Par Sandrine Dumont
Derniere mise a jour : mai 2017

Introduction : l‘évolution du rôle des animateurs

Dans les années 80 et davantage encore dans les années 90 avec la création de la filière animation de la fonction publique territoriale (1997), l’animation devient de plus en plus « municipalisée », c'est-à-dire au service de la politique enfance-jeunesse des équipes municipales en place. La grande majorité des animateurs aujourd‘hui travaille dans les structures d’accueil de loisirs des communes, services publics de garde des enfants. Les autres sont affectés à l’animation de maisons de quartiers, très souvent en direction des publics adolescents et jeunes adultes.

La réglementation s’est étoffée : conditions d’accueil, formation, normes d’encadrement (en fonction des âges et des types de structures), sécurité, projets obligatoires, dispositifs divers et publics. Si les grands idéaux d’éducation pour tous, de mixité sociale, de transmission des valeurs républicaines et citoyennes continuent à donner leur sens au métier d’animateur, beaucoup d’animateurs aujourd’hui ont néanmoins perdu le sens profond de leur mission.

De fait, l’activité est un support pédagogique indispensable mais non une fin en soi. C’est un moyen au service de buts socioéducatifs, un moyen d’attirer une population susceptible de participer à d’autres activités introduisant un projet social, dans des territoires souvent touchés par les difficultés : mal-logement, chômage des jeunes, violence et autres difficultés de communication interculturelles et intergénérationnelles. Le rôle d’animateur est de plus en plus au service de la cohésion sociale en favorisant l’épanouissement des individus, leur intégration dans la société, l’ouverture culturelle, l’expérience de la démocratie et l’exercice de responsabilités : les activités proposées aux enfants, aux jeunes et aux familles sont principalement des prétextes pour « apprendre à faire ensemble afin d’arriver à mieux vivre ensemble ». Cela requiert des approches particulières, en fonction des publics, des environnements, des milieux, ce qui n’est parfois pas facile pour les animateurs d’aujourd’hui.

1. Crise de l’autorité éducative ?

NB: ne pas confondre autorité éducative, qui relève de l’ensemble de la communauté éducative, et l’autorité parentale, définie par la loi comme l’ensemble des droits et devoirs des parents envers leur(s) enfant(s) et qui peut être retirée aux parents en cas de défaillance (cf fiche « protection de l’enfance »).

Depuis quelques années, la question de l’autorité revient sans cesse dans les différents champs de la société : perte d’autorité des parents sur leurs enfants, des enseignants dans leur classe, des institutions sociales en général.

Les explications sont diverses et se complètent :

  • crise des modèles représentatifs (famille, école, religion, monde du travail, responsables politiques);
  • société marchande qui favorise l‘individualisme, les plaisirs immédiats et comportements de consommation (autorité du « marketing » et de la publicité);
  • culte de l’argent « facile » et du "star system" (autorité des médias);
  • relativisme des valeurs collectives;
  • émergence des différences et des communautarismes au détriment de projets collectifs anciennement représentés par des figures d’autorité stables;
  • rapports hiérarchiques plus difficiles à accepter…

Dans une société qui produit comme modèles de réussite des stars fabriquées en quelques semaines par des programmes médiatiques à travers des twitts, la réussite sociale ne passe plus, aux yeux d’un grand nombre de jeunes, par de bonnes études (bonnes études  bon travail  bon salaire  ascenseur social ; autorité par le savoir). De fait, ce qui fait autorité, dans une société définie par l’argent, est ce qui permet de l’obtenir au plus vite et avec le moins d’efforts possible.

En fait, les difficultés en matière d’autorité éducative re relèvent pas forcément d’une « démission » des parents ou des éducateurs, mais plutôt d‘un processus socioculturel et historique qui dépasse les seules responsabilités parentales, professorales ou éducatives, qui ne sont qu’un facteur parmi beaucoup d’autres, souvent plus profonds, et auquel les animateurs sont quotidiennement confrontés.

Le piège face à cette perte d’autorité est bien souvent de chercher à réactiver un modèle d’autorité « autoritariste ».

1.1. Etre l’autorité, avoir de l’autorité, faire autorité

L’autorité éducative est une influence qui aide l’enfant à sortir progressivement de son état infantile , puéril, qui l’amène à confondre ses désirs avec la réalité, qui le maintient dans l’instant et dans l’impulsivité de ses émotions, égocentré, indécis et dans une révolte aveugle ou dans une soumission fanatique. Face au jeune enfant, l’animateur (éducateur) est un poseur de limites pour couper la toute-puissance infantile. La 1ère phase de compréhension de la loi chez l’enfant est toujours celle d’une limite.

L’éducation par « l’autorité éducative » stoppe l’illusion d’une jouissance sans limite.

Au départ, pour le jeune enfant, la loi est essentiellement vécue comme répression de ses désirs, comme un obstacle à sa liberté. La loi vient de l’extérieur, s’impose par hétéronomie et s’oppose à ses tendances personnelles ; elle met en forme et met au pas. Elle est vécue par le jeune enfant comme un ensemble de règles préétablies à son existence et portées par l’adulte omnipotent. Il doit se soumettre sans avoir encore la capacité de comprendre le sens de ce qui lui est imposé (stade pré-conventionnel de Kohlberg).

Il respecte la loi non parce qu’il la comprend comme bonne ou juste mais parce que c’est la loi de l’adulte.

Puis, au fur et à mesure que sa socialisation progresse et qu’il sort de son égocentrisme, l’enfant commence à comprendre que la loi peut aussi être fondée sur le contrat social, basée sur la raison en vue du meilleur bien commun, en visant l’arrangement, l’accord, le consensus pour arriver à vivre ensemble dans les meilleures conditions.

La loi perçue par l’enfant n’est alors plus « révélée » mais construite, elle est le résultat d’un débat et d’un accord, elle est le fruit des échanges, de la négociation et elle a pour but l’élaboration collective des règles et des valeurs communes et demande des renoncements réciproques.

"L’obéissance à la loi qu’on s’est prescrite est liberté".

(Jean-Jacques Rousseau)

Parmi les différentes formes d’autorité, on peut citer :

  • L’autorité statutaire (la potestas, étymologiquement pouvoir par la force : être l‘autorité) correspond au pouvoir légal. Elle est établie et légitimée par la règle, le droit, la loi et l’institution. L’animateur, parce qu’il fait partie de l‘institution, est statutairement cette forme d’autorité, il la représente, il l‘incarne.
  • L’autorité personnelle (l’auctoritas; du latin augere –grandir: avoir de l‘autorité) correspond à une influence personnelle, forme de charisme. L’autorité s’établit par la relation, par les interactions fondées sur le respect mutuel et s’estompe au fur et à mesure que l’enfant intériorise les interdits.
  • L’autorité intellectuelle,  experte (faire autorité) qui relève de la compétence, d’un savoir-faire particulier.

"L’influence éducative n’a pas pour ambition de régenter des volontés mais d’éclairer des libertés qui se cherchent".

Eirick Prairat, « Autorité et respect en éducation » - 2005

L’autorité éducative, mélange équilibré et temporaire des trois formes d’autorité, a pour but de favoriser l’autonomie, c'est-à-dire la capacité à faire ses propres choix et aidant l’enfant à se décentrer, à collaborer au projet collectif. Elle permet à chacun de trouver sa place, facilite l‘intégration, en guidant les jeunes.

Sans autorité, l’éducation ne peut se faire.

L’autorité éducative est une autorité de référence car elle permet à l’enfant d’avoir des repères, de pouvoir se situer dans le monde et s’y orienter. Respectueuse et bienveillante, elle est souvent acceptée et reconnue par les jeunes et génère souvent estime et considération de leur part.

1.2. Punition / sanction ?

Dans le langage courant, sanction et punition sont souvent synonymes : il s’agit de faire respecter la loi en ayant recours à des moyens disciplinaires qui suppriment les comportements non acceptables. Or, il existe une différence qui envisage la discipline sous deux angles différents :

  • la dimension répressive qui concrétise le pouvoir du fort (l’adulte) sur le faible (l’enfant)
  • la dimension réparatrice justifiée par des règles connues et acceptées de tous.

La punition est l’expression d’un rapport de force dans lequel le dominant (l’adulte) exerce son pouvoir sur le dominé (l’enfant). La punition s’exerce dans le cadre d’un pouvoir personnel et peut paraître arbitraire car elle dépend en partie de l’individu en position de supériorité et est vécue comme un châtiment.

Les punitions sont vécues comme injustes si :

  • elles ne prennent pas appui sur des règles claires et partagées,
  • elles ne s’appliquent pas de la même manière à chacun,
  • elles peuvent être disproportionnées avec la faute.

Par ailleurs, elles sont parfois inefficaces car ont tendance à être vécues non seulement comme injustifiées mais aussi comme évitables sur le principe du « pas vu, pas pris ». Les enfants essaient alors de développer des stratégies pour échapper aux punitions.

La sanction éducative

L’autorité sanctionne car la sanction est une réponse concrète; l’absence de sanction n’exprime pas le consentement mais plutôt l’abandon.

Caractéristique d‘une sanction éducative juste

- La sanction s’adresse à un individu, pas à un groupe, car elle s’adresse à un sujet (conscient et responsable).

- Toute sanction appliquée doit être expliquée et comprise.

- La sanction doit porter sur les actes, pas sur l’identité ni sur les intentions.

- La sanction vise la frustration par la privation de l’exercice d’un droit.

- La sanction doit s’accompagner de mesures de réparation.

- La sanction doit être tournée vers l’avenir.

- La sanction doit être adaptée (âge), immédiate (pas de différé) et proportionnelle à l’acte

Eirick Prairat, « La sanction. Petites méditations à l’usage des éducateurs » - 1997

En définitive, la sanction est un outil pédagogique qui permet de comprendre les fautes/erreurs et permet la réparation.

2. Méthodes et approches pédagogiques

A la fois théorie (réflexion sur les systèmes et les procédés) et pratiques, le terme pédagogie (du grec « peda » : enfant et « agein  » : conduire, mener, élever) renvoie à tout ce qui concerne l’éducation, ou l’art d’éduquer, notamment à travers diverses méthodes et pratiques qui visent à transmettre savoirs, savoir-faire et savoir-être. La pédagogie est une série d’actions éducatives qui visent à provoquer des effets précis d’apprentissage. Seulement, il n’existe pas une forme de pédagogie : il existe tout un courant, qui a évolué au fil des découvertes (psychologie, médecine…), de l’histoire occidentale (économie, politique…) et des valeurs. Car la pédagogie est subordonnée à un ensemble de valeurs : idée que l’éducateur se fait du monde dans lequel il vit, de l’Homme (et de l’enfant) et des rapports mutuels entre tout ce qui fait société. Il s’agit donc pour les animateurs de s’interroger sur les manières de se construire des méthodes et pratiques qui conjuguent conceptions personnelles, objectifs et publics.

Les principales figures contemporaines de l’éducation et de la pédagogie
Francisco Ferre y Guardia (1859-1909) : pédagogue et éditeur anarchiste autodidacte espagnol. Fils d’agriculteurs aisés catholiques, devenu anticlérical, il milite pour une « école rénovée », pour la délivrance de l’enfant et la libre pensée. Il fonde notamment l’école moderne de Barcelone, mixte et laïque, d’où est exclue toute compétition  et où est encouragée la coopération. Il fonde aussi la Ligue internationale pour l’éducation rationnelle de l’enfance (1908).
John Dewey (1859-1952) : philosophe pragmatiste américain, célèbre initiateur de la pédagogie par la pratique - learning by doing : concept de théorie économique dans lequel la productivité augmente par la pratique / maîtrise du geste.
Jean-Ovide Decroly (1871-1932), biologiste belge qui a bifurqué vers la neuropsychiatrie puis vers la psychologie. Il a tiré des généralisations de ses observations d’enfants « normaux » ou « irréguliers » (terme belge désignant les handicapés mentaux) et a théorisé ce qu’il appelle « le centre d’intérêt » de l’enfant, insistant sur le fait que le langage est une des multiples formes d’expression. Pour lui, se réaliser comme individu, c’est développer toutes ses possibilités, dans toutes les instances, à travers les échanges avec le milieu de vie, chacun appartenant aussi à la chaîne du vivant. Il a été controversé pour la « méthode globale » de lecture qu’il a préconisée.
Maria Montessori (1870 – 1952) : médecin et pédagogue italienne pour qui l’enfant doit être au cœur d’un environnement éducatif adapté ; elle a systématiquement conjugué théorie et pratique : ses maisons des enfants (casa dei bambini) et matériels didactiques témoignent de cette exigence.
Janusz Korczak (1878-1942). Médecin-pédiatre et écrivain polonais, il est l’une des figures de la pédagogie de l'enfance les plus réputées, autant pour son œuvre de pédagogie, sa littérature enfantine, que pour son engagement en faveur des droits de l'enfant. Juif, il est aussi célèbre pour avoir choisi d'être déporté à Treblinka avec les enfants juifs du ghetto de Varsovie, qu’il avait créé en 1911-1912 et qu’il dirigeait. Il avait formé, dans l'orphelinat créé pour les enfants juifs de Varsovie, une forme de République des enfants, avec son propre Parlement, Tribunal et Journal. Dès le début du xxe siècle, Korczak a œuvré à une refonte complète de l’éducation et du statut de l’enfant, sur des bases constitutionnelles entièrement nouvelles, privilégiant la sauvegarde et le respect absolu de l’enfance. Ses multiples écrits pour enfants et pour adultes, l’exemple de ses deux orphelinats organisés en républiques d’enfants (« Dom Sierot » créée en 1912 et « Nasz Dom » en 1919), ses émissions de radio, son journal national d’enfants (« Mały Przegląd ») ont marqué des générations entières de petits Polonais. En artiste tout autant qu'en scientifique et clinicien, il a incarné une véritable pédagogie du respect, une école de la démocratie et de la participation qui font aujourd’hui universellement référence. La mémoire de ce médecin, éducateur, enseignant au destin exemplaire est entretenue par des associations (en Pologne, en Israël, en France) qui ont fait redécouvrir sa vie et son oeuvre.
Anton Semyonovich Makarenko (1888-1939) : pédagogue russe. À la suite de la Révolution russe, il a fondé des maisons coopératives pour les orphelins de la guerre civile, notamment la colonie Gorki : « collectivité éducative », dont le mode d’organisation est largement reconnu aujourd’hui comme pédagogie progressiste. Makarenko en a étudié différents aspects, par exemple l’indissociabilité des liens extérieurs et intérieurs, la corrélation entre la collectivité générale et les collectivités primaires, les types de rapports intracommunautaires et les fondements organisationnels de la collectivité, ainsi que ses traditions, son style et son ton. Il a inclus dans la vie de la collectivité éducative tous les rapports et types d’activité représentatifs de la société démocratique. Ses idées sur l’évolution des fonctions éducatives de la collectivité, qui devient, d’objet passif sur lequel s’exerce l’action des pédagogues, un sujet actif prenant en main l’organisation de sa vie propre (pédagogie sociale, institutionnelle et mutuelle) étaient très modernes.
Roger Cousinet (1881-1973) : pédagogue français, pionnier de l’éducation nouvelle en France. Élève d’Alfred Binet et d’Émile Durkheim avant la première guerre mondiale, son approche est profondément ancrée dans cette double culture scientifique de la psychologie et de la sociologie de l’enfant. Il est le promoteur d’une méthode de travail « libre par groupes » ; vers la pédagogie de projet.
Henri Wallon (1879-1962) : philosophe, psychologue (courant psychosocial), neuropsychiatre, pédagogue et homme politique français. Son nom est associé au plan Langevin-Wallon : projet de réforme du système éducatif français (1947). Wallon s'engage politiquement au moment de l'Affaire Dreyfus. Pendant la Seconde Guerre mondiale, il est interdit d'enseignement par le Gouvernement de Vichy et rejoint la Résistance. Il crée en 1948 la revue Enfance et devient président du Groupe français d'éducation nouvelle de 1946 à son décès. S'intéressant à la théorie psychosociale du développement de la personnalité (constructiviste), il affirme que « l'objet de la psychologie est de faire connaitre l'identité de l'homme sous différents aspects ». On ne peut pas étudier l'homme en dehors de son milieu naturel et social. Dès la naissance, on est dépendant des autres, ce qui amène à la communication et l'interaction sociale : « l'émotion fait le lien entre le biologique et le social », on ne devient pas un être social mais on est un être social (importance du milieu dans l’éducation des enfants).
Célestin Freinet (1896-1966) : pédagogue français. Militant engagé politiquement et syndicalement, en une époque marquée par de forts conflits idéologiques, il conçoit l’éducation comme un moyen de progrès et d’émancipation politique et civique. Enseignant, sa classe est conçue comme un atelier (production intégrale d’un journal) et sa pédagogie, comme Dewey, insiste sur le rôle du travail et de la coopération dans l’apprentissage et la responsabilisation des élèves : l’autorité du maître est une forme de violence ; si le travail est bien organisé, les élèves sont passionés et impliqués. Il crée une pédagogie fondée sur l’expression libre avec des techniques novatrices : production de textes libres, imprimerie, enquêtes et conférences, ateliers d’expression-création, correspondance scolaire, éducation corporelle, réunion de coopérative. Il expérimente sa conception de l’enseignement par le tâtonnement expérimental en fondant une école à Vence (publique depuis 1991 et classée au patrimoine de l’UNESCO).
Fernand Oury (1920 - 1998) est le fondateur, avec la psychologue Aïda Vasquez et Freinet de la pédagogie institutionnelle. Il dénonce l’école-caserne, montre les incidences thérapeutiques de sa pédagogie et l’influence des pédagogies institutionnelles sur la parole de l’enfant.
Donald-Woods Winicott (1896-1971), pédiatre et psychanalyste britannique. Il n’est pas un pédagogue au sens où il aurait enseigné ou dirigé une école ou autre institution d’éducation, mais il a fortement influencé la réflexion et les pratiques éducatives par sa clinique originale et son souci de transmettre ses observations et concepts à tous ceux qui interviennent dans la vie des enfants : parents, enseignants, éducateurs, personnel médical. Son travail sur le développement affectif des enfants, notamment sur le jeu et la créativité incluant les concepts d’espace et d’objets transitionnels ont modifié l’accueil de la petite enfance.
Jean Piaget
Philippe Meirieu : méthodes actives et pédagogie différenciée, l’éthique au cœur de la pédagogie

2.1. Trois grandes Méthodes

2.1.1. Les méthodes directives

  • fixer un processus considéré comme le meilleur ou le plus efficace.
  • exposer, informer, transférer la connaissance de « celui qui sait » vers « celui qui apprend ».
  • expliquer, argumenter, démontrer par le raisonnement, par des faits, par des preuves, par des liens avec le réel.
  • utiliser des méthodes de présentation favorisant l’attention, la compréhension et la mémorisation.
  • évaluer régulièrement les acquis pour vérifier les écarts et concordances entre les objectifs envisagés et les résultats obtenus.

2.1.2. Les méthodes actives

Les méthodes actives visent à rendre l’enfant acteur des savoirs qu’il construit à travers des situations de recherche et d’expérimentations, seul ou en groupe. En ce sens, elles valorisent l’autonomie.

Il s’agit globalement de :

  • faire par soi-même, expérimenter, faire l’expérience directe.
  • manipuler, réaliser, produire, « agir », apprendre en faisant (learning by doing).
  • pratiquer le « tâtonnement expérimental », tester, se tromper (droit à l’erreur), trouver des solutions singulières aux problèmes posés.
  • participer, s’impliquer, s’exprimer, donner son avis.
  • choisir, décider ou participer aux prises de décision.

« La voie normale de l’acquisition (…) le tâtonnement expérimental, démarche naturelle et universelle. Les acquisitions ne se font pas, comme on le croit parfois, par l’étude des règles et des lois mais par l’expérience ».

Augustin Freinet, Invariants pédagogiques, 1964.

2.1.3. Les méthodes interrogatives

Le philosophe OscarBrenifier, enseigne pour sa part « l’art du questionnement », qui consiste à utiliser des techniques d'animation en questionnant l’enfant (apprenant) pour guider sa réflexion et l'amener à trouver des solutions par lui-même :

  • poser des questions, faire se questionner, faire réfléchir.
  • utiliser les connaissances préalables pour découvrir des connaissances nouvelles (selon le principe d’assimilation décrit par Piaget).
  • aider à penser différemment, à envisager la nouveauté par le questionnement et les liens qu’il occasionne (selon le principe d’accommodation décrit par Piaget).
  • proposer une progression dans le questionnement afin de découvrir et comprendre graduellement une situation, un phénomène, un concept.
  • apprendre à argumenter son point de vue et à faire face à ses contradictions.

2.2. Les approches pédagogiques

2.2.1. La pédagogie de la découverte

  • découvrir, faire des 1ères expériences.
  • utiliser de manière opportuniste les situations qui se présentent.
  • faire expérimenter, tâtonner, laisser avancer par essais/erreurs.
  • titiller la curiosité, donner envie sans trop en dire.
  • proposer de la nouveauté, surprendre.
  • faire passer de détails disparates à un ensemble cohérent (induction, synthèse).

2.2.2. La pédagogie de projet

Comme son nom l’indique, la pédagogie de projet a pour objectif de faire passer à un collectif d’enfants des apprentissages à travers la réalisation d’une production concrète (résultat concret), socialisable, et qui intègre des savoirs nouveaux. L’animateur a un rôle d’accompagnateur, il apporte des outils, discute avec les enfants de la méthode, aide à la régulation des fonctionnements (groupes, moyens…) et assure l’aboutissement du projet marqué par sa représentation (spectacle, exposition, fête, voyage…). La pédagogie de projet, fondée sur la motivation et le collectif, fait partie des méthodes actives; le projet étant « un ensemble articulé d’objectifs et de moyens destinés à les réaliser », une « anticipation opératoire d’un futur désiré ».

Il s’agit globalement de :

  • choisir
    • avoir un but, se projeter dans un futur motivant.
    • avoir un thème, s’assurer de sa faisabilité.
  • Organiser
    • construire ensemble, se mobiliser collectivement.
    • instaurer des règles, une organisation, un fonctionnement.
    • faire en sorte que chacun trouve une place dans le groupe (et puisse éventuellement en changer en cours de projet).
  • produire
    • se donner des moyens et les utiliser.
    • communiquer, échanger, négocier, se confronter.
    • résoudre les difficultés rencontrées, s’entraîner/s‘entraider à la résolution de problèmes et à la prise de décision collective.
    • équilibrer la cohésion de groupe et l’expression des différences individuelles (« faire ensemble » pour apprendre à mieux « vivre ensemble »).
  • Evaluer
    • présenter le projet aux pairs, à un cercle plus large, revient à valoriser les efforts engagés et la réussite du projet.
    • bilan : permet de prendre de la distance, formaliser les acquis et/ou ajuster les comportements.

2.2.3. La pédagogie coopérative

La coopération est à l’origine un système économique et social d’usagers et/ou de producteurs qui a pour but de répondre à un besoin, un manque ressenti par la création d‘une structure coopérative, autogérée, sur la base d’égalité des droits et obligations, afin de travailler ensemble, de se rendre service. Le produit de la coopération appartient à tous, communautairement.

Issue du courant nommé cooperative learning, la pédagogie coopérative est, de la même façon, un système coopératif d’entraide basé sur les valeurs de partage, de respect et d’encouragement, qui forme l’enfant-citoyen à coopérer pour apprendre. Elle est un prolongement des travaux de Freinet, en ce sens qu’elle correspond à sa conception singulière des droits et statuts de l’enfant : citoyen en construction, capable d’assumer des responsabilités, libre de prendre des intiatives et d’aider ceux qui sont en difficulté.

Il s’agit globalement de :

  • apprendre à coopérer : collaborer ensemble en vue d’un objectif collectif ; interdépendance positive entre enfants.
  • développer la participation, l’autonomie et la responsabilité individuelle et collective.
  • développer l’esprit d’entreprise.
  • apprendre à communiquer, à négocier, à résoudre des conflits.
  • respecter les différences et les prendre en compte; créer, réfléchir et décider ensemble avec nos différences.
  • utiliser les potentiels de chacun au service de l’intérêt général.

Etre coopérateur, c’est pour l’enfant agir avec les autres et accepter que le produit de cette coopération appartienne à la communauté, pour l’animateur garantir la liberté de faire, de dire et de penser au sein du groupe, dans le respect de chacun.

2.2.4. La pédagogie à effet vicariant (modélisation)

  • observer et reproduire un modèle par imitation (intentions, motivations, stratégies, sentiment de réussite et d’autosatisfaction).
  • imiter à sa façon, avec sa personnalité et en fonction de son propre projet.
  • améliorer (ou adapter) le modèle imité jusqu’à fabriquer son propre modèle.
  • s’auto évaluer, envisager ses domaines de progression et la façon d’y arriver.

2.2.5. La pédagogie de résolution de problème

  • diagnostiquer une situation posant une difficulté, un problème.
  • formuler clairement le problème à résoudre.
  • proposer une hypothèse de résolution.
  • déterminer les conditions pour vérifier l’hypothèse.
  • tester empiriquement l’hypothèse.
  • établir un résultat.
  • comparer le résultat à l’hypothèse.
  • conclure.

2.2.6. La pédagogie par objectifs

Elle permet d’expliciter concrètement les valeurs éducatives pour passer des intentions théoriques aux réalisations pratiques. Elle subordonne les moyens aux buts recherchés et non l’inverse. La fixation d’objectifs précis permet aussi de pouvoir mettre en place une stratégie d’évaluation et de progrès, partant du fait qu’on ne peut améliorer que ce que l’on peut mesurer.

Attention néanmoins à ce que les objectifs fixés et leurs indicateurs de réussite proposés ne soient pas trop réducteurs, contribuant alors à une perte de sens et de vision d’ensemble. C’est pour cette raison qu’il est important de garder 2 niveaux : celui des valeurs et des intentions éducatives avec les « objectifs pédagogiques généraux » et celui des capacités et comportements concrets attendus avec les « objectifs pédagogiques opérationnels »; pédagogique signifiant bien « centré sur l’enfant et son développement ».

Enfin, l’enfant n’est pas un « objet » mais un « sujet » et, à ce titre, il peut évidemment ne pas rentrer dans l’intention de l’éducateur et poursuivre ses propres buts, son propre chemin de développement.

La pédagogie est davantage un art qu’une science exacte et demande à la fois du sens, de la méthode et une bonne capacité d’adaptation et d’improvisation face à la réalité.

Les objectifs éducatifs

Formuler des objectifs requiert de distinguer les objectifs généraux des objectifs opérationnels.

Exemples d’objectifs généraux : développer, favoriser, respecter, accompagner, permettre...

Exemples d’objectifs opérationnels (l’enfant sera capable de…) : reconnaître, décrire, comprendre, raconter…

3. L’évaluation de projet

Evaluer consiste à déterminer, fixer, apprécier la valeur de quelque chose.

« On ne peut améliorer ce qu’on ne peut mesurer. »

« Mieux mesurer = mieux piloter. »

Toute démarche de projet inclut une stratégie pour mesurer les effets de celui-ci. L’évaluation de projet doit principalement reposer sur les objectifs opérationnels fixés. On évalue des objectifs précis et mesurables à l’aide de critères à remplir et d’indicateurs à observer.

Evaluer permet donc de suivre l’avancée d’un projet et d’étudier son impact, de vérifier la pertinence des choix effectués et l’atteinte des objectifs, d’apprécier la bonne utilisation des ressources (ou « moyens »), de procéder à des modifications, des ajustements, enfin de remobiliser l’équipe.

L’évaluation « sommative » ou quantitative fait la somme de ce qui va et ce qui ne va pas, de ce qui a été atteint ou pas en termes d’objectifs fixés, elle liste et additionne les points positifs et les points négatifs. Dans un projet, elle peut servir lors de bilans préalables, intermédiaires ou finaux pour aider au constat.

L’évaluation « formative » ou qualitative permet, à partir des observations recueillies, d’opérer des changements, de proposer des solutions d’amélioration, de résoudre des problèmes. Elle permet les ajustements réguliers nécessaires au bon déroulement. Elle sert à vérifier les progrès, le chemin parcouru et à se donner des éléments complémentaires pour la suite. Les erreurs font partie intégrante de ce processus où le diagnostic des problèmes sert de feed-back constructif visant l’amélioration.

Le critère d’évaluation est l’élément de référence sur lequel il va être possible d’émettre un jugement, d’estimer la réussite d’un objectif ou encore d’estimer les progrès réalisés. Le critère est formulé soit sous la forme d’un mot clé soit sous celle d’un objectif précis et mesurable (ou « opérationnel »).

L’indicateur de réussite est un élément concret, observable dans la réalité et qui permet de rendre compte du critère choisi. Les indicateurs prennent souvent la forme de micro-objectifs intermédiaires.

Exemples de critères et indicateurs : Stage canyoning avec des 14-17 ans

Objectif général : Initier un groupe d’adolescents à la pratique des sports de rivière.
Objectif opérationnel : Les jeunes seront capables au bout d‘une semaine de descendre le Rio Vero en canyoning en totale autonomie.
CRITERESINDICATEURS

Bonne maitrise technique

de l’activité

Les jeunes savent sauter en gérant leur appréhension

Les jeunes savent descendre en rappel

Les jeunes savent glisser le long d’une goulotte

Les jeunes savent nager avec le sac sans trop se fatiguer

Les jeunes savent traverser sur une corde

Connaissance et respect

des règles de sécurité

Les jeunes utilisent le bon matériel sans hésiter et sans faire d’erreur

Les jeunes savent repérer les endroits difficiles

Les jeunes connaissent les gestes de secours indispensables dans certaines situations

Les jeunes savent consolider les ancrages des cordes de rappel

Les jeunes savent décider de la bonne action à réaliser en fonction des risques et de leurs capacités

Capacité à pratiquer en autonomie

Ils prennent des initiatives (peu ? beaucoup ?)

Ils savent faire le bon geste au bon moment

Ils évaluent le temps et les distances avec justesse

Ils connaissent le chemin et reconnaissent les difficultés

Plaisir et enthousiasme

Ils s’amusent, rient, blaguent (peu ? souvent ?)

Ils sont positifs

Ils s’émerveillent des paysages

Ils ont envie de continuer

Ils ont envie de recommencer

Questions d’évaluation :

- Est-ce bien cela qu’il fallait faire ?

- Avons-nous atteint les objectifs ?

- Si non, pour quelles raisons ?

- Qu’avons-nous appris ?

- Nos méthodes étaient-elles adaptées ?

- Les moyens à disposition ont-ils été bien utilisés ?

- Les ressources ont-elles été converties en résultats de manière économe ?

- Quels effets à long terme ? (positifs, négatifs, effets induits, directs ou indirects)

« Ce qui est mesuré est fait. »

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