes de l'expression des besoins et de la mise en place du marché :

  • Présentation des offres : définition de critères environnementaux directement liés à l’objet du marché, objectifs et mesurables, appréciables sur une échelle ouverte. Exemple : mode et temps de transport des denrées.
  • Exécution du marché : conditions d'exécution environnementales (livraison en vrac plutôt qu'en petit conditionnement, récupération ou réutilisation des emballages…).
  • Présentation des candidatures : examen du savoir-faire des candidats en matière de protection de l'environnement au travers de l'appréciation de leurs capacités techniques.
  • Spécifications techniques : référence à des écolabels, des normes, des agréments et autres référentiels techniques.

L’affirmation de préférences qualitatives

  • Saisonnalité et fraîcheur : Exemple pour les fruits et légumes : fixation d'un délai court entre cueillette et livraison.
  • Qualité nutritionnelle et/ou gustative : Exemple : produit alimentaire certifié par un Label rouge.
  • Clauses sociales : Exemple : imposer le recours à des organismes d'insertion ou à des Centres d'Aide par le Travail pour des activités de préparation ou de conditionnement des denrées.
  • Espèces endémiques : Correspondant à un terroir ou espèces anciennes réintroduites localement.

L'exemple de la ville de Strasbourg

Dans un marché pluriannuel de fourniture de repas passé en 2009, la ville de Strasbourg a inséré un certain nombre de clauses visant simultanément à répondre aux exigences du développement durable et à favoriser un approvisionnement local. C'est ainsi qu'un engagement contractuel de diminution du coût carbone lié aux prestations du marché, de l'ordre de 3 % par an minimum, est demandé à l'entreprise soumissionnaire, qui doit en justifier chaque année sur la base d'un document fourni par la collectivité. Cette formule est plus souple pour le prestataire qui peut apprécier ses marges de manœuvre et privilégier lui-même un approvisionnement local, y compris pour le bio. Elle évite également une trop grande complexité des documents de consultation et des renseignements demandés aux entreprises, parfois source d'infructuosité des marchés.

1.3. Gérer le coût des produits issus de l'agriculture biologique

La différence de prix que l'on peut constater entre les produits bio et conventionnels est très variable selon le type d'aliments. Les produits issus de l’agriculture biologiques restent plus onéreux pour les raisons suivantes :

  • Produire dans le respect de l’environnement et des cycles naturels, avec la garantie de non utilisation de produits chimiques de synthèse de la ferme au magasin, la non utilisation d’OGM, a une valeur, donc un prix. Cela signifie notamment que les rendements peuvent être plus faibles et que les animaux ont une vitesse de croissance plus lente, de l’espace, un accès au plein air, une alimentation bio.
  • La Bio a recours à davantage de main d’œuvre, pour des raisons techniques et dans le souci d’une meilleure occupation de l’espace et des territoires ;
  • Les réseaux de collecte et distribution sont de tailles plus modestes, ne permettant pas encore certaines économies d'échelle ;
  • Le coût du contrôle et de la certification de l’ensemble de la filière est à la charge des opérateurs.

Cependant, quelques mesures simples permettent de limiter ce surcoût, par exemple :

  • revoir la composition des menus (source protéique, place des fruits et légumes), dans le respect des recommandations nutritionnelles ;
  • prendre en compte la spécificité de certains produits bio pour calculer les quantités et éviter les pertes.

Bien que non spécifiques, il convient de rappeler l'efficacité des mesures suivantes :

  • mettre en place un approvisionnement structuré ;
  • privilégier les produits frais de saison ;
  • construire ses menus en fonction de l'offre tout en veillant au respect de l'équilibre nutritionnel ;
  • privilégier la régularité dans les approvisionnements (économies d'échelle et logistique appropriée).

1.4. Les circuits courts pour la restauration collective

Circuit court rime avec local.

On parle de circuit court, lorsqu’on limite les intermédiaires entre l’agriculteur et le consommateur. Plus spécifiquement, un circuit court est un mode de commercialisation de produits agricoles ou horticoles, qu’ils soient bruts ou transformés, dans lequel au maximum un intermédiaire intervient entre le producteur et le consommateur.

Compte tenu de sa définition, le circuit court mène à une proximité à la fois géographique et relationnelle entre le producteur et le consommateur. Néanmoins, du point de vue géographique, il n’y a pas de critère précis permettant de définir une distance au-delà de laquelle le circuit ne pourrait plus être qualifié de court.

Il existe une diversité de circuits courts qu’il est possible de classer selon plusieurs critères. Un critère simple est de tenir compte du nombre d’intervenants entre le producteur et le consommateur, soit aucun (vente directe) ou un (autre type de circuit court). Pour l’agriculteur, la vente directe permet de mener son activité en toute indépendance, de fixer les prix qu’il désire sans laisser de commission à un quelconque intermédiaire. Néanmoins, il se voit alors assurer seul la commercialisation de son produit et les investissements inhérents à cette activité.

Autres points forts :

  • Un quart du transport routier en France est lié au transport de produits agricoles et alimentaires. Réduire ces transports pourrait donc permettre de réduire significativement les nuisances liées (pollution atmosphérique, nuisances sonores, consommation d’énergie…).
  • La réduction des déchets de conditionnement. La réduction de la distance de transport entre les lieux de production et de consommation permet de réduire les emballages des produits. Dans la plupart des circuits courts, les produits bruts sont peu ou pas emballés, et les conditionnements liés au transport sont souvent réemployés. Ceci constitue une économie tant pour la production des emballages qu’en termes de déchets.
  • Moindre recours aux procédés de conservation. En matière de conservation, les circuits courts feraient globalement moins appel aux procédés de conservation (stockage au froid), puisque le délai entre la production / la cueillette et la commercialisation est réduit. Or, les processus de conservation longue durée (congélation, conserve), observés plutôt en circuits longs, sont fortement consommateurs d’énergie et émetteurs de gaz à effet de serre (fluides frigorigènes). A contrario, les processus de transformation / conservation éventuellement utilisés en circuit court sont moins optimisés que dans les industries agro-alimentaires, dès lors que les impacts sont ramenés à l’unité produite.

2. Lutter contre le gaspillage alimentaire

La loi relative à la lutte contre le gaspillage alimentaire est promulguée le 11 février 2016 et complète les dispositions de la loi n° 2015-992 du 17 août 2015 relative à la transition énergétique pour la croissance verte relative au gaspillage alimentaire.

Ses deux mesures principales concernent les distributeurs de produits alimentaires. Cette loi prévoit en effet :

  • l’obligation, pour les magasins alimentaires de plus de 400 m2, de proposer une convention de don à des associations pour la reprise de leurs invendus alimentaires encore consommables ;
  • l’interdiction, pour les distributeurs alimentaires, de rendre impropres à la consommation des invendus encore consommables.

La loi prévoit par ailleurs les mesures suivantes :

  • l’inscription dans le code de l'environnement d’une hiérarchie des actions de lutte contre le gaspillage alimentaire :
    • la prévention du gaspillage alimentaire ;
    • l'utilisation des invendus propres à la consommation humaine, par le don ou la transformation ;
    • la valorisation destinée à l'alimentation animale ;
    • l'utilisation à des fins de compost pour l'agriculture ou la valorisation énergétique, notamment par méthanisation.
  • l’inclusion, dans la politique de lutte contre le gaspillage alimentaire, d’actions de sensibilisation et de formation de tous les acteurs, de mobilisation des acteurs au niveau local, d’une communication régulière auprès des citoyens, en particulier dans le cadre des programmes locaux de prévention des déchets ;
  • l’interdiction, pour un opérateur du secteur alimentaire, de s’opposer au don de denrées alimentaires vendues sous une marque distributeur à une association caritative habilitée ;
  • l’information et l’éducation à la lutte contre le gaspillage alimentaire dans les écoles ;
  • l’intégration de la lutte contre le gaspillage alimentaire dans le reporting social et environnemental des entreprises.

3. Trier les déchets et valoriser les bio-déchets

3.1. Décret du 11 juillet 2011 sur l’obligation de tri et de collecte séparée des bio-déchets

Depuis le 1er janvier 2016, pour les établissements gérant plus de 10 tonnes/an de déchets (biodéchet + déchets verts + huiles alimentaires usagées (HAU)), la mise en place de solution de tri à la source en vue de leur valorisation organique est obligatoire.

La loi de transition énergétique pour la croissance verte généralise cette exigence à l’ensemble des producteurs, sans restriction de tonnages, à l’horizon 2025.

3.2. Quelles solutions pour la valorisation organique ?

2 Types :

  • retour au sol (compostage),
  • production énergétique (méthanisation). 
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