Par Gilbert Lemardeley
Dernière mise à jour :  septembre 2019

Parce que l'action administrative repose sur l'intérêt général qui fonde la notion de service public, il est normal que les fonctionnaires disposent de certains droits pour exercer leurs missions. Pour cette même raison, ils doivent également supporter les obligations inhérentes à leurs charges.

Puisqu'elle est en charge de la satisfaction de l'intérêt général qui ne correspond pas à l'addition des intérêts particuliers, il est nécessaire que l'administration dispose de pouvoirs exorbitants du droit privé. Dès lors, il est normal que les agents publics possèdent des droits qui leur permettent d'exercer leurs fonctions et les mettent à l'abri de l'arbitraire. Il est non moins légitime qu'ils doivent observer certaines obligations pour respecter la légalité et l'équité. Les droits et obligations des fonctionnaires et agents contractuels sont fixés par la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983.

1. Les droits du fonctionnaire

1.1. La liberté d'opinion

Elle s'analyse comme le droit de chaque individu au respect de ses idées et de sa vie privée. Elle garantit qu'aucune distinction ne peut être faite entre les fonctionnaires en raison de leurs opinions syndicales, politiques, philosophiques ou religieuses. Ce droit doit néanmoins se conjuguer avec l'obligation de réserve, non prévue par la loi, mais consacré par la jurisprudence du Conseil d'État.

1.2. Le droit à la formation

La loi n° 84-594 du 12 juillet 1984, relative à la formation des agents de la fonction publique territoriale fonde les modalités de ce droit. Elle recouvre principalement 6 types de formation :

1° La formation d'intégration et de professionnalisation, définie par les statuts particuliers, qui comprend :

a) Des actions favorisant l'intégration dans la fonction publique territoriale, dispensées aux agents de toutes catégories ;

b) Des actions de professionnalisation, dispensées tout au long de la carrière et à l'occasion de l'affectation dans un poste de responsabilité ;

2° La formation de perfectionnement, dispensée en cours de carrière à la demande de l'employeur ou de l'agent ;

3° La formation de préparation aux concours et examens professionnels de la fonction publique ;

4° La formation personnelle suivie à l'initiative de l'agent ;

5° Les actions de lutte contre l'illettrisme et pour l'apprentissage de la langue française ;

6° Les formations destinées à mettre en œuvre un projet d'évolution professionnelle,

Ces formations doivent s'inscrire dans un plan de formation. 

A noter que la formation constitue à la fois un droit, mais aussi, dans nombre de cas une obligation, liée notamment au principe d'adaptabilité du service public.

1.3. Le droit syndical

Il constitue un principe constitutionnel. Il comprend la liberté de constituer des organisations syndicales et la garantie de non-discrimination à l'égard des syndiqués.

1.4. Le droit de grève

C'est également un droit garanti par la constitution. La grève se définit comme une cessation concertée du travail pour appuyer des revendications professionnelles. L'exercice du droit de grève entraîne des conséquences pécuniaires pour les grévistes en raison de l'absence du service fait  ; même si la règle du trentième indivisible a été écartée (décision du Conseil constitutionnel du 28 juillet 1987) au profit des agents de la fonction publique territoriale, contrairement à leurs collègues de la fonction publique d'État. Ainsi, un agent qui fait grève une demi journée, verra sa rémunération amputée d'1/60e de son traitement mensuel.

La loi 2019-828 du 6 août 2019, dite "de transformation de la fonction publique" entend encadré le droit de grève dans les services publics locaux.

Ainsi, l'article 7-2 introduit par la loi de 2019, précitée, dans la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984, portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale prévoit l’autorité territoriale et les organisations syndicales qui disposent d’au moins un siège dans les instances au sein desquelles s’exerce la participation des fonctionnaires (CT, CHSCT, CAP, futurs comités sociaux territoriaux) peuvent engager des négociations en vue de la signature d’un accord visant à assurer la continuité des services publics :

−de collecte et de traitement des déchets des ménages ;
−de transport public de personnes ;
−d’aide aux personnes âgées et handicapées ;

- d’accueil des enfants de moins de trois ans ;
−d’accueil périscolaire ;
−de restauration collective et scolaire ;
dont l’interruption en cas de grève des agents publics participant directement à leur exécution contreviendrait au respect de l’ordre public, notamment à la salubrité publique, ou aux besoins essentiels des usagers de ces services. On notera que les sapeurs-pompiers et les policiers municipaux sont exclus de ce dispositif.

Cet accord détermine, afin de garantir la continuité du service public, les fonctions et le nombre d’agents indispensables ainsi que les conditions dans lesquelles, en cas de perturbation prévisible de ces services, l’organisation du travail est adaptée et les agents présents au sein du service sont affectés. Cet accord doit être approuvé par l’assemblée délibérante.

À défaut de conclusion d’accord dans un délai de douze mois après le début des négociations, les services, les fonctions et le nombre d’agents indispensables afin de garantir la continuité du service public sont déterminés par délibération de l’organe délibérant.

Les agents devront indiquer leur intention de participer à la grève au plus tard 48 heures avant le début de la cessation concertée du travail. Dans le cas où un préavis de grève a été déposé et en vue de l’organisation du service public et de l’information des usagers, les agents des six secteurs précités devront informer, au plus tard quarante-huit heures avant de participer à la grève, comprenant au moins un jour ouvré, l’autorité territoriale ou la personne désignée par elle, de leur intention d’y participer. Les informations issues de ces déclarations individuelles ne peuvent être utilisées que pour l’organisation du service durant la grève et sont couvertes par le secret professionnel. Leur utilisation à d’autres fins ou leur communication à toute personne autre que celles désignées par l’autorité territoriale comme étant chargées de l’organisation du service est passible des peines prévues à l’article 226-13 du code pénal, pour atteinte au secret professionnel.

L’agent qui a déclaré son intention de participer à la grève et qui renonce à y prendre part doit en informer l’autorité territoriale au plus tard vingt-quatre
heures avant l’heure prévue de sa participation afin que celle-ci puisse l’affecter.
Par ailleurs, l’agent qui participe à la grève et qui décide de reprendre son service en informe l’autorité territoriale au plus tard vingt-quatre heures avant l’heure de sa reprise afin que l’autorité puisse l’affecter. Ces obligations d’information ne sont pas requises lorsque la grève n’a pas lieu ou lorsque la reprise de service est consécutive à la fin de la grève.
Lorsque l’exercice du droit de grève en cours de service peut entraîner un risque de désordre manifeste dans l’exécution du service, l’autorité territoriale peut imposer aux agents ayant déclaré leur intention de participer à la grève d’exercer leur droit dès leur prise de service et jusqu’à son terme.
Encourt une sanction disciplinaire l’agent qui n’a pas informé son employeur de son intention de participer à la grève ou qui n’a pas exercé son droit de grève dès sa prise de service, dans les conditions prévues ci-dessus. Cette sanction disciplinaire peut également être prise à l’encontre de l’agent qui, de façon répétée, n’a pas informé son employeur de son intention de renoncer à participer à la grève ou de reprendre son service.

1.5. Le droit à congés

On distingue principalement 5 types de congés.

1.5.1. Les congés annuels

5 fois les obligations hebdomadaires de service

1.5.2. Les congés de maladie

  • ordinaires

3 mois à plein traitement et 9 mois à demi-traitement

  • de longue maladie

1 an à plein traitement et 2 ans à demi-traitement

  • de longue durée

3 ans à plein traitement et 2 ans à demi-traitement

  • pour accident de service 

1.5.3. Les congés de maternité et d'adoption, congés de paternité

1.5.4. Les autorisations d'absence

Elles s sont notamment prévues pour des événements familiaux (mariage, obsèques, ...) ; ou pour l'exercice du droit syndical.

1.6. Le droit à rémunération

Les fonctionnaires ont droit, après service fait, à une rémunération comportant le traitement, l’indemnité de résidence, le supplément familial de traitement ainsi que les indemnités instituées par un texte législatif ou réglementaire (article 20 de la loi du 13 juillet 1983). A ces éléments peut s'ajouter la nouvelle bonification indiciaire (NBI) qui sont des points d'indice additionnés au traitement, compte tenu de certaines missions exercées. 

1.7. Le droit à la protection

Les agents publics ont droit à une protection fonctionnelle contre les violences, menaces, injures, diffamations ou outrages dont ils peuvent être victimes à l’occasion ou en raison de leurs fonctions (article 11 de la loi du 13 juillet 1983 précitée).

2. Les obligations du fonctionnaire

2.1. Le pouvoir hiérarchique

Tout fonctionnaire quel que soit son rang est responsable de l'exécution des tâches qui lui sont confiées. Il doit se conformer aux instructions de son supérieur hiérarchique sauf si celles-ci sont manifestement illégales et de nature à compromettre un intérêt public, il est dans ce cas soumis à une obligation de désobéissance, faute de quoi sa responsabilité disciplinaire et/ ou pénale pourra être engagée.

2.2. L'obligation de réserve

Elle concerne l'expression des opinions personnelles du fonctionnaire. Elle ne porte pas sur le contenu de ses opinions mais sur la façon dont elles se traduisent par la parole, l'écrit ou l'action. Il s'agit d'une obligation consacrée par la jurisprudence du Conseil d'Etat, elle n'est pas au nombre des obligations prévues par la loi du 13 juillet 1983.

2.3. La discrétion professionnelle

Elle a pour but de protéger l'administration contre la divulgation d'informations relatives au service. La loi impose la discrétion au sujet de faits ou de documents dont le fonctionnaire a eu connaissance dans l'exercice de ses fonctions.

2.4. Le secret professionnel

Il est institué par le code pénal. Le secret professionnel protège l'usager et non l'administration. Des dérogations sont prévues par la loi : dénonciation des causes et délits, non opposabilité à l'autorité judiciaire exerçant l'action pénale,  …

La violation de ces obligations peut entraîner le déclenchement de la procédure disciplinaire.

2.5. Le non cumul

Les agents publics doivent consacrer l'intégralité de leur activité professionnelle aux tâches qui leur sont confiées par l'administration qui les emploie.

Il existe des dérogations à cette interdiction de cumul :

  • production des œuvres de l'esprit ;
  • création, reprise ou poursuite d'activités au sein d'une entreprise, sous certaines conditions très encadrées ;
  • les enseignements ou formations dispensés à titre accessoire.

2.6. L’obligation de neutralité et respect de la laïcité

S’il jouit de la liberté d’opinion, le fonctionnaire ne doit pas se servir du service public comme un moyen de propagande. Il est également soumis au principe de laïcité : il ne peut afficher ses convictions religieuses durant son service, il doit traiter de façon égale toutes les personnes et respecte leur liberté de conscience et leur dignité (article 25 de la loi du 13 juillet 1983, précitée).

2.7. L’obligation d’impartialité

L’agent public doit traiter de  la même manière tous les usagers du service public dès lors qu’ils se trouvent dans une situation identique (article 225-1 du code pénal).

2.8. Les autres obligations déontologiques

La loi n° 2016-483 du 20 avril 2016 relative à la déontologie et aux droits et obligations des fonctionnaires a modifié en profondeur la loi du 13 juillet 1983. Ainsi, cette loi réaffirme les principes déontologiques que les agents publics doivent appliquer : impartialité, intégrité et probité, neutralité, respect du principe de laïcité.

La loi vise également à renforcer la lutte et la prévention des conflits d'intérêts en prévoyant la conduite à adopter par les fonctionnaires qui estiment se trouver dans une telle situation selon qu'ils sont placés dans une position hiérarchique, qu'ils ont reçu une délégation de signature, qu'ils exercent des fonctions juridictionnelles, ...

Les fonctionnaires peuvent désormais consulter un référent déontologue, soit placé auprès de la collectivité (ou de l’établissement public), soit siégeant au centre de gestion. Il est chargé de leur apporter tout conseil utile au respect des obligations et des principes déontologiques.

Les fonctionnaires et contractuels nommés sur certains emplois de direction générale doivent transmettre à la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique (HATVP) [qui a le statut d’autorité administrative indépendante] une déclaration exhaustive de leur situation patrimoniale ; puis, à nouveau, dans les deux mois qui suivent la cessation de leurs fonctions. Les emplois concernés sont énumérés dans le décret n° 2016-1968 du 28 décembre 2016 pris pour l'application des articles 25 quinquies et 25 nonies de la loi du 13 juillet 1983.

La Commission de déontologie de la fonction publique (communes aux trois fonctions publiques), chargée d'apprécier le respect des principes déontologiques inhérents à l'exercice d'une fonction publique, est une instance auprès du Premier ministre. La loi réaffirme le principe de non cumul d'activités des fonctionnaires et l'interdiction d'exercer une activité privée lucrative de quelque nature que ce soit. Des dérogations sont toutefois prévues. Toutefois, à compter du 1er février 2020, la loi du 6 août 2019, prévoit que les compétences de la Commission de déontologie de la fonction publique sont dévolues à la HATVP, cette commisison étant supprimée.

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