Par Karine Brument
Dernière mise à jour : novembre 2018

Introduction

La réglementation du travail tend à garantir les travailleurs contre les risques de dégradation de leur santé physique et morale au travail. Pour cela, certaines dispositions conventionnelles et réglementaires sont prévues. Elles concernent notamment la durée du travail, les congés, les repos ainsi que les conditions d’hygiène et de sécurité du travail.
L’employeur n’est pas seulement responsable de la sécurité de ses salariés, il l’est aussi de tous ceux qui sont appelés à intervenir dans sa structure ou sur son site dans le cadre d’une prestation (quelle qu’elle soit) effectuée par une entreprise sous-traitante, domiciliée ou non sur le territoire national.
Depuis une trentaine d'années, le spectacle vivant a subi des mutations importantes sur le plan technique. Le succès et le développement des concerts et des grands événements ont généralisé l'utilisation d'équipements logistiques et scéniques particulièrement adaptés aux productions momentanées.
Cette évolution, liée au développement de structures de plus en plus complexes et mécanisées, ont contribué à la création de nouveaux corps de métiers liés à des constructions techniques (podiums, tribunes, échafaudages, grils, décors, etc.) ainsi qu’à des interventions spécifiques en hauteur. Ceci nécessite l'intervention de professionnels formés et expérimentés.
Dans ce cadre, les salariés (techniciens et artistes) du spectacle se doivent d’être sensibilisés à ces techniques ainsi qu’aux méthodes de prévention des risques correspondantes et à leur contexte juridique.

1. Droit du travail

Un producteur, qui détient une licence d’entrepreneur de spectacles, n’est pas un prestataire administratif (établissement de contrats de travail, bulletins de salaire, déclarations sociales) ni une société de « portage » salarial.
Ainsi, la nature de l’activité (principale) établie et le nombre de représentations déterminent la nécessité ou non d’avoir une licence d’entrepreneur de spectacle. Cette licence est donc obligatoire pour tout organisateur, professionnel ou pas, organisant plus de six représentations par an.
Pour chaque structure, l’INSEE1 définit l’activité figurant dans la Nomenclature d’Activité Française (NAF) qui correspond à son activité principale exercée ; le code qui correspond à l’activité en question est le code APE2. Ce dernier n’ayant qu’une finalité statistique, il fournit une présomption d’exercice de l’activité correspondant au code mais n’en est pas la preuve.

1.1. Notions d’employeur occasionnel

La loi définit l'exercice occasionnel de l'activité d'entrepreneur de spectacles. Le nombre de représentations autorisées, sans licence, est fixé à six représentations par année civile. Les entrepreneurs occasionnels de spectacles vivants sont :

  • les personnes physiques ou morales qui n’ont pas pour objet ou pour activité principale l’exploitation de lieux de spectacles, la production ou la diffusion de spectacles,
  • les groupements d’artistes amateurs bénévoles, constitués sous forme d’association loi 1901, lorsqu’ils font appel à un ou plusieurs artistes ou techniciens du spectacle percevant une rémunération.

Les représentations doivent cependant faire l’objet d’une déclaration préalable à la Direction Régionale des Affaires Culturelles (DRAC) ou, par délégation, à la Préfecture de Région, un mois au moins avant la date prévue de celles-ci.

1.2. Régimes des salariés du spectacle

1.2.1. L’intermittence

Les intermittents du spectacle sont des salariés dont l'activité présente une alternance de périodes travaillées et non travaillées.
Les intermittents sont des salariés du spectacle vivant, ou enregistrés sous statut salariés, qui sont engagés par succession de Contrat à Durée Déterminée (CDD). Ils sont donc privés d'emploi par intermittence. Ils ne doivent pas avoir un seul et même employeur.
L’indemnisation du chômage des intermittents du spectacle est un régime particulier pour :

  • Les artistes du spectacle engagés par CDD.
  • Les ouvriers et techniciens engagés par CDD par les employeurs dont le domaine d'activité est strictement défini selon les codes d'activité (APE) et dont la qualification est mentionnée sur une liste.

Leurs droits à l'assurance chômage sont définis par deux textes annexés à la convention d'assurance chômage, les annexes 8 et 103.
Pour résumer, intermittent du spectacle n'est pas un métier : un intermittent du spectacle est avant tout un musicien, un comédien, un technicien du son, etc. qui travaille sous contrat de travail à durée déterminée. L’intermittence est un régime d’indemnisation destiné à ceux dont l'activité professionnelle ne peut pas être régulière.
Ces salariés peuvent bénéficier d'une allocation d'assurance chômage spécifique, sur les périodes durant lesquelles ils ne sont pas sous contrat de travail, lorsque leur situation répond aux conditions posées par les annexes 8 et/ou 10 de la convention d'assurance-chômage.
Par ailleurs, on ne saurait assimiler tout travailleur du spectacle à un intermittent car certains d’entre eux sont des salariés dits « permanents », à savoir ceux embauchés sous Contrat à Durée Indéterminée (CDI).
Enfin, ces « intermittents » définis par l'usage, ne doivent pas être confondus avec les personnes en « Contrat à Durée Indéterminée Intermittent » (CDII). Ce type de contrat prend en compte la saisonnalité de l'entreprise et prévoit des périodes pendant lesquelles le salarié ne travaillera pas.
Il ne peut y avoir recours au CDII que pour certaines professions, fixées par les partenaires sociaux. Dans les entreprises pour lesquelles une convention ou un accord collectif de travail étendu ou une convention ou un accord d’entreprise ou d’établissement le prévoit, ces contrats peuvent être conclus.
Le but est de pourvoir des emplois permanents, définis par cette convention ou cet accord, qui par nature comportent une alternance de périodes travaillées et de périodes non travaillées.

1.2.2. L’abattement forfaitaire

L’abattement forfaitaire est une déduction permettant de simplifier la prise en compte des frais d’un salarié dans l’exercice de son activité professionnelle.
De ce fait, un salarié artiste peut profiter d’une déduction forfaitaire (sous certaines conditions et comprise entre un plancher et un plafond) lors de sa déclaration de revenus.
Ainsi, les artistes salariés peuvent bénéficier d’un abattement professionnel, dans la mesure où ils ont donné leur accord. Cet abattement est de :

  • 20% pour les artistes-musiciens
  • 25% pour les autres artistes-interprètes

L’avantage d’une déduction forfaitaire est d’augmenter le net à payer, mais elle réduit les droits de sécurité sociale, de chômage et de retraite.

1.3. Le GUSO - Le Guichet unique

La rémunération d'artistes du spectacle relève de la loi du salariat4 et impose donc à ceux qui les emploient de respecter leurs obligations d'employeur : contrat de travail, fiche de paie et paiement des charges sociales à tous les organismes sociaux obligatoires.
Prenant en compte la difficulté que le respect de ces obligations imposait pour les organisateurs de spectacle dont ce n'était pas le métier, les organismes sociaux du spectacle ont en 1999 créé le Guichet Unique du Spectacle Occasionnel (GUSO).
C’est un service de simplification administrative de gestion des emplois artistiques. Il s'adresse, depuis le 1er janvier 2004, à tous les employeurs d'artistes qui n'ont pas pour activité principale le spectacle, sans limite du nombre de représentations.
Depuis cette date, la notion « d'occasionnel » n'a donc plus de raison d'être. Malgré cela, le sigle GUSO a été conservé mais le service est devenu à ce jour « le Guichet Unique ».
Relève donc du guichet unique toute personne physique (particulier, commerçant, profession libérale …), toute personne morale de droit privé (association, société, comité d'entreprise…) ou de droit public (services de l'Etat, établissements publics, collectivités territoriales…) qui : 

  • n'a pas pour activité principale ou pour objet l'exploitation d'un lieu de spectacle ou la production ou la diffusion de spectacles,
  • emploie sous contrat à durée déterminée des artistes ou des techniciens qui concourent au spectacle vivant.

Le guichet unique ne concerne que le spectacle vivant, c'est-à-dire les représentations sur scène avec la présence d'au moins un artiste rémunéré. Ne sont donc pas concernés les prestations enregistrées, les cours, les formations et ateliers.
Il est tout de même conseillé lors d’une première déclaration ou en cas de doute sur un contrat de contacter un conseiller du guichet unique.

1.4. Les conventions collectives

Avant de débuter les procédures contractuelles, tout employeur qui envisage de recourir à l’emploi d’artistes ou de techniciens du spectacle devra, d’une part, s’interroger sur la convention collective applicable et, d’autre part, procéder à l’affiliation aux différents organismes sociaux.
Il est important de prendre le temps de déterminer la bonne convention collective. En effet, en cas d’erreur, les risques encourus sont quasiment les mêmes que ceux liés à la non-application d’une convention collective étendue.
Certaines structures culturelles recherchent parfois la convention applicable en fonction des salariés embauchés ou de leur code APE. En fait, c’est l’activité principale de l’employeur qui doit être prise en compte.
Dès lors que l’entreprise relève d’une convention collective, celle-ci s’applique à tous ses salariés, qu’ils relèvent du régime général ou de l’Intermittence du spectacle.

Attention cependant à l’existence de « clauses miroirs ». Celles-ci stipulent qu’une entreprise couverte par une convention X peut être amenée à exercer temporairement une activité relevant d’une convention Y. S’il existe une clause miroir entre la convention X et la Y, alors les rapports entre l’employeur et les salariés sont temporairement dépendants de la convention Y.
A ce jour, il existe des clauses miroirs entre les conventions collectives suivantes :

  • Convention collective nationale de la production audiovisuelle (IDCC 2642).
  • Convention collective nationale de la production de films d'animation (2412).
  • Convention collective nationale de la production cinématographique (3097).
  • Convention collective nationale des entreprises techniques au service de la création et de l'événement (2717).

2. Sécurité au travail

2.1. Généralités

Le décret 85-603 modifié relatif à l’hygiène et à la sécurité du travail ainsi qu’à la médecine professionnelle dans la fonction publique territoriale énonce l’organisation de la prévention dans les collectivités et établissements publics. Il décrit la définition et le rôle des acteurs de la prévention pour concourir à l’amélioration de la sécurité et des conditions de travail des agents et renvoie vers la partie IV du Code du Travail en indiquant que ces règles sont applicables en matière de santé et de sécurité.
La fiche l’hygiène et la sécurité dans la fonction publique territoriale précise les modalités de mise en œuvre d’une politique de prévention des risques professionnels.

2.2. Le décret « bruit » - La réglementation sonore

Un niveau sonore important et/ou un temps d’exposition long au « bruit » peut provoquer des troubles psychoacoustiques et physiologiques.
Les dispositions du Code de la santé publique5 s’appliquent (sauf exception6) aux bruits de voisinage, c’est-à-dire aux bruits de nature à porter atteinte à la tranquillité du voisinage ou à la santé de l’homme par leur durée, leur répétition ou leur intensité7.
Toute personne à l’origine d’une nuisance sonore, dans un lieu privé ou public, s’expose à des sanctions.
En 1998, est sorti un décret pour le contrôle des niveaux sonores à l’intérieur des lieux diffusant habituellement de la musique amplifiée8, à l’exclusion des salles dont l’activité est réservée à l’enseignement de la musique et de la danse.
L’objectif étant la protection des personnes à l’intérieur de ces établissements, mais aussi dans les locaux contigus. Il s’impose autant aux exploitants des établissements qu’aux organisateurs des manifestations s’y déroulant.
Dans les locaux proches de ces établissements (ou situés à l’intérieur), à usage d’habitation ou destinés à un usage impliquant la présence prolongée de personnes (locaux de travail, par exemple), les mesures doivent être conformes aux valeurs maximales définies par le code de la santé publique.

Ainsi, l’exploitant d’un établissement est tenu d’établir une étude de l’impact des nuisances sonores comportant les documents suivants :

  • une étude acoustique permettant d’estimer les niveaux de pression acoustique, tant à l’intérieur qu’à l’extérieur des locaux, et certifiée par un organisme agréé,
  • la description des dispositions prises pour limiter le niveau sonore et les émergences telles que limiteur, isolation phonique, etc.

La réglementation de 1998 ne s’applique pas aux activités de plein air comme les festivals qui restent assujettis au code de la santé publique.
Les seuils d’émergence autorisés étant très faibles, les tribunaux ne peuvent que condamner les organisateurs des manifestations publiques, en cas de plainte des riverains.

2.3. Les règles de sécurité du travail en hauteur

Les évolutions complexes de la technicité des spectacles ont développé les « travaux d'accès difficiles » ou d’accroches dites « acrobatiques » (correspondant au terme anglais « Rigging »). Les méthodes d'accrochages acrobatiques et les risques importants qu'elles impliquent nécessitent l'intervention de professionnels formés et expérimentés.
Depuis le décret de septembre 2004, la réglementation considère que toute chute peut être dangereuse, quelle que soit la hauteur. Toute élévation au-dessus du niveau du sol constitue désormais un travail en hauteur.
Les travaux en hauteur doivent être réalisés à partir d’un plan de travail conçu, installé ou équipé de manière à préserver la santé et la sécurité des travailleurs et permettre l’exécution des travaux dans des conditions ergonomiques. La prévention des chutes de hauteur sera assurée :

  • soit par un garde-corps de 1 mètre à 1,10 m de haut avec une lisse intermédiaire et une plinthe de 10 à 15 cm, 
  • soit par tout autre moyen assurant une sécurité équivalente.

Sinon et seulement dans ce cas :

  • des dispositifs de recueil souples installés et positionnés de manière à permettre d’éviter une chute de plus de 3 mètres,
  • si les dispositifs de protection collective ne peuvent être installés sur le plan de travail, la protection individuelle des travailleurs sera assurée au moyen d’un système d’arrêt de chute ne permettant pas une chute libre de plus d’un mètre ou limitant dans les mêmes conditions les effets d’une chute de plus grande hauteur.

Ainsi, tout utilisateur d’un tel équipement individuel devra être formé sur sa mise en place, ses réglages, les points d’accrochage de la longe, les points à vérifier avant son utilisation, son rangement et stockage.
De plus, il doit être mis en place une organisation pour que le travailleur en hauteur ne soit jamais seul afin de pouvoir le secourir dans un délai compatible avec sa santé.
Il est interdit d’utiliser des échelles, escabeaux et marchepieds comme poste de travail. Leur utilisation est tout de même tolérée en cas d’impossibilité de recourir à un équipement assurant une protection collective ou lorsque l’évaluation du risque a établi que ce risque est faible et qu’il s’agit de travaux de courte durée et non répétitifs.

2.5. L’affichage obligatoire

Suite à l'ordonnance du 26 juin 2014, la liste des dispositions obligatoires pour toutes les entreprises à partir d’un salarié est la suivante :

  • L'affichage du code du travail (médecine du travail ; Inspection du travail ; convention collective applicable...).
  • L'affichage égalité professionnelle hommes et femmes.
  • Consignes de sécurité.
  • Numéros d'urgence.
  • L'affichage Interdiction de fumer.
  • L'affichage zone fumeur.
  • L'affichage planning des départs en congés
  • L'affichage modalités d'accès au document unique.
  • L'affichage du CHSCT (plus de 50 salariés).

Obligation de diffusion concernant la législation du droit du travail pour :

  • L'affichage harcèlement moral et sexuel
  • L'affichage lutte contre les discriminations

3. Bibliographie - Sitothèque

Droit français :

  1. ^ L'Institut National de la Statistique et des Etudes Economiques collecte, produit, analyse et diffuse des informations sur l'économie et la société françaises www.insee.fr/
  2. ^ Activité Principale Exercée
  3. ^ http://www.pole-emploi.fr/informations/les-allocations-versees-aux-intermittents-du-spectacle-@/article.jspz?id=60567
  4. ^ C’est la « présomption de salariat » inscrite dans le code du travail à l'article L 7121-3 et suivants.
  5. ^ Art. R.1334-30 s. Code de la santé publique.
  6. ^ Art. L.4111-1 Code du Travail
  7. ^ Art. R.1334-31 Code du Travail
  8. ^ Décret 98-1143 du 15 décembre 1998 codifié aux articles R.571-25 à R.571-30 du Code de l’environnement.
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Créé le 19 octobre 2017
    
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